Le système de classement des entrées du dictionnaire de la Siefar
Nicole Dufournaud avec la collaboration de Marie-Elisabeth Henneau
«… il luy demanda son propre
nom. Elle luy faignit luy en disant un autre, en
quoy il pouvoit estre aisément deceu, car les noms
que nous donnons aux Dames, sont des Sei-
gneuries ou epithetes, ainsi son vray nom n’estoit
pas vulgairement cogneu, parquoy elle l’abu-
sa, mais comme il eut bien remué en son coeur
pour en avoir souvenance, l’ayant ouy nommer
estant petite, du nom sous lequel elle avoit esté
caracterisee entre les Chrestiens, il s’en advisa, &
sur ceste difficulté, il se pleignit & consola, ainsi
faisant entendre en ces souspirs qu’il cognoissoit
ce beau nom…»
L’histoire véritable ou le voyage des princes fortunez, François Béroalde de Verville,Paris, 1610, tome 1, p. 136
L’Ecole nationale des Chartes publie en ligne des conseils pour l’établissement des index de l’époque moderne (XVIe-XVIIIe siècles).
A partir de ce cours en ligne, la Siefar produit son propre système de classement (toutes les citations entre guillements proviennent du site Theleme de l’ENC).
Deux classements des noms de personnages sont proposés :
1) Une identification qui crée la page du personnage et son URL
Le nom du personnage est déterminé par son nom de naissance, qui est dans la plupart des cas son nom patronymique, par exemple :
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Marie Sallé
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Michelle de Saubonne (rejet de : Michelle de Saubonne, dame de Soubize)
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Anne de Lenclos (rejet de : Ninon de Lenclos)
En cas d’absence d’identité précise, la dénomination connue est choisie :
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Madame de Vacher
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Madame la Présidente de Mal-Enfant
Ce sont souvent les identités de leur mari ou le nom de terre de leur mari. La Siefar apporte un soin particulier à rechercher l’identité de ces femmes qui n’existent que sous un nom apporté par le mariage, usage contemporain qui s’est généralisé après la Révolution française.
Les personnages identifiés uniquement par leur prénom sont classés à celui-ci :
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Fastrade (rejet de : Fastrade, reine des Francs)
En cas de doublon, les dates de naissance et demort sont ajoutées :
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Théodechilde (Après 600-Après 661)Théodechilde (Après 500-613)
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Marguerite de France (1158-1197)Marguerite de France (1523-1574)
2) Un classement alphabétique proposé dans la liste des «personnages» déterminé selon le système issus des normes de classement et préconisé par l’ENC :
«La particulede,d’n’est pas prise en compte pour l’ordre alphabétique des patronymes, contrairement aux articlesDu,Des,Le,La,Les:»
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Françoise d’Aubigné est classée à :
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Aubigné, Françoise d’
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Marie des Vallées est classée à :
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Des Vallées, Marie
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Marguerite du Tertre de La Marche est classée à :
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Du Tertre de La Marche, Marguerite
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Marie L’Angelier est classée à :
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L’Angelier, Marie
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«Il est parfois malaisé de déterminer si un nom est précédé d’une particule ou non. Souvent, la particule est soudée au nom, et des noms parfois célèbres s’écrivent de deux façons différentes (ainsi celui de la famille d’Aguesseau ou Daguesseau; ou encore Du Chesne ou Duchesne). Dans ce cas, on choisira comme vedette celle des deux formes qui paraît la plus exacte ou la plus courante…. On prendra garde que sous la Révolution la particule a souvent disparu ; elle a été soit supprimée soit attachée au nom.» La Siefar suit cette recommandation de l’ENC et s’attache à préserver l’identité du personnage sans la déformer à travers le prisme des usages du XIXe siècle.
Les règles de classement étant définies, il s’agit de choisir une «vedette» qui sera l’entrée du dictionnaire Siefar.
