Anne de Bretagne
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Anne de Bretagne | ||
Titre(s) | Reine de France Duchesse de Bretagne | |
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Conjoint(s) | Maximilien Ier, roi des Romains Charles VIII, roi de France Louis XII, roi de France | |
Dénomination(s) | Duchesse Anne | |
Biographie | ||
Date de naissance | 25 janvier 1477 | |
Date de décès | 9 janvier 1514 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) | ||
Dictionnaire Pierre-Joseph Boudier de Villemert (1779) | ||
Dictionnaire Fortunée Briquet (1804) | ||
Dictionnaire Hilarion de Coste (1647) |
Sommaire
Notice de Cynthia J. Brown, 2005
Fille de Marguerite de Foix et de François II, duc de Bretagne, Anne est née à Nantes le 25 jan. 1477. À la suite de la mort de son père, survenue en septembre 1488 alors que les forces françaises occupent une grande partie de son duché, la jeune Anne est couronnée, à Rennes, duchesse de Bretagne (fév. 1489). Cette jeune fille très déterminée refuse d'épouser Alain d'Albret, mais consent à se marier par procuration avec Maximilien Ier, roi des Romains (déc. 1489). Cependant, assiégée dans Rennes, Anne est contrainte d'accepter un mariage avec le roi de France Charles VIII (déc. 1491). Cette union, qui constitue l'une des clauses d'un traité, lui fait perdre le contrôle de la Bretagne et provoque l'invalidation de son mariage avec Maximilien. À quinze ans, Anne est couronnée reine de France à Saint-Denis et fait son entrée dans Paris en fév. 1492. L'allégresse provoquée par la naissance de Charles Orland en oct. 1492 se change en profonde douleur, trois ans plus tard, à la mort prématurée de ce dernier. Pendant la campagne d'Italie que mène Charles VIII en 1495/1496, le rôle secondaire que joue Anne à la cour, dont le centre est alors Amboise, est compensé par l'implication plus active de sa belle-soeur, Anne de Beaujeu, dans les affaires royales.
Avec la mort inattendue du roi Charles VIII, en 1498, Anne retrouve la souveraineté sur la Bretagne. Au dire de tous, son mariage avec le roi Louis XII, en jan. 1499, débouche sur une union plus favorable pour elle, en partie parce que Anne négocie le contrôle de la Bretagne et de ses revenus et parce qu'elle est traitée avec un plus grand respect. Son influence sur la politique française est néanmoins limitée, bien qu'elle soit parfois active en coulisse en se faisant l'adversaire des campagnes militaires de Louis en Italie, particulièrement de celles contre le pape, et en participant à des négociations intermittentes avec les Espagnols, auxquels elle est alliée par sa mère. Elle est couronnée une seconde fois à Saint-Denis et fait une nouvelle entrée dans Paris en 1504.
Avec l'établissement de la cour à Blois, l'assez considérable suite d'Anne est grandement élargie pour inclure un plus grand nombre de femmes; et la reine engage les écrivains et les artistes les plus importants de son époque. Il existe de nombreux ouvrages dédicacés à la reine ou commandés par elle. Ces oeuvres comprennent les manuscrits enluminés du compte-rendu, par André de la Vigne, du couronnement de 1504, Les Vies des femmes célèbres d'Antoine du Four (1506), Le Voyage de Gênes de Jean Marot (1507), Les Illustrations de Gaule (Livre III) de Jean Lemaire (1512) et Les Grandes heures de la reine Anne de Bretagne, si superbement décorées par Jean Bourdichon (1508). Ces ouvrages appartiennent à l'importante bibliothèque qu'Anne partage avec ses deux maris. La réussite que représente la naissance de deux filles, Claude en 1499 et Renée en 1510, est assombrie par l'échec d'au moins quatre tentatives visant à engendrer un héritier mâle. Malgré de nombreux traités avec les Habsbourg (1500, 1503, 1504), les efforts d'Anne pour assurer une future indépendance à la Bretagne par le biais d'un mariage entre Claude et Charles d'Autriche (le futur Charles V) ne sont pas couronnés de succès. Anne est affaiblie par Louis XII lui-même, dont la volonté testamentaire est que Claude épouse François d'Angoulême, héritier présomptif de la couronne de France et fils de la rivale d'Anne, Louise de Savoie. Cette situation conduit à une brouille passagère entre le roi et la reine, et Anne est forcée d'accepter que cette union est inévitable. Le mariage est célébré très rapidement après sa mort. Sur un autre front politique, l'accusation de trahison que la reine porte contre le maréchal de Gié (Pierre de Rohan) -dont les projets d'assurer la transmission du pouvoir, au cas où Louis II mourrait, prévoient d'empêcher Anne et Claude de s'enfuir en Bretagne (1503)- entraîne une enquête et un procès très longs. Le dénouement judiciaire, en fév. 1506, accorde à Anne une victoire partielle supplémentaire puisque, malgré le fait que le maréchal perde son commandement et son rang militaires, les charges de trahison ne sont pas retenues. Le chagrin de Louis XII à la mort d'Anne, survenue le 9 jan. 1514, associé à sa pleine conscience des bénéfices politiques que procurerait une commémoration publique, inspirent au roi un cérémonial funéraire élaboré. Ce dernier est marqué par une procession de cinq semaines menant le cortège funèbre de Blois à Saint-Denis, en passant par Paris, suivie en mars par un service commémorant l'enterrement du coeur d'Anne à Nantes. Plus de trente manuscrits du compte-rendu que Pierre Choque fait de l'événement sont parvenus jusqu'à nous.
