Marie-Suzanne-Josèphe Artus

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Marie-Suzanne-Josèphe Artus
Conjoint(s) François-René-Marie Defoye
Dénomination(s) Mademoiselle Artus
Suzette Artus
« Suzette »
De Foix
Biographie
Date de naissance 1741
Date de décès 1787
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice de Jean-Philippe Van Aelbrouck, 2004

Née à Lille le 17 juillet 1741, fille du musicien Pierre-Jérôme Artus Truyart et de la comédienne Marie Bienfait, Marie-Suzanne-Josèphe, dite Suzette Artus, commence sa carrière très jeune et est engagée comme première danseuse à Metz en 1759 et 1760, dans la troupe de Desgraviers. Elle épouse le basson François-René-Marie Defoye et joue la comédie à Strasbourg avec son mari avant de débuter à Bruxelles en 1766 comme première chanteuse (rôle de Zerbine dans La Servante maîtresse de Baurans et Pergolèse). Le 30 juin de la même année, l'impératrice Marie-Thérèse d'Autriche accorde un privilège exclusif d'exploitation des spectacles de Bruxelles à quinze comédiens réunis en société. Mme Defoye dispose d'une part dans cette nouvelle association, qui joue sous le nom de "Comédiens ordinaires de S.A.R." le prince Charles de Lorraine, gouverneur des Pays-Bas. Malgré les succès remportés par la nouvelle troupe auprès du public, l'entreprise théâtrale ne prospère guère et la discorde s'installe parmi les sociétaires. Mme Defoye ouvre les hostilités en signant, le 25 juin 1768, un acte de renonciation à la co-direction du théâtre. Les autres associés s'y opposent, obtenant de la juridiction compétente qu'elle respecte ses engagements. Le 19 novembre 1771, elle fait interner son mari, victime de "démence caractérisée", au couvent des Alexiens de Bruxelles, où il restera jusqu'à sa mort (1800). Dès lors, elle se met en ménage avec son compagnon Nicolas Guilleminot-Dugué, comédien arrivé à Bruxelles en 1769 et devenu sociétaire en 1771. L'année suivante, la direction du théâtre, en proie à de graves conflits internes et à la déroute financière, passe la main au comédien Louis Compain et au maître de musique Ignace Vitzthumb. Au terme de l'accord passé avec la nouvelle direction, Mme Defoye se retrouve bénéficiaire d'une rente viagère annuelle de 300 livres. Au début de l'année 1773, la situation du théâtre empirant, Mme Defoye décide de quitter Bruxelles après avoir donné à son bénéfice, le 11 janvier 1773, une représentation de Zémire et Azor, opéra de Marmontel et Grétry. À cette occasion, elle écrit aux directeurs: "Je n'ai que trop de sujets de me plaindre de mes directeurs, pour ne pas leur cacher que je les quitte avec bien du plaisir. Je n'ai que trop éprouvé leur injustice à tout égard, autant pour mes camarades que pour moi. Je n'ai qu'un regret qui restera toujours dans le fond de mon coeur: c'est de quitter un public que je chérirai toujours". Mme Defoye convient d'un engagement avec Mme Destouches-Lobreau, directrice du Théâtre de Lyon et s'y rend en compagnie de Dugué. Effrayée par la laideur de la comédienne, la directrice décide de résilier le contrat sur-le-champ. Sans se laisser impressionner, Mme Defoye demande à chanter au moins une fois dans Le Peintre amoureux, opéra-comique de Duni, n'exigeant en contrepartie que le prix de son retour à Paris: une fois costumée et grimée, la comédienne, méconnaissable, enthousiasme le public par le charme de sa voix. Convaincue du résultat, la directrice lui fait signer un engagement d'un an.

En 1774, elle est engagée dans la troupe impériale de Saint-Pétersbourg qui se rend à Moscou l'année suivante pour jouer devant la cour. En août 1776, Mme Defoye accouche d'un enfant mort-né et son état de santé inquiète le public. Après le départ de la troupe française tombée en disgrâce, tandis que Dugué est engagé à Bordeaux, Mme Defoye reste à Saint-Pétersbourg et se produit, pendant le carême de 1779, dans plusieurs concerts spirituels organisés par le violoniste Louis-Henri Paisible. La situation des artistes français établis en Russie se dégradant, Mme Defoye annonce son départ en mai 1781 et quitte le pays peu de temps après. En septembre, elle donne plusieurs représentations à Lille, avant de s'engager dans la troupe du théâtre de Gand, où elle joue de 1782 à 1785. Cette dernière année, elle rejoint Dugué au théâtre de Liège, où il est comédien depuis 1781 et qu'il dirigera par la suite; elle y tient les premiers rôles.

La dernière mention concernant Mme Defoye date de 1787. Alors qu'elle dirige le Théâtre de Béthune, le baron d'Hinge, grand bailli de Béthune, sollicite pour elle le privilège d'Amiens. On ignore ce qu'il advient de Mme Defoye après cette date. Ses contemporains, excepté le voyageur Burney, n'ont guère fait grand cas de cette personnalité qui a pourtant marqué plusieurs scènes européennes, tant comme chanteuse que comme directrice de troupe théâtrale.

Choix bibliographique

- Burney, C. Voyage musical dans l'Europe des Lumières[1771-1773]. Paris, Flammarion, 1992, p.243-244.
- Liebrecht, H. Histoire du théâtre français à Bruxelles. Paris, Champion, 1923, p.231-242.
- Mooser, R.-A. L'Opéra-comique français en Russie au XVIIIe siècle. Genève, Kister, 1954, p.77-79.

Jugements

- "La pièce de ce soir, mercredi 15 juillet 1772, était Zémire et Azor [...]. L'une des femmes, la Defoix, qui tenait le rôle de Zémire, avait de la facilité et une voix assez étendue, mais son exécution n'en manquait pas moins d'aplomb et de fini" (C. Burney, Voyage musical..., voir supra, choix bibliog., p.242).
- "Jeudi 16 juillet [1772]. J'entendis ce soir une jolie comédie de Boissy, Le Mercure galant, et Le Huron; ce dernier fut très bien joué, quoique piètrement chanté. Cependant, la petite Defoix, qui tenait hier soir le rôle de Zémire, était beaucoup plus à son aise dans celui-ci, car ses airs correspondaient mieux à ses moyens. Elle est sensiblement moins française dans son chant que le reste de la troupe, mais elle ne sait pas la musique et elle est née française, deux obstacles non négligeables à la bonne manière de chanter ". (C. Burney,Voyage musical..., voir supra, choix bibliog., p.243-44).
- (à propos du privilège du théâtre d'Amiens) "actrice de distinction, elle est liée d'amitié intime avec Mme Belcourt, soeur de Madame Belcourt des Français à Paris, qui lui évitera des voyages dans la capitale en se chargeant, lors qu'il lui manquera des acteurs, de lui envoyer ce qu'il se trouvera de mieux dans Paris. Elle a par elle-même les fonds nécessaires tant pour l'établissement que le soutien de sa troupe" (M. d'Hinge, lettre du 19 mars 1787, Amiens, Bibliothèque municipale, Fonds ancien FF 1314).

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