Anne de France

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Anne de France
Titre(s) Duchesse de Beaujeu
Duchesse de Bourbon et d'Auvergne
Régente de France
Comtesse de Gien et de Forests
Dénomination(s) Anne de Beaujeu
Biographie
Date de naissance 1461
Date de décès 1522
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)
Dictionnaire Pierre-Joseph Boudier de Villemert (1779)
Dictionnaire Hilarion de Coste (1647)


Notice de Elodie Lequain, 2004

Fille du roi Louis XI et de sa seconde épouse Charlotte de Savoie, soeur aînée de Jeanne de France et du futur Charles VIII, Anne de France naît en 1461 à Genappe en Brabant, près de Bruxelles. À la mort de Charles VII, Louis XI monte sur le trône et installe sa famille à Amboise. La princesse est l'enjeu de stratégies matrimoniales précoces. Encore nourrisson, elle est fiancée au jeune Nicolas, marquis de Pont-à-Mousson et petit-fils de René d'Anjou. Mais c'est Pierre, de plus de vingt ans son aîné, sire de Beaujeu et frère cadet du duc Jean II de Bourbon, qu'elle épouse. Le contrat est conclu à Jargeau en novembre 1473, et le mariage est célébré à Tours en 1474.

À la mort de Louis XI en 1483, Anne et Pierre de Beaujeu reçoivent la garde de Charles VIII, un adolescent fragile de treize ans. Anne, la «moins folle femme de France» selon son père, fait alors preuve de grandes qualités politiques en des temps difficiles. Les Beaujeu sacrifient Olivier Le Dain et Jean Doyat, serviteurs haïs de Louis XI, sur l'autel de l'apaisement et cherchent à acheter l'obéissance du peuple et des princes par des libéralités. Face à l'hostilité de Louis d'Orléans, futur Louis XII et époux mécontent de sa soeur Jeanne, Anne de France manoeuvre habilement les États généraux de Tours en janvier 1484 et consolide son autorité. Le jeune roi est sacré en mai à Reims. Toutefois, les princes ne désarment pas. Louis d'Orléans déclenche la «Guerre folle»; en 1486, l'archiduc Maximilien d'Autriche menace les frontières. La contestation princière prend pied dans le duché de Bretagne de François II. Menées par Louis de La Trémoille, en relation constante avec Anne, les armées royales remportent la bataille de Saint-Aubin-du-Cormier en juillet 1488, et Louis d'Orléans est fait prisonnier. En 1491, le mariage de Charles VIII avec la duchesse héritière Anne de Bretagne prépare le rattachement du duché au royaume.

À partir de 1488, Madame et son époux se consacrent plus particulièrement à la principauté bourbonnaise. En effet, à la mort du duc Jean II de Bourbon, Anne de France négocie avec le cardinal Charles de Bourbon: ce dernier renonce à l'héritage ducal en faveur de son frère, Pierre de Beaujeu, en échange d'une rente à vie sur la seigneurie du Beaujolais. Désormais ducs de Bourbon, Anne et Pierre vont faire de la cour de Moulins le brillant centre de leur puissance, d'autant que Charles VIII et Anne de Bretagne y séjournent souvent et que Pierre demeure second personnage du régime jusqu'à son décès. Après la mort précoce d'un petit garçon, Anne donne naissance à Suzanne en mai 1491. La représentation d'Anne de France, de Pierre II de Bourbon et de leur fille unique sur le retable du Maître de Moulins symbolise la puissance de la maison ducale à la fin du XVe siècle.

Veuve en octobre 1503, Anne de France continue de veiller avec soin sur les destinées bourbonnaises en arrangeant le mariage de Suzanne avec son cousin Charles de Montpensier, futur connétable de Bourbon, en mai 1505. Entre la mort du duc Pierre et le mariage de Suzanne, elle écrit un traité didactique à l'intention de sa fille pour lui rappeler ses devoirs de princesse, traité qui sera publié avec l'accord de Suzanne. En tant que duchesse douairière, elle participe activement à la gestion de la principauté bourbonnaise aux côtés de son gendre, à qui elle aurait conseillé, selon la déposition faite par l'évêque d'Autun au procès du connétable, de s'allier avec l'empereur Charles Quint contre le roi de France. Anne assiste à la rapide décadence de la lignée ducale: après la mort de Suzanne sans héritier en avril 1521, la succession bourbonnaise est contestée par la mère du roi de France, Louise de Savoie. Anne de France meurt à Chantelle le 14 novembre 1522 à soixante et un ans. Elle est enterrée auprès de son époux le 4 décembre dans la chapelle du prieuré de Souvigny.

