Université de Tours
jeudi 18, vendredi 19 et samedi 20 octobre 2018
I. PRÉSENTATION
L’unité de recherche « Interactions culturelles et discursives » (ICD EA 6297), à l’université de Tours, s’engage dans un nouveau programme intitulé « Libertés » à partir de 2018, année qui coïncide avec le 170e anniversaire de l’abolition de l’esclavage en France grâce à l’action de Victor Schœlcher (décret du 27 avril1848), ainsi qu’avec le bicentenaire de la naissance de l’abolitionniste américain Frederick Douglass. À cette occasion, elle organise un colloque sur le thème « Esclavages et antiesclavagismes », au croisement de diverses disciplines : philosophie, histoire, littérature et arts, études culturelles. On s’en tiendra à l’institution de l’esclavage et à la condition de l’esclave comme être possédé par un maître, comme objet d’acquisition, de vente ou de cession, sans élargissement métaphorique aux notions d’esclavage moral et de servitude volontaire, ou d’exploitation de l’homme par l’homme. On examinera différents systèmes esclavagistes dans le temps et dans l’espace. Les périodes concernées sont les suivantes : Antiquité gréco-romaine et Moyen Âge, modernité et époque contemporaine ; les aires géographiques : pourtour méditerranéen et monde arabo-musulman, Afrique et Amériques.
Un premier axe d’étude regroupera les considérations théoriques et les discours idéologiques : définitions de l’esclavage (et distinction ou équation avec le servage, ou aux Amériques les serviteurs sous contrat), justifications esclavagistes (sociales, économiques, religieuses, raciales, pseudo-scientifiques) et argumentations antiesclavagistes (parfois ambiguës). Quelles anthropologies, explicites ou implicites, sous-tendent les discours de légitimation ? Quels sont les référents philosophiques, religieux (« Controverse de Valladolid ») et éthiques de la critique de l’esclavage ? On fera la part des aménagements « humanistes » du système esclavagiste, et d’une véritable remise en cause de ce système. On pourra analyser la manière dont l’esclavage antique a été interprété et utilisé par les défenseurs de l’esclavagisme comme par les abolitionnistes (voir l’exemple d’Henri Wallon). On s’intéressera précisément aux apports et aux limites des dénonciations de la traite négrière et de l’esclavage à l’époque des Lumières (textes de Montesquieu, de Voltaire et de Diderot – intégrés dans L’Histoire des Deux Indes de Raynal –, de Lescallier, de l’abbé Grégoire et de l’abbé Sibire, d’Olympe de Gouges, de Pierre-Gaspard Chaumette…) ; fondation, fonctionnement et production de la Société des Amis des Noirs (textes de Condorcet, descriptions des navires négriers, réponses à Malouet et au lobby colonial, adresses pour l’abolition, textes de Brissot et de Petion, procès du Code noir, textes de Clavière). On portera une attention particulière à l’écriture de témoignage sur l’esclavage – journaux de voyageurs et mémoires qui constituent un « patrimoine franco-américain ». On pourra mesurer aussi le rôle des autobiographies et récits d’esclaves (slave narratives) dans les écrits abolitionnistes (Ukawsaw Gronniosaw, Ottobah Cugoano, Frederick Douglass, Harriet Jacobs…).
Sur un deuxième axe, on étudiera les réalités historiques : du trafic méditerranéen à la traite négrière ; les révoltes d’esclaves et leurs grandes figures (Spartacus, Toussaint Louverture, Nat Turner, Hymne des citoyens de couleur) ; la dynamique de la Révolution française aboutissant au décret de 1794 (voir l’action de Sonthonax et Polverel à Saint-Domingue) avant le rétablissement de l’esclavage par Bonaparte, et la longue occultation de cette première abolition ; les formes de communication entre esclaves caribéens et « continentaux », en particulier lors de la guerre d’indépendance en Haïti ; le marronnage sur le continent américain (Guyane mais aussi Great Dismal Swamp, en Caroline du Nord, où sont conduites actuellement des fouilles archéologiques) ; les solidarités entre Noirs libres et esclaves, entre nations indiennes et marrons ; les Noirs à la tête de plantations et même propriétaires d’esclaves.