Étant la seule reine de France à avoir été couronnée deux fois, Anne a longtemps été louée pour son intelligence, sa générosité et sa piété, alors que les historiens critiquent sa prétendue pudibonderie et, d'une façon plus significative encore, sa façon de privilégier les intérêts bretons sur ceux de la France. Des opinions récentes soulignent le raffinement culturel qu'elle a apporté à la cour de France et suggèrent que, finalement, les objectifs principaux d'Anne visant à ménager une future indépendance de la Bretagne -en partie par le biais du mariage de Claude avec Charles d'Autriche- et à réaliser la paix partout en Europe, étaient hors de portée des pouvoirs limités de la reine.
Traduction de Pierre Bras
Oeuvres
- Lettres : Georges Minois parle d'environ deux cent vingts lettres conservées. On les trouve dans Quelques Lettres d'Anne de Bretagne, par M. l'abbé Durville, Paris, Imprimerie nationale, 1908, 39 p. [extrait duBull. hist. & phil., 1907] et dans «Lettres inédites de la Duchesse Anne» [par J. Gaultier du Mottay], in Mémoires de la Société d'Histoire et d'Archéologie des Côtes-du-Nord, t.III, 1857.
Choix bibliographique
- Jones, Michael,. «Les Manuscrits d'Anne de Bretagne», Mém. de la Soc. d'Hist. et d'Arch. de Bretagne, 55, 1978, p.43-81.
- Le Fur, Didier, Anne de Bretagne. Miroir d'une reine. Historiographie d'un mythe, Paris, Librairie Édition Guénégaud, 2000.
- Leroux de Lincy, A., Vie de la reine Anne de Bretagne,. Paris, L. Curmier, 1860-1861, 4 vol.
- Matarasso, Pauline,. Queen's Mate,. Aldershot, Ashgate, 2001.
- Minois, George,. Anne de Bretagne,. Paris, Fayard, 1999.
Choix iconographique
- Anonyme (Jean Perréal?), Anne de Bretagne (peinture a tempera sur bois), vers 1492, Paris, BnF (ms. lat. 1190) -- Avril, François et Nicole Reynaud, Les Manuscrits à peinture en France 1440-1520, Paris, Flammarion, 1995, no 206, p.367. [1]
- Bourdichon, Jean, Anne de Bretagne (enluminure), vers 1503-1508, Paris, BnF (ms. lat. 9474, fol.3) -- Bourdichon, Jean, Les Heures d'Anne de Bretagne, Émile Mâle (éd.), Paris, Verbe, 1946. [2]
- Bourdichon, Jean, «Jean Marot offrant son livre du Voyages de Gênes à Anne de Bretagne» (enluminure), vers 1508. Paris, BnF (ms. fr. 5091, fol.1) -- Avril et Reynaud, voir supra, no 167, p.303. [3]
- Bourdichon, Jean, Anne de Bretagne écrivant une lettre (enluminure), vers 1510, Saint-Pétersbourg, Bibliothèque nationale de Russie (ms. Fr. F.v.XIV, 8, fol.1v) -- Avril et Reynaud, voir supra, no 168, p.305.
- Maître de la Chronique scandaleuse. «Le couronnement d'Anne de Bretagne en 1504» (enluminure), vers 1505, Waddesdon Manor (ms. 22, fol.1v) -- L. M. J. Delaissé, James Morrow et John de Wit,Illuminated Manuscripts, Londres, National Trust, 1977, fig.11, p.481.
Liens électroniques
- J. Pierpont Morgan Library, exposition en ligne: le Livre d'heures d'Anne de Bretagne par Jean Poyet [4]
Jugements
«Et tantost apprés se leva la tresheureuse dame de son siege pour aller devant ledit grant autel, et la estre pour la seconde foys precieusement sacree et dignement couronnee, ainsi que celle qui par ses bonnes meurs tant vertueuses l'avoit merité. Et luy en appartenoit l'excellence et tryumphe de memoire perpetuelle, non a aultre, comme ainsi soit qu'en nulles croniques ne histoires, tant soyent antiques ou modernes, ne soit trouvé le pareil cas estre advenue» (André de la Vigne, «Le Sacre et couronnement d'Anne de Bretagne», in Pierre Gringore, Les Entrées royales à Paris de Marie d'Angleterre (1514) et Claude de France (1517), éd. Cynthia J. Brown, Genève, Droz, 2005, p.288-295). «Par ses contradictions -sa piété formelle à laquelle se mêle une grande dureté de coeur dictée par des intérêts égoïstes et familiaux-, elle est un peu en décalage par rapport à son temps. [...] Elle a fait ce qu'elle a pu, d'une façon que l'on peut contester, avec toute son énergie, dans le cadre qui lui était imparti. [...] Ce fut sans doute la dernière souveraine médiévale» (G. Minois, Anne de Bretagne, voir supra, choix bibliog., p.522). «A female sovereign marrying a foreign prince was automatically divided against herself. Furthermore, Anne's apprenticeship as queen of France, grafted onto her experience as ruler of a principality fighting for its very existence, was not of a kind to give her a strong sense of belonging: desired not for herself, but for her castles and her coastline, she was propelled into the victor's bed and then politically sidelined. [...] She might legitmately be charged [...] with reassuming the crown of France in 1498 while reserving her allegiance. [...] But she had, too, to provide Brittany with an heir. [...] The future conflict of interests was inherent in the situation» (P. Matarasso, Queen's Mate, voir supra, choix bibliog., p.280).