De Monaco à Chantilly, une princesse des Lumières en quête de liberté
Commissariat : Mathieu Deldicque, Thomas Fouilleron
Château de Chantilly, 19 oct. 2025 – 4 janv. 2026
Après le destin romantique de Louise d’Orléans, première reine des Belges, en 2024, le musée Condé explore le parcours et le rôle de mécène des arts d’une autre figure féminine méconnue qui a marqué son histoire : Marie Catherine de Brignole-Sale, princesse de Monaco puis de Condé (1738-1813). Grâce à un partenariat ambitieux noué avec le palais princier de Monaco, une exposition inédite, fruit d’un projet de recherche croisé entre les archives du palais princier et celles du musée Condé, dévoile la vie romanesque et la commande artistique d’une figure hors du commun, entre siècle des Lumières et Révolution.
La princesse venue de la mer
Née à Gênes le 16 septembre 1738, fille unique du marquis de Brignole-Sale et nièce de doge, Marie Catherine est issue de l’une des plus puissantes familles de cette influente république méditerranéenne. Élevée à Paris, celle qu’on qualifie de « plus jolie femme de France » est remarquée par le prince Honoré III de Monaco (1720-1795), plus âgé qu’elle et qui, bien qu’ayant espéré une alliance plus prestigieuse dans la noblesse française, s’est résolu à envisager un parti moins noble mais plus lucratif. Après les noces fastueuses du 15 juin 1757 où s’expriment bien des crispations protocolaires, la nouvelle et jeune princesse de Monaco répond aux attentes qu’elle a suscitées en donnant naissance à deux petits princes. Elle fréquente les salons parisiens et tient son rang au sein de l’hôtel de Matignon, résidence du couple princier à Paris. Les collections du palais princier de Monaco permettront de revivre les fastes monégasques et d’admirer, en autres, des portraits dynastiques qui quittent de manière exceptionnelle les murs du palais.
L’AMOUR ET L’AMITIÉ : LA PRINCESSE DE MONACO ET LE PRINCE DE CONDÉ
Dès lors, celle qui demeure malgré tout une princesse de Monaco s’émancipe. Cette lectrice des philosophes des Lumières existe en son nom propre et peut vivre librement ses passions, aux côtés de son cher ami, Louis Joseph de Bourbon, prince de Condé (1736-1818), qu’elle ne quitte désormais plus. À Paris, près du palais Bourbon que le prince agrandit à grands frais, où l’amour jaillit du moindre décor et du moindre kiosque, Alexandre Brongniart érige pour la princesse un hôtel de Monaco au cours des années 1770, une résidence détruite à la Révolution, puis reconstruite et abritant depuis 1937 l’ambassade de Pologne. Les plans monumentaux d’Alexandre Brongniart restitueront l’ambition d’une princesse bâtisseuse et évoqueront ses intérieurs.
LE REFUGE DE BETZ D’UNE FEMME DES LUMIÈRES
Non loin de Chantilly mais à une certaine distance tout de même, Marie Catherine élit le château de Betz (commune actuelle de Crépy-en-Valois dans l’Oise) comme ultime refuge et expression de ses préférences personnelles. Là, en miroir de ce que le prince de Condé, encouragé par la princesse de Monaco, imagine au palais Bourbon ou à Chantilly, elle est la promotrice d’un goût nouveau, rousseauiste, celui du retour à la nature, des jardins à la mode anglaise, ne négligeant néanmoins pas les derniers feux d’un exotisme asiatisant, tout en accompagnant les prémices de l’esthétique néo médiévale promise à un brillant avenir. Autour d’elle, autour d’eux, gravitent architectes, sculpteurs, paysagistes, peintres ou dessinateurs parmi les plus novateurs et talentueux des derniers feux de l’Ancien régime. D’un temple de l’Amitié à l’autre, les sentiments que ce couple de princes esthètes partagent sont immortalisés dans la pierre, le marbre ou le plâtre, grâce à Jean Baptiste Pigalle ou Claude Dejoux. Le grand Hubert Robert, dessinateur, peintre et concepteur de jardins, est au service de la princesse. De superbes feuilles de sa production viendront illustrer l’esthétique novatrice que Marie Catherine déploie dans ses jardins de Betz : le style néogothique
L’ÉMIGRÉE MONACO EN RÉVOLUTION
La Révolution française frappe la princesse de Monaco et le prince de Condé de plein fouet. L’implacable prince du sang prend rapidement la tête de l’une des principales armées de la contre-révolution et la princesse de Monaco le suit sur les routes d’une émigration ballottée dans l’Europe entière, de l’Italie jusqu’en Russie. L’exposition permettra de suivre l’épopée romanesque d’un couple en révolution, entre désespoir et sens de l’honneur.
PRINCESSE DE CONDÉ, ENFIN
Les épreuves ne cessent vraiment qu’à la faveur des dernières années en Angleterre (1801-1813), où, enfin, la princesse de Monaco désormais veuve peut épouser son éternel amant et devenir, enfin, princesse de Condé, avant de rendre son dernier souffle en 1813, à Wimbledon, sans avoir eu l’occasion de retrouver la France. L’émouvant contrat de mariage d’un couple âgé de plus de 70 ans, éloigné de sa patrie, vient clore cette première manifestation monographique dédiée à la princesse de Monaco. Elle vise à redonner sa place à cette grande mécène, mieux cerner son rôle dans le domaine des arts, et ressusciter ses hôtels, parcs et châteaux grâce à des sculptures, tableaux, dessins, gravures et documents d’archives inédits.
Une exposition soutenue
Cette exposition est sous le Haut Patronage de S.A.S le prince Albert II de Monaco. Découvrez la visite de l’exposition sur YouTube.
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