Mélanie de Boileau
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Mélanie de Boileau | ||
Biographie | ||
Date de naissance | 1772 | |
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Date de décès | 1864 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
Notice de Isabelle Havelange, 2008
Mélanie de Boileau, issue d'une famille de vieille noblesse, est née en 1774 à Abbeville dans la Somme. Promise à une prébende de chanoinesse, la Révolution, qui abolit les chapitres séculiers, ruine les espoirs de sa famille à ce sujet. Au début de l’Empire, elle accompagne son père à Paris et entame une carrière de romancière avec La Princesse de Chypre(1807) et Elisa ou les trois chasseurs (1808). Elle ambitionne dès 1807 le poste de maîtresse d’histoire à Ecouen, maison d’éducation de la Légion d’honneur récemment créée par Napoléon, faisant état d’une connaissance exceptionnelle chez une femme. Elle appuie sa requête auprès de Lacépède, grand chancelier, par la présentation du manuscrit de son Cours élémentaire d'histoire universelle rédigé sur un nouveau plan, ou Lettres de Madame d'Ivry à sa fille, qui paraîtra en 1809. L’ouvrage comporte quatre volumes consacrés à l’histoire ancienne, six à l’histoire moderne, et se prolonge jusqu’à la période napoléonienne. Seize pages sont consacrées à la critique des oeuvres principales sur lesquelles elle se fonde: le Précis d'histoire universelle d’Anquetil, L'Histoire universelle sacrée et profanede Dom Calmet, le Discours sur l’histoire universellede Bossuet, l’Essai sur l'histoire générale des moeurs et l’esprit des nationsde Voltaire et les Annales de la vertu de Mme de Genlis. Pour que son ouvrage soit plus accessible aux élèves, selon le principe de l’«instruction agréable» en vogue depuis la deuxième moitié du XVIIIe siècle, l’auteure lui a donné le cadre d’un roman, mettant en scène une correspondance entre une jeune fille de seize ans et sa mère désireuse de lui transmettre sa connaissance de l’histoire. Le programme proposé s’étend sur deux ans. L’ouvrage, très apprécié de Mme Campan, directrice de la Maison impériale d’Écouen, devient en 1809 le seul ouvrage de femme parmi les livres d’éducation admis dans cette institution. Il circulera ensuite en Europe dans les cours napoléoniennes auprès des anciennes élèves de Mme Campan, devenues les ambassadrices de son système d’enseignement. Le 5 janvier 1811, Lacépède annonce à Mlle de Boileau sa nomination à la Maison d’Ecouen comme dame de deuxième classe, spécialement chargée de l’enseignement de l’histoire. En 1815, la chute de l’empereur entraîne la fermeture de la maison d’Ecouen, désormais réunie à celle de Saint-Denis. Mélanie de Boileau, malgré ses sollicitations, n’est pas retenue parmi les maîtresses.
Son Histoire universelle, trop marquée par la période napoléonienne, ne connaît pas de réédition. En 1820, elle commence à publier un Atlas chronologique et littéraire, en 32 tableaux synoptiques, dont le principe est de rassembler en colonnes parallèles l’essentiel d’un règne ou d’une période. Soutenue pendant la Restauration par les Bourbons auxquels elle se rallie, elle publie la même année un Appel à la nation française, ou réflexions suggérées par les funérailles de son altesse royale monseigneur le duc de Berry. À cette même époque, elle tente, mais en vain, de devenir la lectrice de la duchesse de Berry, ou, à défaut, sa bibliothécaire. Elle a l’espoir d’être promue sous-gouvernante des enfants de France au moment où se forme la Maison d’Éducation du Prince à naître, futur héritier présomptif de la Couronne. A partir des années 1830, elle affiche des positions légitimistes qui la marginalisent. Elle n'en continue pas moins, avec une ténacité remarquable, à écrire et à travailler à l'édition de ses oeuvres, principalement historiques. Elle meurt au couvent des Augustines de Versailles en 1864, coupée de tout lien familial.
Malgré tous les avatars de sa vie, elle reste celle qui a été, à l'époque napoléonienne, la première maîtresse d'histoire en France, et cela dans une institution majeure au regard de l'évolution de l'enseignement public féminin. Elle vient seulement d’être redécouverte, un siècle après l’unique biographie qui lui a été consacrée.
Oeuvres
- 1807: La Princesse de Chypre, roman historique, Paris, Fréchet, 5 vol. (sous le pseudonyme d'Ursula Scheulterie).
- 1808: Elisa ou les trois chasseurs, Paris, Fréchet.