Une troisième orientation concernera les diverses représentations de l’esclave et de l’esclavage : iconographie, théâtre (du xviiie siècle notamment), roman (Bug-Jargal de Victor Hugo, Atar Gull d’Eugène Sue, Beloved de Toni Morrison…), petit et grand écran, publicité – ainsi que dans les visites organisées de plantations ; le Minstrel show et sa place dans l’imaginaire américain, du xixe au xxie siècle ; ambiguïtés des représentations de l’esclave (généralement masculines aux États-Unis) par les mouvements abolitionnistes dans leur propagande.
Une quatrième direction portera sur la question du genre (gender) : par exemple, sur la place faite, dans les écrits abolitionnistes et pro-esclavage ainsi que dans les ouvrages d’historiens, à l’esclavage sexuel des femmes ; la coutume du plaçage à la Nouvelle-Orléans et ses représentations dans la culture populaire ; l’interdit et le déshonneur qui pèse sur l’union entre femmes libres et esclaves masculins (de l’Antiquité romaine à l’Amérique esclavagiste, cf. Martha Hodes, White Women, Black Men, et Mandingo de Kyle Onstott).
En cinquième axe, un prolongement sera envisagé sur les réalités contemporaines de l’esclavage.
Enfin, une table ronde sur la question des réparations (du point de vue historique et actuel), sera animée par Louis-Georges Tin, président du CRAN.
Comité d’organisation
Cécile Coquet-Mokoko, Élisabeth Gavoille, Alfredo Gomez-Muller, Jean-Jacques Tatin-Gourier, Mónica Zapata.
Comité scientifique international
– Mohamed Aït Rami (PR littérature francophone, Université Chouaïb Doukkali d’El Jadida, Maroc)
– Cécile Coquet-Mokoko (MCF études africaines-américaines, Université de Tours)
– Élisabeth Gavoille (MCF HDR littérature et histoire des idées à Rome, Université de Tours)
– Alfredo Gomez-Muller (PR philosophie hispano-américaine xixe-xxie siècles, Université de Tours)
– Hélène Le Dantec-Lowry (PR histoire et civilisation américaines xixe-xxie siècles, Université Sorbonne Nouvelle-Paris 3)
– Mohamed Lehdahda (PR littérature et histoire des idées françaises, Université Moulay Ismaïl de Meknès, Maroc)
– Erick Noël (PR histoire des mondes modernes, Université des Antilles)
– Jean-Jacques Tatin-Gourier (PR littérature française xviiie siècle, Université de Tours)
– Louis-Georges Tin (MCF littérature française xvie siècle, Université d’Orléans, et président du Conseil représentatif des associations noires de France)
– Marie-Paule de Weerdt-Pilorge (MCF littérature française xviiie siècle, Université de Tours)
– Vincent Wimbush (PR études religieuses, directeur de l’Institute for Signifying Scriptures, USA)
– Mónica Zapata (PR littérature hispano-américaine xxe-xxie siècles/études sur le genre, Université de Tours)
Les propositions de communications (titre et résumé de 250 mots maximum) sont à adresser avant le 10 septembre 2017 à : icd@univ-tours.fr
II. RENSEIGNEMENTS PRATIQUES
Dates du colloque : jeudi 18, vendredi 19, samedi 20 octobre 2018
Lieu : Université François-Rabelais, 3 rue des Tanneurs, 37000 Tours, France
Hébergement : l’unité de recherche ICD prendra en charge 2 à 3 nuitées dans des hôtels du centre-ville de Tours.
Les déplacements sont aux frais des participants.
Inscription au colloque : les droits d’inscription sont fixés à 35 € pour les participants (sauf collègues de l’université de Tours, retraités et membres du comité scientifique). Ils comprennent la prise en charge des déjeuners collectifs, l’hébergement (comme indiqué ci-dessus) et le financement de la publication.
Une attestation de participation et de versement sera délivrée pour permettre le remboursement par l’université ou l’équipe de rattachement.
BIBLIOGRAPHIE INDICATIVE
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— (dir.), Dictionnaire des gens de couleur dans la France moderne, Genève, Droz (3 vol.) : Vol. I. (fin XVe s. – 1792) Paris et son bassin, 2011 ; Vol. II. La Bretagne. Entrée par année (début XVIe siècle – 1792), 2013 ; Volume III. Le midi. Entrée par année (fin XVIe siècle – 1792), 2017
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