Marguerite-Ursule-Fortunée Bernier : Différence entre versions

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Version actuelle en date du 11 mars 2013 à 17:13

Marguerite-Ursule-Fortunée Bernier
Conjoint(s) Hilaire-Alexandre Briquet
Dénomination(s) Fortunée Briquet
Biographie
Date de naissance 1782
Date de décès 1815
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice de Nicole Pellegrin, 2002

Née à Niort (Deux-Sèvres) le 16 juin 1782 dans un milieu de notaires aisés et bientôt républicains, Fortunée Bernier, future épouse Briquet, reçoit une "éducation libérale" qui lui donne et le goût de la littérature (française, italienne, anglaise et allemande) et celui des sciences naturelles et de l'histoire. À quinze ans, elle se marie à un homme de lettres, ancien vicaire de l'évêque constitutionnel de Poitiers devenu professeur à l'École centrale de Niort après sa déprêtrisation. C'est dans le cadre des conférences publiques de cette École et du périodique qui en publie les travaux, que paraissent les premières oeuvres de celle qu'on salue déjà comme "une enfant prodige": poésies de circonstance, dialogues, fables et calendriers républicains. Le premier de ceux-ci attribue à chaque jour de l'an VII le nom d'une plante accompagnée de ses caractéristiques linnéennes, le second en l'an VIII est placé sous le patronage des "Femmes célèbres par leurs écrits", le troisième enfin sous celui des "Femmes artistes" (et mécènes).

À Paris, reçue dans le salon de la poétesse Fanny de Beauharnais et à la Société des Belles Lettres où elle lit son Ode en l'honneur des vertus civiles, elle est saluée dès l'an IX (1800) comme une "jeune Muse, modeste et aimable", son portrait est gravé par Gaucher et elle entre en relations avec des célébrités du monde des lettres et des sciences. Ses Odes (à Dolomieu le minéralogiste, à Écouchard-Lebrun le poète, etc.) sont publiées en brochures séparées, ainsi que dans divers périodiques (le Nouvel Almanach des Muses, la Décade et la Bibliothèque Française) où elle publie aussi des comptes rendus d'ouvrages, des poésies fugitives et des études (sur Klopstock, Duboccage, etc.). Une activité à la fois lyrique, scientifique et journalistique qu'elle poursuit quelque temps dans la presse niortaise, de 1804 à son divorce (1808). Elle meurt à Niort le 14 mai 1815.

Son principal titre de gloire reste son Dictionnaire historique, bibliographique et littéraire des Françaises et des étrangères naturalisées en France, connues par leurs écrits, ou par la protection qu'elles ont accordée aux gens de Lettres, depuis l'établissement de la Monarchie jusqu'à nos jour,publié en 1804. Héritier du De Claribus Mulieribus de Boccace et autres galeries (peintes ou écrites) de femmes illustres, cet ouvrage dérive plus encore des dictionnaires littéraires qui se multiplient au XVIIIe siècle dans toute l'Europe et dont les compilations de l'Anglais Ballard, de l'abbé Joseph de La Porte et de Louise de Keralio sont les exemples les plus fameux. Ce monument d'érudition féministe (mais dédié à deux figures masculines qui ne le sont guère: Rousseau et Bonaparte) n'en reste pas moins original par son ampleur et par son souci de n'oublier aucune des activités qui lient depuis toujours les femmes au monde des lettres: mécénat, salons, relations épistolaires, travail éditorial, traductions, fictionnalisations variées, et qui s'ajoutent à des publications, souvent ignorées, en matière de pédagogie, journalisme, sciences, histoire, spiritualité ou philosophie. C'est ainsi que sont énumérées par Fortunée Briquet près de six cents femmes, depuis Radegonde au VIe siècle (sainte, reine, écrivaine et victime), jusqu'à ses amies les plus proches, qu'elles soient ou non encore vivantes: les dames Beauharnais, Du Boccage, Pipelet, Staël, Viot, etc. Chacune, quand cela est possible, a droit à une notice bio-bibliographique où figurent parfois des extraits d'oeuvres, éventuellement restées manuscrites. Le style de l'ouvrage est sobre et élégant et l'ampleur du savoir qui s'y déploie, surprend d'autant plus que la mémoire de ce travail et de son auteure a été perdue jusqu'aux redécouvertes liées aux célébrations locales du Bicentenaire de la Révolution.

Oeuvres

- 1801 : Ode sur les vertus civiles, Paris, Pougens.
- 1802 : Ode sur la mort de Dolomieu, Précédée d'une notice sur ce Naturaliste (...), Paris, Pougens.
- 1803 : Ode à Lebrun, Paris, Pougens.
- 1804 : Ode qui a concouru pour le prix de poésie (dédiée à Pougens), Paris, Pougens.
- 1804 : Dictionnaire historique, bibliographique et littéraire des Françaises et des étrangères naturalisées en France, connues par leurs écrits, ou par la protection qu'elles ont accordée aux gens de Lettres, depuis l'établissement de la Monarchie jusqu'à nos jours,Paris, Treutell & Würtz.
- 1806 : Élégies imitées de Milady Montague, Niort, Dépierris.

Choix bibliographique

- H.-A. Briquet, Histoire de la Ville de Niort, Niort, Robin, 1832, pp. 52-58 (notice illustrée par son fils, Apollin).
- H. Plick, "Fortunée Briquet, 1782-1815", in H. Clouzot, Portraits à la plume, Niort, L. Clouzot, 1891, p.1-7.
- N. Pellegrin, "Entre local et international, botanique, poésie et féminisme: Fortunée Briquet (Niort, 1782-1815)", Les Apports de l'histoire des provinces à l'histoire nationale, Versailles, UFUTA, 1995, p.97-110.
- C. Hesse, The Other Enlightenment. How French Women Became Modern, Princeton, Princeton U. P., 2001, passim.
- N. Pellegrin, "Le Dictionnaire de Fortunée Briquet (1804) : fabrication et postérité d'une histoire littéraire au féminin", in Martine Reid (dir.), Les femmes dans la critique et l'histoire littéraire, Paris, Champion, 2011, pp. 101-120.

Choix iconographique

- Gaucher. Portrait (gravure) -- frontispice du Nouvel Almanach des Muses(1803), no2, et du Dictionnaire.

Jugements

- "une femme savante qui accumule les exemples les plus illustres pour faire accepter le petit bout de bas bleu... foncé, qui dépasse sous sa tunique à l'antique. [...] O petites femmes, laissez à l'homme le travail inquiet de la pensée" (H. Plick, "Fortunée Briquet, 1782-1815", in H. Clouzot, Portraits à la plume, Niort, L. Clouzot, 1891, p.5).

- (à propos du Dictionnaire) "travail superficiel mais utilisable" (Roman d'Amat,Dictionnaire de biographie française, Paris, Letouzey, t.7, 1956, p.343).

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