Tapisserie et arts textiles. Représentations des gestes et processus de création du XVIIIe au XXIe siècle 
Aubusson (jeudi 16 novembre 2017), avant le 28 février 2017

Journées d’études – CELIS

Cité internationale de la tapisserie et de l’art tissé d’Aubusson

Journée d’étude organisée avec le CHEC

Les historiens de l’art recherchent constamment les sources littéraires des tapisseries [1]. De la période moderne jusqu’au XXIe siècle, la tapisserie occidentale relève en effet de la peinture d’histoire : ses sources littéraires se trouvent dans la mythologie, l’histoire sainte, l’histoire antique ou contemporaine, ou encore la Fable [2]. À toutes les époques, les tapisseries permettent la représentation de mythes ou de récits, mais aussi de figures emblématiques de la création littéraire, comme le poète Orphée, ou de la création tapissière, comme Arachné.Les littéraires s’intéressent eux au motif de la tapisserie et plus largement à l’art textile tels qu’ils apparaissent en poésie ou dans les œuvres romanesques [3], ou encore aux récits mythologiques utilisant le tissage et la tapisserie comme métaphores du lien politique, conjugal et poétique [4]. La littérature des XVIIIe et XIXe siècles fait de plus de la tapisserie un ressort narratif ou l’occasion d’une irruption du fantastique. Enfin, le genre poétique de la tapisserie réapparaît au début du XXe siècle, conjuguant ekphrasis et régularité métrique [5].Si ces rapports de la tapisserie avec la narration ont été récemment étudiés [6], il n’en va pas de même des questions de fabrication.La littérature s’intéresse pourtant au processus créatif ou à la production technique. Ainsi, depuis les chansons de toile, étudiées par les philologues [7], jusqu’aux chants des paysans ou des ouvriers du textile au XIXe siècle analysés par des ethnologues [8], de nombreux textes chantés évoquent la façon ou le travail du geste dans ce domaine. Les récits de voyage de la période XVIIIe-XIXe siècles peuvent aussi contenir d’intéressantes descriptions de ce type d’activités, de même que les textes des folkloristes. La littérature romanesque ou poétique, met en scène l’élaboration de pièces textiles en lui conférant une valeur symbolique ou psychologique [9]. Les gravures et illustrations – dans les ouvrages de vulgarisation ou de fiction – sont également nombreuses à reprendre ce motif ; qu’on songe aux planches de l’Encyclopédie illustrant l’article « Tapisserie » [10].Les arts visuels ne sont pas en reste et les ateliers des Gobelins sont souvent représentés, jusque sur les assiettes de porcelaine de Sèvres du Service des arts industriels. La peinture met ainsi à l’honneur le travail industriel, artisanal et/ou domestique du tissu (chez Van Gogh ou Lieberman pour le tissage, Camoin pour la tapisserie, Kersting pour la broderie, Henri Martin pour la couture, etc.). Le cinéma enfin, documentaire ou de fiction, propose lui aussi de nombreuses représentations des métiers textiles, qu’on évoque Brodeuses (Éléonore Faucher, 2004), ou les nombreux reportages dans les ateliers d’Aubusson conservés par l’Institut National de l’Audiovisuel.Une question se pose à propos de toutes ces représentations : que disent-elles de la réalité ? Si l’on peut attendre a priori de l’Encyclopédie l’objectivité du détail exigée par la volonté de diffusion des savoirs chère aux Lumières, qu’en est-il de la littérature et des arts visuels ? Les choix de cadrage ou de description ne privilégient-ils pas des gestes esthétiques aux dépens d’autres qui le seraient moins ? Plus largement, quel est l’enjeu idéologique et symbolique de ces représentations ?C’est pour répondre à cette interrogation, et donc avec une visée pluridisciplinaire, que deux journées d’étude convieront historiens de l’art, littéraires et ethnologues, à analyser les représentations des gestes et techniques de la tapisserie et des arts textiles. La première de ces deux manifestations, construites en partenariat avec la Cité internationale de la tapisserie et de l’art tissé d’Aubusson, aura lieu dans l’amphithéâtre du Musée, à Aubusson, le jeudi 16 novembre 2017, et sera consacrée à la période XVIIIe – XXIe siècles. Elle s’inscrit dans les travaux de l’axe 2 du CHEC (« Processus des créations, usages et langages des arts »), dans l’axe 4 de l’équipe « Lumières et Romantismes », « Monde des objets », et dans l’axe « Sociopoétique du textile » de l’équipe « Ecritures et interactions sociales » du CELIS. Une seconde journée d’étude, couvrant la période antiquité-XVIIe siècle, sera organisée en 2018 et fera l’objet d’un second appel à communication.Les propositions de communications (300 mots environ) pour la journée d’étude « Tapisserie et arts textiles. Représentations des gestes et processus de création du XVIIIe au XXIe siècle », sont à envoyer accompagnées d’une biobibliographie (5 lignes maximum) avant le 28 février 2017 à : celine.bricault@univ-bpclermont.fr et j-francois.luneau@univ-bpclermont.fr