Le choix de l’identité «vedette»
«La vedette est la rubrique principale dans laquelle sont données toutes les références se rapportant à un nom donné.» Pour l’époque moderne, et en règle générale, les femmes gardent leur nom patronymique toute leur vie. Constatons qu’au XVIIIe siècles, les usages commencent à changer et les femmes prennent parfois le nom de leur mari. Cependant, officiellement, elles gardent leur identité.
Les entrées des noms de personne dans le dictionnaire de la Siefar sont créées avec le nom patronymique:
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Marie Sallé
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Jeanne-Marie Vaimboult [rejet du nom marital : Jeanne-Marie Le Prince de Beaumont]
Toutefois, certaines catégories de personnes échappent à cette règle et doivent être classées à leur prénom : ce sont les souveraines et les femmes nobles du Moyen-Age:
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Anne de Bretagne (la duchesse de Bretagne)
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Mathilde d’Anjou (qui devient Abbesse de Fontevrault au XIIe siècle)
Toujours pour le Moyen-Age, ajoutons les saintes et les religieuses, souvent identifiées par leur lieu d’origine. Il ne s’agit pas d’un patronyme, mais le lieu où leur couvent est implanté, par exemple :
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Ide de Nivelles
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Julienne de Cornillon
dont les noms de naissance ne sont pas parvenus jusqu’à nous et qui sont classées à leur prénom.
On rencontre très fréquemment le cas de personnages qui, outre leur patronyme, portent un nom de terre. Il est d’usage de mettre le titre en vedette. Pourtant, le fait de garder cet usage comporte bons nombres d’inconvénient. Un même personnage peut avoir des titres multiples ou voir ses titres disparaître. En fait durant une longue vie, l’évolution des titres ne permet pas de classer un personnage. De plus, un titre ne disparaît pas avec la mort du personnage qui le porte, mais il se transmet. Le titre de «duchesse de Longueville» est portée par exemple par trois dames :
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Marie de Lorraine dite Marie de Guise
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Anne-Geneviève de Bourbon
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Louise de Bourbon
La Siefar traite les cas particuliers
Certains personnages sont connus soit par des pseudonymes, soit par un nom qu’ils ont porté provisoirement, soit par le titre qu’ils portent. Les exemples suivants illustrent les choix que la Siefar a dû opérer :
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les actrices ont un nom de scène qui parfois ne correspond pas à leur nom patronymique qui trop souvent ne nous est pas parvenu :
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si c’est un pseudonyme ou une appellation de scène :Jeanne-Rose-Guyonne Benozzi (rejet de «Silvia») ;Gertrude Boon (rejet de «La Belle Tourneuse»)
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si c’est le nom du mari ou son titre :Marie Desmares (rejet de «Champmeslé», titre de son mari)
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les religieuses sont toutes classées à leur nom patronymique quand il est connu !Jeanne Deleloë (rejet de «Mère Jeanne de Saint Mathieu»)
Les femmes nobles restent le problème majeur dans le choix des «vedettes». Au Moyen Age, le prénom fait office de nom. Les nobles dames, seigneures de leur fief, se désignent par leur prénom : Anne la duchesse de Bretagne, Guyonne la comtesse de Laval, Mahaut, la comtesse d’Artois. Par commodité, la vedette de leur nom est :
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Anne de Bretagne
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Mahaut d’Artois
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Guyonne de Laval est cependant restée sous son nom de naissance : Renée de Rieux
Au début des temps modernes, les noms de terre deviennent les patronymes de ces nobles, par exemple :
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Marie de Luxembourg, duchesse de Penthièvre, descend de seigneurs souverains de la Maison de Luxembourg dont elle garde comme patronyme le nom de la terre ancestrale. Elle est classée à Luxembourg.
Alors que Marie de Luxembourg, reine de France, fille de Henri comte de Luxembourg, est classée à Marie.
La vedette ne renvoie pas vers les identités secondaires, les pseudonymes, les titres et les diverses appellations. Les autres dénominations figurent dans l’«infobox» de la page du personnage et sont accessibles grâce au moteur de recherche.