Diane Salviati

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Diane Salviati
Conjoint(s) Forèse de Limeuil
Dénomination(s) Diane de Talcy
Biographie
Date de naissance Vers 1550
Date de décès Après 1575
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice de Gilbert Schrenck, 2005.

Diane, fille aînée de Jean Salviati et de Jaquette Le Malon de Bercy, appartient à la riche et influente famille des Salviati, originaires de Florence et rendus illustres par leurs diplomates, cardinaux et banquiers. Leurs liens de parenté avec Catherine de Médicis ajoutent à leur puissance. Diane naît dans les années 1550, sans doute dans le château de Talcy près de Beaugency, bel édifice du Moyen Âge acquis par son grand-père, Bernard Salviati, en 1517, et aménagé dans le pur style italien que célébrera Agrippa d'Aubigné dans Le Printemps. Ce domaine constitue le lieu privilégié de l'idylle qui se noue de 1571 à 1573 entre la belle châtelaine et l'écuyer du roi de Navarre, Agrippa d'Aubigné, qui vient en voisin depuis les Landes-Guinemer. Ces visites assidues valent à d'Aubigné de rencontrer Ronsard, dont il dit qu'il l'a connu «privement, ayant osé à l'age de vingt ans luy donner quelques pieces, et luy daigné me respondre. Nostre cognoissance redoubla sur ce que mes premiers amours s'attacherent à Diane de Talci, niece de Mademoiselle de Pré qui estoit sa Cassandre» («Lettres sur diverses sciences», dans OEuvres d'Agrippa d'Aubigné, éd. H. Weber, J. Bailbé et M. Soulié, Gallimard, «La Pléiade», 1969, p.860). Cet amour passionné, qui semble partagé, tourne cependant vite au cauchemar. Lors de la Saint-Barthélemy (août 1572), d'Aubigné, cruellement blessé au cours d'un attentat dans un village de Beauce, décide de «venir mourir entre les bras de sa maîtresse. La courvée de vingt deux lieues qu'il fit luy causa une fluxion de tout le sang, si bien qu'il demeura sans sentiment, sans veue et sans pous» durant deux jours (Sa vie à ses enfants, éd. Gilbert Schrenck, Paris, STFM, 1986, p.79-80); c'est durant cette agonie que le blessé aurait eu la vision desTragiques, ayant aperçu dans son délire «les beaux et secrets tableaux» de la future épopée des huguenots français. Par ailleurs, le projet de mariage, un instant envisagé par le père de Diane, échoue finalement en raison de la différence de religion entre les deux partis et de l'opposition très vive marquée par le sourcilleux François Salviati, chevalier de l'Ordre de Malte, oncle de Diane. Démuni de tous ses biens, d'Aubigné se heurte aussi à l'inégalité de fortune qui place hors de sa portée la riche héritière. Il n'est pas à exclure enfin que Diane ait été refroidie dans ses sentiments par cet amant excessif et emporté.

À la suite de cet échec, d'Aubigné traverse une profonde crise morale et tombe gravement malade. Durablement marqué par cette aventure de jeunesse, il portera toujours comme talisman, au milieu des combats, une tresse des cheveux de sa maîtresse, dont le souvenir provoque encore, après bien des années, la jalousie de sa femme Suzanne de Lezay. Il tire une maigre revanche sur son destin lorsqu'il revoit Diane quelques années plus tard à la Cour (vers 1575), à présent mariée à Forèse de Limeuil: «[C]este Damoiselle apprenant, et voyant à l'estime de la Cour les differences de ce qu'elle avoit perdu et de ce qu'elle possedoit, amassa une melancholie, dont elle tumba malade et n'eut santé jusqu'à la mort» (Sa vie à ses enfans, éd. cit., p.88). Cette mort est intervenue après 1575. On ignore si Diane a eu des enfants de son mariage.

Diane de Talcy a eu une influence décisive sur A. d'Aubigné: «[C]et amour, écrit-il dans Sa vie à ses enfants, luy mit en teste la poesie françoise, et lors il composa ce que nous appelons son Printemps: où il y a plusieurs choses moins polies [que dans ses autres poésies], mais quelque fureur qui sera au gré de plusieurs» (éd. cit, p.75-76). C'est grâce à elle qu'il a rencontré Ronsard, auquel il se mesure dans son canzoniere, en évoquant avec originalité l'histoire de sa passion fatale. Le personnage de Diane, initiatrice amoureuse et Muse féconde, amante à la fois tentatrice et inaccessible, se retrouve tout entier dans ce recueil au lyrisme âpre. Dans un décor à la fois familier et ponctué par des moments de grande proximité, le poète livre une vision hallucinée de ses amours, où le réalisme le plus cru se mêle au pétrarquisme le plus raffiné. Sous un déluge d'hyperboles, d'antithèses et de métaphores sanguinaires, d'Aubigné célèbre son Eros baroque et élève l'image de la dame désespérément aimée au rang du mythe de la déesse Diane chasseresse.

Quant à la vraie Diane, elle n'a pas suscité, jusqu'ici, de recherches particulières.

Choix bibliographique

- Aubigné, Agrippa d', Le Printemps, in OEuvres, éd. H. Weber, J. Bailbé et M. Soulié, Paris, Gallimard «La Pléiade», 1969.
- Lazard, Madeleine, Agrippa d'Aubigné, Paris, Fayard, 1998, chapitre II.
- Mathieu-Castellani, Gisèle, «La figure mythique de Diane dans l'Hécatombe d'Aubigné», Revue d'Histoire Littéraire de la France, 1978, p.3-18.
- Schrenck, Gilbert, Agrippa d'Aubigné. Bibliographie des écrivains français, Paris, Memini, 2001; voir sous la rubrique Le Printemps.

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