Anne Picardet : Différence entre versions
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Version du 2 juin 2011 à 13:41
Anne Picardet | ||
Titre(s) | Dame de Moulières et d'Essartines | |
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Conjoint(s) | François Forget, sieur de Moulières (ou Molière) et d'Essartines | |
Biographie | ||
Date de naissance | Vers 1580 | |
Date de décès | Après 1632 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) | ||
Dictionnaire Fortunée Briquet (1804) | ||
Dictionnaire Philibert Riballier et Catherine Cosson (1779) |
Notice de Antoinette Gimaret, 2009
Anne Picardet, née dans la seconde moitié du XVIe siècle, est morte dans la première moitié du siècle suivant. Son père, Gaspard Picardet, est conseiller du roi en la chambre de Bourgogne; son frère, Hugues Picardet, est également un parlementaire réputé. Elle épouse en mai 1599 François Forget, sieur de Moulières (ou Molière) et d'Essartines (ou Essertines). Né François Molière, deuxième du nom, il a pris la particule peu après l’acquisition par sa famille du domaine d’Essartines, dans le Brionnais, à la fin du XVIe siècle. Il la laisse veuve en 1612, mère d’un garçon qui sera connu sous le nom de François-Hugues de Molière (1599-1624), libertin ami de Théophile de Viau et de Saint-Amant, auteur de quelques pièces et d’un roman pastoral fortement inspiré de l’Astrée (La Polyxène,1623). Le reste de son parcours biographique est ignoré.
Poétesse d’inspiration religieuse distinguée à la fois par ses vertus et par son grand talent d’écriture, Anne Picardet s’inscrit dans le mouvement de conversion des muses profanes en muses sacrées, que certains poètes chrétiens ont encouragé dès la fin du XVIe siècle. Son unique recueil, les Odes spirituelles, publié en 1618, est dédié à Madame Le Grand. Selon Du Mesnil (p.32), il s’agirait de la mère d’Henri le Grand, sieur de Belleville, né en 1587, devenu au début du siècle un comédien fameux sous le nom de Belleville ou encore Turlupin. Anne Picardet l’avait fréquentée avant son mariage lors de séjours parisiens. L’attachement à cette femme pourrait s’expliquer par le fait qu’elle partage un même sort: réputée pour son immense «piété» (Dédicace), elle est cependant la mère d’un homme de théâtre, condamné de fait par l'Église. La publication du recueil serait l’affirmation, par la poétesse, de sa religiosité, en réaction aux écritures profanes de son fils. Elle déclare dans la Dédicace vouloir faire que «l’air des chansons profanes estant appliqué aux spirituelles, Dieu ne soit plus offensé par les voix et organes que sa divine bonté nous a donnez pour le louer et le bénir». Le principe de l’œuvre est de proposer des textes d’inspiration spirituelle (sur la Passion, les martyrs, les saints et les anges, les congrégations religieuses nouvelles) «sur l’air» de chansons profanes connues du public. Il s’agit d’une oeuvre typique de la littérature de la Contre-Réforme, marquée par le désir de convertir des formes musicales profanes en supports dévotionnels. Par ailleurs, l’oeuvre d’Anne Picardet se veut le fruit de son repentir et de sa conversion, manifestés dans le désir de ne consacrer sa plume et sa voix qu’à la dévotion au Christ. La thématique de la Passion est donc centrale. Elle suscite dans le recueil un foisonnement métaphorique emprunté pour une grande part au lyrisme amoureux du Cantique des Cantiques (dialogue entre Dieu et l’âme, entre le Christ amant et la poétesse, entre le Christ et Marie-Madeleine, l’amante biblique, etc.).
Ce recueil a été réédité en 1619 à Paris, chez S. Huré, preuve d’un certain écho dans la capitale, sans doute dans les milieux dévots. Il a ensuite fait l’objet d’une édition revue et augmentée, dans laquelle elle supprime les pièces d’inspiration plus personnelle (en particulier des sonnets évoquant son mari défunt et les tristesses du veuvage) au profit de poèmes célébrant les fondateurs de grands ordres religieux (Ignace de Loyola, François d’Assise, Thérèse d’Avila…) et la victoire éclatante de l'Église catholique contre les hérésies. Cette deuxième édition, qui inscrit encore plus fortement la poétesse dans le courant tridentin, est publiée à Lyon en 1623, ce qui laisse penser qu’Anne Picardet est alors toujours vivante. Du Mesnil, se basant sur un certain nombre de documents notariés, situe d’ailleurs sa mort après 1632.
Sa production poétique, passée de mode dès la seconde moitié du XVIIe siècle, ne sombre cependant pas complètement dans l’oubli. Elle est citée dans plusieurs dictionnaires de femmes célèbres, notamment ceux de Cosson et Riballier (1779) et de Briquet (1804). Son œuvre reste néanmoins très largement ignorée, contrairement à celles de Gabrielle de Coignard ou d’Anne de Marquets. Elle ne bénéficie toujours pas d’une édition critique.
Oeuvres
- 1618 : Odes spirituelles sur l’air des chansons de ce temps,Lyon, Claude Morillon.
- 1623 : Odes spirituelles sur l’air des chansons de ce temps. Lyon, Veuve Claude Morillon (édition revue et augmentée).
Choix bibliographique
- Brémond, Henri, Histoire littéraire du sentiment religieux en France,éd. François Trémolières, Grenoble, Millon, 2006.
- Cave, Terence, Devotional Poetry in France, c.1570-1613,Cambridge, Cambridge University Press, 1969.
- Clément, Michèle, Une Poétique de crise, poètes baroques et mystiques, 1570-1660,Paris, Champion, 1996.
- Du Mesnil, E., François de Molière Seigneur d'Essertines, Anne Picardet sa femme, et leur famille. D'après les documents authentiques,Charolles, Lamboroy, 1888.
- Packer, Dorothy S., «Collections of Chaste Chansons for the Devout Home (1613-1633)», Acta Musicologia, 61/2, 1989, p.175-216 -- [1]