Catherine II de Russie
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Catherine II de Russie | ||
Titre(s) | Impératrice de Russie | |
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Conjoint(s) | Pierre II, tsar de Russie | |
Dénomination(s) | Sophie Augusta Fredericka d'Anhalt-Zerbst Figchen la Grande Catherine | |
Biographie | ||
Date de naissance | 1729 | |
Date de décès | 1796 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
Sommaire
Notice de Elena Gretchanaia, 2006
Catherine II est née le 21 avril/2 mai 1729, à Stettin (Pologne). Baptisée Sofie-Frédérique-Auguste, elle est la fille du prince Christian-Auguste d'Anhalt-Zerbst et de sa femme Johanne-Élisabeth, née princesse de Schleswig-Holstein. Elle reçoit une éducation française.
En février 1744, elle vient en Russie avec sa mère sur l'invitation de l'impératrice Élisabeth Petrovna. En juin de la même année, elle se convertit à la religion orthodoxe sous le nom de Catherine Alexeïevna et, le 25 août 1745, elle épouse le grand-duc Pierre Fedorovitch, héritier du trône russe. Leur fils unique Paul (futur empereur) naît en 1754. Catherine n'est guère heureuse dans son ménage, mais elle supporte tout pour acquérir les faveurs du public russe, ce à quoi elle parvient avec éclat.
Après la mort d'Élisabeth Petrovna, Catherine réussit, le 28 juin/8 juillet 1762, en s'appuyant sur la garde impériale, à renverser son mari, devenu empereur, et à se proclamer souveraine de Russie. L'assassinat de Pierre par les complices de Catherine menaçant de ternir son règne, elle tâche de s'imposer comme souveraine éclairée. Entretenant une correspondance avec Voltaire, d'Alembert et Grimm, elle propose d'imprimer l'Encyclopédie en Russie, invite les deux premiers et Diderot à Saint-Pétersbourg (seul Diderot accepte cette invitation en 1773), achète la bibliothèque de Diderot (la laissant à sa disposition tant qu'il est en vie) et celle de Voltaire (après sa mort), finance la rédaction de la Correspondance littéraire de F.-M. Grimm. Sur son invitation, le sculpteur français É.-M. Falconet érige à Saint-Pétersbourg la statue de Pierre le Grand, grand-père de son époux, devenue symbole de la ville.
À l'intérieur, Catherine II entame une série de réformes, en rédigeant le projet d'un nouveau code de lois (Instruction). Son époque devient l'âge d'or de la noblesse russe. Elle favorise le développement des sciences et des arts, fait ouvrir plusieurs établissements d'enseignement, notamment le premier Institut des filles nobles. Elle affermit la monarchie absolue. Ses nombreux favoris n'ont pas de réel pouvoir. À l'extérieur, les guerres avec la Turquie permettent d'annexer la Crimée et d'autres territoires au sud de l'Empire russe. À la suite du partage de la Pologne, la Russie occupe des territoires considérables à l'ouest.
Grande intellectuelle, Catherine II traduit un chapitre du roman de Marmontel Bélisaire. Elle rédige également un ouvrage en français, Antidote (dirigé contre le Voyage en Sibérie de Chappe-d'Auteroche où la Russie était présentée sous des couleurs bien sombres), des notes sur l'histoire russe et de nombreuses comédies dans les deux langues. Ses oeuvres publiées ne sont pas signées, ce qui rend parfois difficile leur attribution. En 1769, elle fonde la revue littéraire Vsiakaïa vsiatchina [Un pot-pourri]. En 1771, elle commence à écrire ses Mémoires, qu'elle reprend ensuite en 1791 et que, selon toute évidence, elle retravaille jusqu'à la fin de sa vie. Le texte s'arrête vers 1759-1760, avant l'avènement de Catherine au trône, et la présente comme une forte personnalité, inspirée par la plus grande ambition, souffrant de la malveillance de son mari et de la tzarine Élisabeth, mais qui réussit à s'élever au-dessus de ces contingences. Il existe sept rédactions des Mémoires. La version réputée la plus achevée est publiée en traduction russe en 1858, les autres sont publiées en français en 1907. Catherine II décède le 5/16 novembre 1796, à Saint-Pétersbourg.