L'historiographie a surtout retenu d'Anne de France qu'elle a été une femme de pouvoir dotée d'une forte personnalité. Pourtant, cette princesse a été également une bibliophile avertie, qui a collectionné et reçu la dédicace de plusieurs livres, et qui a pris la plume lors de son veuvage. On lui doit ainsi, outre le traité didactique adressé à sa fille Suzanne de Bourbon, une nouvelle qui remanie le Réconfort de Madame de Fresne écrit par Antoine de La Sale en 1457. Son château de Moulins, agrandi à partir de 1488, adopte de manière novatrice les influences italiennes de la Renaissance et abrite une importante librairie.

Oeuvres

- Entre 1503 et 1505 : Les Enseignements d'Anne de France duchesse de Bourbonnois et d'Auvergne à sa fille Susanne de Bourbon (vendus A la requeste de treshaulte et puissante princesse madame Suzanne de Bourbon...), Lyon, Le Prince, s.d. (rééd. sous le titre Enseignements moraux, Toulouse, Jehan Barril, 1535).
- Éd. A.-M. Chazaud, Les Enseignements d'Anne de France duchesse de Bourbonnois et d'Auvergne à sa fille Susanne de Bourbon; extrait d'une épistre consolatoire à Katerine de Neufville, dame de Fresne, sur la mort de son premier et seul filz (texte original publié d'après le manuscrit unique de Saint-Pétersbourg aujourd'hui perdu, et suivi des catalogues des bibliothèques du duc de Bourbon existant au XVIe siècle, tant à Aigueperse qu'au château de Moulins, et d'un glossaire; reproduction des 19 miniatures originales d'après les dessins de M. A. de Queyroy), Moulins, C. Desrosiers, 1878; Marseille, Laffitte reprints, 1978.

Choix bibliographique

- Chombart de Lauwe, Marc, Anne de Beaujeu ou la passion du pouvoir, Paris, J. Tallandier, 1980.
- Pélicier, Paul, Essai sur le gouvernement de la dame de Beaujeu, 1483-1491, Genève, Slatkine reprints, 1970 [Chartres, 1882].
- Pradel, Pierre, Anne de France, 1461-1522, Paris, Publisud, 1986.
- Viennot, Éliane, «Une nouvelle d'Anne de France: l'histoire du siège de Brest», in Jean Lecointe, Catherine Magnien, Isabelle Pantin et Marie-Claire Thomine (dir), Devis d'amitié. Mélanges en l'honneur de Nicole Cazauran, Paris, Honoré Champion, 2002, p.139-150.
- Viennot, Éliane, «Gouverner masqués: Anne de France, Pierre de Beaujeu et la correspondance dite "de Charles VIII"», in L'Épistolaire au XVIe siècle, Cahiers L.-V. Saulnier, 18, Paris, Éditions de la Rue d'Ulm, 2001.

Choix iconographique

- «Le Maître de Moulins», Anne de France présentée par saint Jean l'Évangéliste et Suzanne de Bourbon (huile sur bois), vers 1492/1493?, Paris, Musée du Louvre [fragments d'un volet droit qui faisait face à un volet gauche où figurait Pierre II de Bourbon présenté par saint Pierre] -- Châtelet, Albert, Jean Prévost. Le Maître de Moulins, Gallimard, 2001, p.91.
- «Le Maître de Moulins», Triptyque de la Vierge en gloire (huile sur bois), vers 1497/1500. Moulins, cathédrale Notre-Dame [avec le duc Pierre, la duchesse et sa fille sur la face intérieure des volets; à droite, Anne de France et Suzanne sont agenouillées en prière et présentées par sainte Anne] -- Châtelet, voir supra, p.103-121; Le Duché de Bourbon, des origines au Connétable, Saint-Pourçain-sur-Sioule, Bleu Autour, 2001, p.120.
- Anne de France en compagnie de sa fille Suzanne (enluminure), Saint-Pétersbourg (fol.1) [assises côte à côte, les deux femmes lisent sous le regard attentif des suivantes rassemblées au fond de la scène] -- Les Enseignements d'Anne de France..., éd. A.-M. Chazaud, voir supra, OEuvres).

Jugements

- «Qui vouldra veoir le mirouer des dames
Et le patron ou chascune regarde,
Qui vouldra veoir la regente des femmes,
Et le guidon [«étendard»] ou toutes prenent garde,
Qui leur honneur preserve et contregarde,
A son povoir de honte et dommage;
Nulle ne vit qui ne luy doye homage
Comme a princesse excellent, souveraine,
Sans excepter ne duchesse

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