Colloque organisé par Damien Boquet, Blaise Dufal et Pauline Labey
Institut Universitaire de France CNRS « Université d’Aix-Marseille I UMR TELEMME EHESS » Centre de Recherche Historique
30, 31 mai ? 1er juin 2011
Aix-en-Provence Maison Méditerranéenne des Sciences de l’Homme
salle Georges Duby
Présentation :
« A lire Foucault, on se persuade aisément que l’histoire est encore très jeune ». Cette réflexion de Jacques Léonard, faite en 1976 dans son compte rendu de Surveiller et punir, doit être prise au sérieux. Elle vaut pour aujourd’hui. Certes, les relations entre l’œuvre de Michel Foucault et les historiens n’ont pas toujours été sans nuages, comme en témoigne par exemple la déroutante scénarisation de la table-ronde du 20 mai 1978 entre M. Foucault et une douzaine d’historiens, fondus pour l’occasion en une unique instance d’autorité(s), l’« Historien collectif « . Michel Foucault disait alors qu’il souhaitait » événementialiser des ensembles singuliers de pratiques, pour les faire apparaître comme des régimes différents de juridiction et de véridiction ». L’histoire savante qui siégeait ce jour-là face à lui n’avait-elle pas pris le masque d’un de ces régimes de véridiction ? Quoi qu’il en soit, 50 ans après la parution de l’Histoire de la folie et alors que s’achève la publication des cours au collège de France, le dialogue entre l’œuvre de Michel Foucault et les historiens se poursuit. Il n’a jamais cessé.
Cette rencontre, qui souhaite approfondir le sillon de la journée d’études organisée en mars 2010 à l’EHESS, ne se donne pas pour objectif d’évaluer la qualité historiographique des écrits de M. Foucault mais de mettre en lumière l’usage que les historiens font aujourd’hui de la pensée de M. Foucault dans leur pratique scientifique et leur réflexion épistémologique. Car au-delà des débats entre « l’historien et le philosophe », il convient de mesurer l’imprégnation dans l’épistémè des historiens des analyses, paradigmes ou simples intuitions proposés par M. Foucault, dans la diversité et les évolutions de sa pensée.
L’« histoire au présent » avec Foucault recouvre ainsi l’ensemble des champs historiographiques et des pratiques d’investigation marqués par la pensée de Michel Foucault, incluant les corrections et les inévitables métissages. Les domaines de l’enquête sont alors vastes. Ils concernent, toutes périodes historiques confondues, aussi bien des chantiers ouverts ou explorés par Foucault (folie et déraison, l’enfermement psychiatrique et carcéral, la pastorale, la sexualité, etc.) que des « outils » conceptuels et paradigmatiques (pratiques discursives, biopolitique, gouvernementalité, techniques de soi, régimes de vérité, objectivisation du sujet, etc.) ou encore des questionnements historiographiques et épistémologiques (archéologie et généalogie, césure et continuité, etc.).
Dès lors, une histoire au présent conduit à « mettre le travail historique à l’épreuve d’une transformation des cadres conceptuels et théoriques ». Ce faisant, le passé devient un lieu de questionnement des problématisations du présent, non pas dans l’illusion que les leçons de l’histoire répondront aux interrogations du présent, encore moins dans l’idée qu’une permanence des structures permettrait d’établir un dialogue immédiat mais parce l’histoire singularise l’actualité. Le travail historique relève alors d’un exercice philosophique qui, en éprouvant le regard contemporain, lui donne les moyens de son propre affranchissement afin de penser autrement.
Programme et infos : http://gas.ehess.fr/document.php?id=252