Marie-Anne Barbier/Fortunée Briquet

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BARBIER, (Marie-Anne) née à Orléans, est morte à Paris, dans un âge avancé, en 1745. Son goût pour la poésie se développa de bonne heure. Encouragée par les premiers succès qu'elle obtint, elle fixa sa résidence à Paris.
On lui doit: Saisons littéraires, ou Mélanges de poésie, d'histoire et de critique. Ce volume est le premier et le dernier de l'ouvrage périodique qu'elle avait entrepris. -- Théâtre de l'Amour et de la Fortune. -- Arrie et Poetus, tragédie, mise sur la scène le 3 juin 1702; Paris, Michel Brunet, 1702, in-12. Cette pièce eut seize représentations. Elle est dédiée à M.me la duchesse de Bouillon, par une épître en vers. Dans la préface, l'auteur se plaint qu'on veut lui ôter la gloire de son ouvrage, en l'attribuant à un autre. Voici l'approbation de Fontenelle: «J'ai lu, par ordre de Monseigneur le Chancelier, Arrie et Poetus, et j'ai cru que l'impression ne pourrait être aussi agréable au public, que la représentation l'a été.» Ceux qui ont reproché à Mademoiselle Barbier d'avoir défiguré l'histoire dans cette tragédie, ont sans doute oublié qu'elle n'a fait que mettre à profit les prérogatives que se sont arrogées les auteurs dramatiques. Elle est la seconde personne qui ait mis au théâtre l'intéressant sujet d'Arrie et de Poetus. -- Cornélie, mère des Gracques, tragédie, jouée le 5avril 1703, Paris, Pierre Ribou, 1703, in-12. Cette pièce, reçue avec de grands applaudissements, eut six représentations. L'auteur la dédia à S.A.R. Madame, par une épître en vers. Quoique cette tragédie ne soit pas sans défaut, elle tient le premier rang parmi celles de ce nom, composées tour-à-tour par Garnier, Hardy et Fuzelier. -- Thomiris, tragédie, mise sur la scène le 23 novembre 1706, in-12. Cette pièce eut six représentations. Elle est dédiée à Madame la duchesse du Maine, par une épître en vers. Le choix du sujet de cet ouvrage décèle une femme qui n'était occupée que de traiter des faits qui pussent honorer son sexe. Cependant on ne peut s'empêcher de convenir qu'il eût été possible de faire un choix plus heureux; car, si Thomiris est célèbre par ses victoires, elle l'est aussi par sa cruauté, et si Mademoiselle Barbier, en mettant cette princesse sur la scène, eût pu ne l'envisager que sous le premier point de vue, elle n'eût point manqué son but. La barbarie qui règne dans cette pièce l'a empêchée de faire fortune dans l'esprit du public. On serait tenté de croire que depuis cette époque, la sensibilité a diminué de quelques degrés chez les Français, et augmenté chez les Anglais; la tragédie de Dubelloy, intitulée: Gabrielle de Vergy, n'a point eu l'improbation du public, malgré l'affreux spectacle du cinquième acte; et Miss More, dans sa tragédie de Percy, dont le sujet est le même que celui traité par Dubelloy, n'a point cru devoir adapter à sa pièce le dénouement atroce de Gabrielle de Vergy. -- La Mort de César, tragédie, jouée le 26 novembre 1709, Paris, Pierre Ribou, 1710, in-12. Cette pièce eut six représentations. Elle est dédiée, par une épitre en vers, à d'Argenson, conseiller d'état. Mademoiselle Barbier est le cinquième auteur qui ait donné au théâtre la Mort de César. La conduite de ces tragédies est assez régulière, et l'enchaînement des scènes assez bien lié. Le désir de faire paraître ses héroïnes grandes et généreuses, lui a fait négliger ses héros. Il y a dans ces pièces quelques situations touchantes, et une versification aisée et naturelle. -- Les Fêtes de l'Été, ballet avec un prologue, représenté par l'académie royale, le 12 juin 1716, musique de Mouret, Paris, Pierre Ribou, 1716, in-4. -- Le Jugement de