De son vivant, Catherine II a été perçue par ses sujets comme une vraie «mère», tandis qu'en Europe elle a été jugée diversement. Les encyclopédistes, et surtout Voltaire, ont entretenu le mythe de la "Minerve du Nord", souveraine éclairée d'un jeune État. D'autres, pour qui la Russie restait un pays barbare, ont véhiculé de son impératrice des représentations négatives (C.-C. Rulhière, J.-H. Castéra). Après sa mort sont apparus des jugements plus équilibrés, fondés sur une meilleure connaissance de la personnalité de l'impératrice (le prince de Ligne, le comte de Ségur).
Si l'image de Catherine II comme souveraine de la Russie continue de se préciser grâce aux recherches historiques, l'étude de son oeuvre littéraire n'a commencé que ces dernières années et demeure encore insuffisante.
Oeuvres
En français
- 1756-1757 : Lettres à Charles Hanbury Williams. In S. Goriainov (éd.), Perepiska velikoï kniagini Ekateriny Alekseïevny i angliïskogo posla sera Ch.H. Willamsa [Correspondance de la grande-duchesse Catherine Alexeïevna et de l'ambassadeur anglais sir Charles H. Williams], Moscou, imperatorskoïe obchtchestvo istorii, 1909.
- 1761-1794 : Lettres à la princesse Dachkova. In Princesse Dachkova, Mon Histoire: Mémoires d'une femme de lettres russes à l'époque des Lumières. Alexandre Worontsoff-Dachkoff, Catherine Le Gouis, Catherine Worontsoff-Dachkoff (éd.), Paris, L'Harmattan, 1999, p.227-254.
- 1762-1764 : Lettres à d'Alembert. In Lettre à d'Alembert du 13 novembre 1762, s.l.n.d., Istoritcheskiï vestnik [Messager d'histoire], 1884, no 4, p.134-135, 139-142.
- 1763-1778 : Lettres à Voltaire. In Voltaire, Correspondence and Related Documents, Théodore Besterman (éd.), Genève-Oxford, 1973-1976, t.26-45.
- 1767-1778 : Lettres à É.-M. Falconet. In Louis Réau (éd.), Correspondance de Falconet avec Catherine II. 1767-1778, Paris, Champion, 1921.
- 1769 : Instruction de sa Majesté Impériale Catherine II pour la commission chargée de dresser le projet d'un nouveau code de lois, Saint-Pétersbourg, pri Imperatorskoï Akademii naouk.
- 1769-1791 : Lettres à Grigoriï Potemkine. In V.S. Lopatine (éd.), Ekaterina II i G.A. Potemkine: Litchnaia perepiska [Catherine II et G.A. Potemkine: correspondance privée], Moscou, Naouka, 1997 (une partie des lettres est en français).
- 1770 : Antidote, ou Examen du mauvais livre superbement imprimé intitulé "Voyage en Sibérie fait par ordre du roi en 1761 contenant les moeurs, les usages des Russes... par m. l'abbé Chappe d'Auteroche. T.1-2. s.l., s.d. [Saint-Pétersbourg] (seconde édition: Amsterdam, Rey, 1771).
- 1770-1780 : Lettres au prince Henri de Prusse. In R. Kranel (éd.), Briefwechsel zwischen Heinrich, Prinz von Preussen, und Katharina II, von Russland, Berlin, A. Duncker, 1903.
- 1771, 1791 : Mémoires. In Ekaterina II, Sotchineniïa [OEuvres], A.N. Pypine (éd.), Saint-Pétersbourg, tipografia imperatorskoï Akademii naouk, 1907, t.12; Pierre Audiat, Dominique Maroger (éd.), Paris, Le Livre Club du libraire, 1959.
- 1771-1792 : Lettres à Gustave III. In G. von Proschwitz (éd.), Catherine II et Gustave III: une correspondance retrouvée, Varnamö, National Museum, 1998.
- 1772-1774 : Lettres à Frédéric le Grand et à la Landgrave Caroline de Hesse-Darmstadt. In Alexandrine Keyserlig (éd.), Um eine deutsche Prinzessin. Ein Briefwechsel Friedrichs des Grossen, der Landgräfin Karolina von Hessen-Darmstadt und Katharinas II von Russland (1772-1774), Hamburg, Köhler, 1935.- 1773-1793: Lettres au comte Stakelberg. Mikhaïl Semevskiï (éd.), Saint-Petersbourg, V. Golovine, 1871.
