Anne Le Fèvre/Philibert Riballier et Catherine Cosson
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[333] LEFEBVRE, (Anne) fille de l’illustre Savant de ce nom, Professeur de Belles-Lettres à Saumur, et femme du célebre Dacier, née sur la fin de l’année 1651, fit paroître dès son bas âge de si heureuses dispositions pour l’étude des sciences, que son pere n’hésita point de s’appliquer avec le plus grand soin à les cultiver, et en peu de tems il la mit en état de lire sans secours Phedre et Térence. M. Lefebvre, transporté d’un progrès si rapide, la fit passer à l’étude de la langue Grecque, dans laquelle cette studieuse fille devint bientôt également habile, lisant Anacréon, Callimaque, Aristophane et les Tragiques Grecs, avec autant de facilité et d’intelligence que son pere lui-même l’auroit pu faire. Pour se distraire de ses premiers travaux, Mademoiselle Lefebvre apprit l’Italien, et ne tarda pas d’être en état de lire les Poëtes de cette nation. A l’âge de vingt-un ans, ayant eu le malheur de perdre cet illustre pere, elle vint s’établir à Paris, où sa réputation l’avoit déjà devancée, et s’y consacra entiérement à l’étude. Unie par les liens [334] de l’hymen à M. Dacier, sa passion pour les Belles-Lettres n’en devint que plus ardente dans la société d’un époux si digne d’une telle épouse. Pendant plus de quarante années qu’ils vécurent ensemble, ils s’occuperent à l’envi aux travaux littéraires qui les ont couverts de la plus grande gloire. Madame Dacier joignoit à ses heureux talens les plus excellentes qualités du coeur. Tous ceux qui la connoissoient ne pouvoient se lasser d’admirer sa fermeté et son courage, l’égalité de son ame dans tous les événemens de sa vie, sa piété, sa bonté, sa sagesse, sa modestie, sa charité ardente pour les pauvres. Les Lettres perdirent cette illustre Savante le 17 Août 1720, âgée d’environ soixante-dix ans, et elle en fut universellement regrettée. Ses ouvrages sont trop connus pour qu’il soit nécessaire de les annoncer ici.