Responsable(s) Celis :  Céline Bricault Équipe(s) de Recherche concernée(s) :  Lumières et romantismes
 
[1] Entre mille exemples, voir Poésie, roman et tapisserie, XIV-XVIIIe siècle, [cat. exp.], Martine MATHIAS dir., Aubusson, Centre culturel et artistique, 1984, et Isaac Moillon (1614-1673), un peintre du roi à Aubusson [cat. exp.], Nicole de REYNIES et Sylvain LAVEISSIERE dir., Paris, Somogy, et Aubusson, Musée départemental de la tapisserie, 2005, 335 p.[2] Pour le tournant des XVIIe et XVIIIe siècles, voir Pascal-François BERTRAND, La Peinture tissée. Théorie de l’art et tapisseries des Gobelins sous Louis XIV, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015, 164 p.[3] Un inventaire de ces figures a été dressé par Alain MONTANDON, « Figures dans la tapisserie », Romanistische Zeitschrift für Literaturgeschichte/Cahiers d’Histoire des Littératures Romanes, 36e année, 3/4, 2012, p. 271-284.[4] John SCHEID, Jesper SVENBRO, Le métier de Zeus. Mythe du tissage et du tissu dans le monde gréco-romain, nouv. éd., Paris, Éd. Errance, 2003, 160 p. (1re éd., Paris, Éd. la Découverte, 1994), Françoise FRONTISI-DUCROUX, Ouvrages de Dames, Ariane, Hélène, Pénélope…, Paris, Seuil, « La Librairie du XXIe siècle », 2009, 191 p., ou Sylvie BALLESTRA-PUECH, Les Parques, essai sur les figures féminines du destin dans la littérature occidentale, Toulouse, Ed. Universitaires du SUD, 1999.[5] Alessandra MARANGONI, « Le genre de la tapisserie, Jarry, Péguy et leurs devanciers », Poétique, n°177, 2015/1, p. 43 à 56. Repéré à : http://www.cairn.info/revue-poetiqu…[6] Françoise MICHAUD-FREJAVILLE dir., Tapisserie et broderies, relecture des mythes antiques et iconographie chrétienne. Actes du colloque d’Angers, Le Blanc, Rencontres avec le patrimoine religieux, 2009. En 2012, un colloque international dirigé par Pascal-François BERTRAND et réuni à l’INHA a également abordé cette question : Tapisserie et Récit. De l’Apocalypse d’Angers à Alechinsky.[7] Les Chansons de toile, présentées et annotées par Michel ZINK, Paris, Honoré Champion, 1977, 184 p.[8] À titre d’exemple, voir Laurent MARTY, Chanter pour survivre. Culture ouvrière, travail et techniques dans le textile, Roubaix 1850-1914, Lille, Atelier ethno-histoire et culture ouvrière, fédération Léo Lagrange, 1982, 293 p. ou David HOPKIN, Voices of the People in Nineteenth-Century France, Cambridge, Cambridge University Press, 2012, 310 p.[9] Voir Jules BARBEY D’AUREVILLY, Le Chevalier des Touches, Une histoire sans nom.[10] Voir le 8e volume de planches, « Tapisserie », « Tapis de Turquie », « Tapisserie de hante lisse » « Tapisserie de basse lisse » dans L’Encyclopédie. Repéré à : https://fr.wikisource.org/wiki/Plan…