- 1774-1790 : Lettres à Joseph II. In A. Ritter von Arneth (éd.) Joseph II und Katarine von Russland. Ihr Briefwechsel, Vienne, Braumüller, 1869.
- 1774-1796 : Lettres à Frédéric Melchior Grimm. In I. Grot (éd.), Sbornik Imperatorskogo Rousskogo istoritcheskogo obchtchestva, Saint-Pétersbourg, 1878, t.23.
- 1780-1796 : Lettres au prince de Ligne. In Princesse Charles de Ligne (éd.), Lettres de Catherine II au Prince de Ligne (1780-1796), Bruxelles, G. Van Oest, 1924.
- 1781-1782 : Lettres au grand-duc Paul Petrovitch et à la grande-duchesse Maria Fedorovna, in Sbornik Imperatorskogo Rousskogo istoritcheskogo obchtchestva, Saint-Pétersbourg, 1872, t.9.
- 1783 : Stiepan-Annibale d'Albanie à Frédéric Guillaume de Prusse, épître pathétique, historique, etc., ou l'Alcoran des princes destinés au trône, traduit de la dixième édition italienne par main de maître, Saint-Pétersbourg, impr. de l'Académie impériale.
- 1784 : Instructions de S.M. l'Impératrice Catherine II à son Altesse le maréchal Prince de Soltykoff, chargé par Elle de présider à l'éducation des grands-ducs Alexandre et Constantin. M. Fursi-Lainé Melansko (éd.), Paris, impr. de J. Smith, 1821 (Bibliothèque russe, t.1, 1re partie).
- 1785-1792 : Lettres à Johan Georg Zimmermann. In Eduard Bodemann (éd.), Briefwechsel zwischen der Kaiserin Katharina II von Russland und Johan Georg Zimmermann, Hanovre-Leipzig, Hahn, 1906.
- 1787 : L'Amant ridicule [en collaboration avec le prince de Ligne] (comédie), in Théâtre de l'Hermitage de Catherine II, impératrice de Russie, composé par cette princesse, par plusieurs personnes de sa société intime, et par quelques ministres étrangers, Paris, Gide, s.d. [1792]; Paris, Buisson, 1799.
- 1787 : Le Tracassier (comédie),, in Théâtre de l'Hermitage, voir supra.
- 1787-1796 : Lettres au prince Soltykov, in Instructions de S. M. l'Impératrice Catherine II à son Altesse le maréchal Prince de Soltykoff, voir supra, p.147-153.
- 1788 : L'Insouciant [en collaboration avec A. Dmitriev-Mamonov] (comédie),, in Théâtre de l'Hermitage, voir supra.
- 1788 : Le Flatteur et les flattés (comédie),, in Théâtre de l'Hermitage, voir supra.
- 1788 : Qu'il n'y a point de mal sans bien (comédie), in Théâtre de l'Hermitage, voir supra.
- 1788 : Le Voyage de Monsieur Bontemps (comédie), in Théâtre de l'Hermitage, voir supra.
- 1788 : La Rage aux proverbes (comédie), in Théâtre de l'Hermitage, voir supra.
- 1791-1792 : Lettres à Léopold II. In Adolf Beer (éd.), Leopold II, Franz II und Catharina, ihre Correspondenz, nebst einer Einleitung zur Geschichte der Politik Leopold's II, Leipzig, Duncker und Humblot, 1874.
- 1792-1794 : Lettres à François II, in Leopold II, Franz II und Catharina, voir supra.
- Les plus belles lettres de Catherine II. Georges Oudard (éd.), Paris, Calman-Levy, 1962.
En russe
- [années 1770] : O vremia ! [Oh, le temps !], comédie en trois actes, Saint-Pétersbourg, Senatskaia tipografiïa, s.d.
- 1774 : Gospoja Vestnikova s semieiu [Madame Vestnikova avec sa famille], comédie en un acte, Saint-Pétersbourg, Senatskaia tipografiïa.