Pâris, pastorale héroïque en 3 actes, avec un prologue, représentée par l'académie royale, le 14 juin 1718, musique de Bertin, Paris, P.Ribou, 1718, in-4. Dorneval et Pierre Biancolelli, en société avec Lellio père, firent paraître la même année une pièce de ce nom en un acte. -- Les Plaisirs de la campagne, ballet avec un prologue, représenté par l'académie royale, le 10 août 1719, Paris, veuve Pierre Ribou, 1719, in-4. -- Le Faucon, comédie en un acte et en vers, jouée le 1er septembre 1719, Paris, Pierre Ribou, 1719, in-12. Cette comédie eut 12 représentations. Elle a le mérite d'être passablement versifiée. Le sujet en est tiré de Bocace. Il a été traité par plusieurs auteurs dramatiques: Palaprat, avant Mademoiselle Barbier; Fuzelier, dans le même tems; La Drevetière, quelques années après, et De Théis en 1773. Son théâtre a été réuni en un volume in-12. Elle fit deux tragédies qui sont restées manuscrites. L'une est Panthée, et l'autre Joseph. Il est assez remarquable que cette dernière tragédie soit la cinquième de ce nom, et qu'il n'y ait eu d'imprimée que celle qui parut sous les auspices de Madame la duchesse du Maine.
Plusieurs personnes ont prétendu que Mademoiselle Barbier n'avait point fait de pièces dramatiques, et qu'elle n'était que le prête-nom de l'abbé Pellegrin. D'autres ont dit avec plus de raison que l'abbé Pellegrin ne fut jamais que son conseil et son censeur. Ceux qui veulent lui ravir la gloire d'avoir composé ses pièces dramatiques, pour la donner à l'abbé Pellegrin, n'ont qu'à se rappeler, pour lui rendre la justice qui lui est due, que Boileau corrigeait les pièces de Racine, et que l'on n'a point dit que Boileau fut l'auteur des OEuvres de l'Euripide Français. Écoutons à cet égard ce qu'en écrivit* l'abbé Pellegrin à Mademoiselle Barbier, le 24 mai 1704:
«Mademoiselle, je ne sais par quel endroit j'ai pu m'attirer une lettre aussi désagréable que celle qu'on vient de me rendre de vostre part: on dirait que vous voulez que je sois complice de la fausseté qu'avance l'auteur (1) du livre intitulé, Pièces fugitives. Je ne crois pas que jusqu'icy vous m'ayez connu assez peu de probité pour me croire capable de vous dérober vostre gloire; cependant vous voulez bien que je vous avertisse que plus vous serez sensible au larcin qu'on veut vous faire, plus vos ennemis s'obstineront à vous chagriner; au reste vous ne voyez presque point d'ouvrage qui ait quelque succès, dont les auteurs n'éprouvent la même injustice que celle dont vous vous plaignez. Vous n'ignorez pas qu'on ayt voulu donner l'Andrienne à un homme dont le caractère et la solidité sont tout-à-fait incompatibles avec ces sortes d'occupations, quoique celui qui a donné cette pièce en son nom soit très-capable de l'avoir faite: c'est pourquoi, Mademoiselle, soyez un peu moins vive sur un accident qui vous est commun avec presque tous les auteurs qui se distinguent; et contentez-vous de la justice que vous rendent ceux qui ont l'honneur de vous connoistre. Vous me dites, dans votre lettre, que, par un sentiment d'amour-propre, je ne suis pas tout-à-fait fâché qu'on m'attribue vos ouvrages. Je réponds à cela, Mademoiselle, que je n'ay jamais donné lieu à ce reproche, et que d'ailleurs un, homme de mon caractère ne doit regarder cette sorte de gloire que comme une honte. Ainsi ce qu'on a avancé n'est pour le moins aussi injurieux qu'à vous. Je vous prie d'être persuadée que, malgré l'injustice que vous me faites, je suis, avec beaucoup d'estime, vostre, etc.»
(1) Il avança que l'abbé Pellegrin avait fait les tragédies de Cornélie, d'Arrie et de Poetus.

  • Erratum: ce qu'en écrivit, lisezce qu'écrivit.
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