- 1809: Cours élémentaire d'histoire universelle rédigé sur un nouveau plan, ou Lettres de Madame d'Ivry à sa fille, Paris, Dentu, 10 vol. avec 3 cartes.
- 1817: Azélie ou les vicissitudes de la fortune, Paris, Veuve Lepetit, 3 vol.
- 1822: Atlas chronologique, historique et littéraire. Cahiers d'histoire ancienne, Paris, chez l'auteur.
- 1820: Appel à la nation française, ou réflexions suggérées par les funérailles de son altesse royale monseigneur le duc de Berry, Paris, Lenormand,
- 1824: Trois nouvelles politiques, Paris, Lenormant; Vernarel et Tenon; Ladvocat; Ponthieu.
- 1854: Fastes napoléens, tableau historique des faits et événements principaux du règne de Napoléon le Grand, depuis son avénement à l'Empire jusqu'à la naissance du roi de Rome, Versailles, impr. de Beau jeune.
- sd.: Ier(-VIIe) Tableau historique et chronologique de l'histoire de France, donnant la suite des rois de France depuis Pharamond jusqu'à Louis XVI, Paris, impr. de F. Didot.
Choix bibliographique
- Bout, Antoinette, Une abbevilloise célèbre, mademoiselle Mélanie de Boileau, dame de la Légion d’honneur et publiciste. Sa famille, sa vie, ses œuvres, Abbeville, F. Paillart, 1905, 20p.
- Havelange, Isabelle, «Mélanie de Boileau (1774-1862), une historienne à Ecouen», dans Histoires d'historiennes, dir. N. Pellegrin, Saint-Etienne, Publications de l'Université de Saint-Etienne, 2006, p.243-264.
- Havelange, Isabelle, «Heurs et malheurs de Mélanie de Boileau, femmes de lettres, historienne et pédagogue (1774-1862)», dans Femmes et livres, dir. D. Bajomée, J. Dor et M.-E. Henneau, Paris, l’Harmattan, 2007, p.175-185.
- Havelange, Isabelle, «Maîtresse à Ecouen: le cas de Mélanie de Boileau (1774-1862)», dans Bicentenaire des maisons d'éducation de la Légion d'honneur, Paris, l'Harmattan, 2007, p.63-79.
- Havelange, Isabelle, «Des femmes écrivent l’histoire. Auteurs masculins et féminins des premiers livres d’histoire pour la jeunesse (1750-1830)», dans Pédagogies de l’histoire, XVIIIe-XXIe siècles, dir. A. Buter, Histoire de l’éducation, n° 114, 2007, p. 25-52.
Jugements
- [De Mme Campan à Mélanie Boileau]: «Je me suis de jour en jour, Mademoiselle, plus de gré d’avoir réclamé auprès de vous l’avantage, dont je me glorifie, d'avoir été la première à solliciter l’adoption de votre ouvrage pour l’étude de l’histoire dans la Maison impériale. Je ne sais ce qui m’étonne le plus de votre entreprise, de l’agrément qui est répandu dans votre ouvrage et de la rapidité avec laquelle vous exécutez un projet aussi vaste. L’enchaînement en est parfait, vous ramenez avec grâce l’attention sur votre élève, vous n’en fatiguez pas le lecteur formé qui ne voudrait pas détourner son attention [...] en faveur de leçons uniquement propres à la jeunesse. […] Je vous prie de m’envoyer vos quatre volumes bien reliés pour cette jeune princesse qui aime la lecture de l’histoire, est pleine d’esprit et de grâce, et dont la jeunesse annonce pour l’avenir une femme très marquante. […] Je ne sais quel malicieux esprit a fait dire que les femmes n’aimaient point à applaudir aux ouvrages des femmes ; sans mettre trop de valeur à mon opinion particulière, j’ai été charmée d’accorder un hommage empressé à toutes leurs aimables productions et je suis ravie d’avoir le même hommage à offrir pour une oeuvre bien plus importante pour une personne de mon sexe. J’aime à vous exprimer ces sentiments, mademoiselle, et je vous prie de les croire unis à tous ceux avec lesquels j’ai l’honneur d’être votre très humble et très obéissante servante.» (Bibliothèque de Versailles, Collection Victor Bart, Lettre Mme Campan à Mlle de Boileau, 2 octobre 1809)
- Témoignage de Jenny Bastide, ancienne élève d’Écouen, qui, évoquant les enseignantes, ne retient que Mme de Beaufort d’Hautpoul et «Madame Mélanie de Beaulieu [sic], qui a fait un abrégé de l’histoire de France et trois ou quatre romans aussi prétentieux que ceux de mademoiselle de Scudéry». (cité par Léon Gozlan, Les châteaux de France, Paris, 1857, p.126)