Renée de France
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Renée de France | ||
Titre(s) | Duchesse de Ferrare | |
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Conjoint(s) | Hercule d'Este, duc de Ferrare | |
Biographie | ||
Date de naissance | 25 octobre 1510 | |
Date de décès | 12 juin 1575 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) | ||
Dictionnaire Fortunée Briquet (1804) | ||
Dictionnaire Philibert Riballier et Catherine Cosson (1779) |
Sommaire
Notice de Caroline zum Kolk, 2003.
Renée de France est la fille cadette de Louis XII et d'Anne de Bretagne. Orpheline en 1515, elle grandit avec les enfants de sa soeur Claude qui a épousé François Ier en 1514. Adolescente, elle intègre l'entourage de Marguerite d'Angoulême où elle rencontre les cercles humanistes et les adeptes de la pré-réforme. François Ier arrange son mariage avec Hercule d'Este, fils aîné du duc de Ferrare. Cette union scelle l'entrée du duché dans la ligue de Cognac, unissant la France, la papauté et plusieurs principautés contre Charles Quint. Le mariage est célébré le 28 juin 1528.
Renée s'installe à Ferrare dans un des foyers les plus brillants de la Renaissance, entourée d'artistes et poètes (Ludovic Arioste, Vittoria Colonna, Olympia Morata...). De son mariage naîtront cinq enfants, Anne (1531-1607), Alphonse (1533-1597), Lucrèce (1535-1598), Léonore (1537-1581) et Louis (1538-1586).
Très rapidement des dissensions surgissent au sein du couple, surtout dues à la situation politique très tendue. En 1529, la paix des Dames met fin à l'alliance franco-ferraraise. Renée oeuvre malgré tout pour les intérêts de la France, ce qui met son époux dans une situation délicate face à ses suzerains, le pape et l'empereur. Elle aide financièrement les troupes royales en Italie, accueille les envoyés du roi, surveille des missions, fournit des renseignements. Elle soutient aussi ses fils qui passent au service du roi de France contre la volonté de leur père. Hercule d'Este tente de limiter les activités pro-françaises de son épouse et renvoie régulièrement des serviteurs français, restrictions qui provoquent des crises diplomatiques entre les deux pays et une vive indignation à la cour de France. Le lien n'est néanmoins jamais rompu; en 1548 notamment, Anne d'Este épouse François de Lorraine, duc de Guise.
L'attachement de Renée de France à la Réforme est une autre source de conflits. La duchesse fait de Ferrare le centre réformé le plus important d'Italie. Après une première prise de contact avec les réformateurs, dans les années 1530, la duchesse commence dans les années 1540 une vaste correspondance avec Calvin, Bullinger et d'autres protestants; elle cesse d'assister à la messe. Le duc, tolérant en matière religieuse, refuse d'intervenir malgré les pressions exercées par ses suzerains. Lors des grandes crises politiques, toutefois, il prend des mesures répressives, comme en 1536 ou en 1554, où Renée fait l'objet de poursuites. Le 6.9.1554, en accord avec Henri II, Hercule traduit Renée devant un tribunal de l'Inquisition qui la condamne à la prison perpétuelle. Mais le duc n'exécute pas la sentence et Renée reprend ses habitudes calvinistes, jusqu'à la mort de son époux, le 3 octobre 1559.
Le 2 septembre 1560, Renée quitte le duché et s'installe en France, dans son douaire de Montargis. Elle engage alors une procédure juridique à l'encontre de la couronne, pour récupérer au moins partiellement son héritage paternel et maternel, procès qui l'occupe dix ans sans donner les résultats escomptés. Vivant selon l'esprit de la Réforme, elle se garde de tout fanatisme. Ses contacts avec les protestants et sa parenté avec les Guise font d'elle une négociatrice recherchée. Pendant les guerres de religion, elle fait de sa ville un refuge, accueillant entre autres la famille de Michel de L'Hôpital, Agrippa d'Aubigné et Jacques Androuet du Cerceau. N'hésitant pas à désobéir aux ordres royaux, elle refuse en 1563 et en 1566 de livrer «ses» réfugiés à l'armée royale, ce qu'elle ne peut empêcher en 1569: elle voit sous ses yeux tuer hommes, femmes et enfants. Renée assiste aussi au massacre de la Saint-Barthélemy, auquel elle survit grâce à sa fille Anne, qui l'abrite à l'hôtel de Nemours. Elle reste fidèle jusqu'à sa mort aux préceptes de la Réforme.
Un grand nombre d'articles et de biographies lui ont été consacrés par les historiens du protestantisme. Elle y est dépeinte comme une héroïne de la Réforme, persécutée par sa famille catholique, tandis que d'autres auteurs lui reprochent les liens qu'elle entretenait avec les Guise et son «manque de fermeté». La tolérance de Renée à l'égard des catholiques appelle assurément des analyses moins simples. L'engagement politique, culturel et social de la duchesse demeure quant à lui un champ de recherche encore peu exploré. Mais le statut royal de Renée de France, la liberté avec laquelle elle a défendu ses convictions et la particularité de son parcours continuent à susciter l'intérêt; en Italie et en France, des recherches prometteuses sont en cours.
Oeuvres
- Correspondance : inédite
Choix bibliographique
- Braun, Gabriel. «Le mariage de Renée de France avec Hercule d'Este: une inutile mésalliance». Histoire, Économie et Société, 7e année, tome 2, 1988, p.147-165.
- Fontana, Bartolomeo. Renata di Francia, duchessa di Ferrara. Rome, 1889-1899, 3 vol.
- Franceschini. Chiara. «La corte di Renata di Francia (1528-1560)». In Adriano Prosperi (dir.), Storia di Ferrara. Ferrare, Corbo Editore, 2000, vol.VI, p.185-214.
- Jenkins-Blaisdell, Charmarie. Royalty and Reform: the Predicament of Renée de France, 1510-1575. Tufts University, 1969, Medford, Massachusetts, thèse non publiée.
- Rodocanachi, Emmanuel-Pierre. Renée de France, duchesse de Ferrare. Une protectrice de la Réforme en Italie. Paris, Ollendorf, 1896.
Choix iconographique
- Clouet, Jean. Renée de France, duchesse de Ferrare (dessin). Musée Condé, Chantilly (Inv. MN 28).
- Anonyme. Les petites prières de Renée de France (enluminures; cinq images différentes), Paris, vers
1520. Modène, Biblioteca Estense, ms. a.U. 2.28, Lat. 614 (livre d'heures volé; facsimilé) -- http://www.finns-books.com/renee.htm
Jugements
- «Madame Renée [...] a estée aussi une fort bonne et habille Princesse; car elle avoit ung des bons espritz et des subtilz, qui estoit possible. Elle avoit fort estudié; et l'ay veue fort sçavante discourir fort hautement et gravement de toutes sciences, jusques à l'astrologie et la congnoissance des astres, dont je l'en vis ung jour entretenir la Reyne Mere [Catherine de Médicis], qui, l'oyant ainsi parler, dict que le plus grand philosophe du monde n'en sçauroit mieux parler» (Brantôme, Recueil des Dames, poésies et tombeaux, éd. Etienne Vaucheret, Paris, Gallimard, 1991, p.172).