- 1774 : Imianiny gospoji Vortchalkinoï [La fête de Madame Vortchalkina], comédie en cinq actes, Saint-Pétersbourg, Senatskaia tipografiïa.
- 1781 : Skazka o tsarevitche Khlore [Conte du prince Chlore], Saint-Pétersbourg, tipografiïa Akademii naouk.
- 1785 : Obmanchtchik [L'imposteur], Saint-Pétersbourg, tipografiïa Akademii naouk.
- 1786 : Chamane sibirskiï [Le chaman de Sibérie], Saint-Pétersbourg, tipografiïa Akademii naouk.
- 1787-1794 : Zapiski kassatelno rossiïskoï istorii [Notes sur l'histoire russe], parties I-VI, Saint-Pétersbourg, imperatorskaïa tipografiïa.
traduction du français vers le russe
- 1768 : traduction du chapitre IX du roman de Marmontel Bélisaire, in Velizer, sotchinenie gospodina Marmontela, tchlena Frantsouzskoï akademii, pereveden na Volge [Bélisaire, oeuvre de Monsieur Marmontel, membre de l'Académie française, traduite sur la Volga], Moscou, pri Imperatorskom Moskovskom Universitete [réédité en 1773 et 1785] -- Éd. A. N. Pypine, in Ekaterina II, Sotchineniïa, voir supra, t.5, 1903.
Choix bibliographique
- Babitch, N.V., Babitch, M.V., Lapteva, T.A. Ekaterina II. Annotirovannaïa bibliografiïa poublikatsiï [Catherine II. Bibliographie annotée des écrits publiés]. Moscou, Rosspen, 2004.
- Carrère d'Encausse, Hélène. Catherine II: un âge d'or pour la Russie. Paris, Fayard, 2002.
- Davidenkoff, A. (dir.), Catherine II et l'Europe. Paris, Institut d'Études slaves, 1997.
- Madariaga, Isabel de. Russia in the age of Catherine the Great. London/New-Haven, Yale University Press, 1981.
- Raeff, Marc (dir.), Catherine the Great: a Profile. Londres, Macmillan, 1972.
Choix iconographique
- Lampi l'Ancien, Jean-Baptiste. Portrait de Catherine la Grande (huile sur toile), 1794. Saint-Pétersbourg, Musée de l'Ermitage -- Catherine II et l'Europe.
- Levitskiï Dimitri. Portrait de Catherine II au Temple de la déesse de la Justice (huile sur toile), 1783. Moscou, Galerie d'État Tretiakov.
Jugements
- «Si le sexe de Catherine-le-Grand lui eût permis l'activité d'un homme, qui peut tout voir par lui-même, se porter partout, entrer dans tous les détails, il n'y aurait pas un seul abus dans son empire. À la partie près de ces détails, elle fut sans doute plus grande que Pierre Ier [...] le rôle de l'impératrice allait le mieux à son visage, à sa démarche, à l'élévation de son âme, et à l'immensité de son génie aussi vaste que son empire. [...] Ses ouvrages frivoles, comme ses comédies, par exemple, avaient un but moral, comme la critique des voyageurs, des gens à la mode, des sectes et surtout des Martinistes, qu'elle croyait dangereux. [...] Il y a dans son style plus de clarté que de légèreté. Ses ouvrages sérieux sont profonds. [...] Mais les petites nuances, le charme des détails, le coloris, n'étaient pas son fort» (Prince de Ligne. Catherine II [1796], in Mémoires, lettres et pensées, Paris, François Bourin, 1989, p.760-761, 766).
- «Usurpatrice du trône qu'elle voulait conserver, elle fut obligée de caresser ses complices: ils avaient par leur crime acheté l'impunité. Etrangère dans l'empire où elle régnait, elle chercha à s'identifier avec la nation, en adoptant, en flattant même ses goûts et ses préjugés. Catherine sut quelquefois récompenser, elle ne sut jamais punir; et ce ne fut qu'en laissant abuser de son pouvoir qu'elle parvint à la conserver. Elle eut deux passions qui ne moururent qu'avec elle: son amour pour l'homme, qui dégénéra en libertinage, et son amour pour la gloire, qui dégénéra en vanité. La première de ses passions ne la domina jamais au point d'en faire une Messaline; mais elle prostitua souvent sa grandeur et son sexe: elle resta par habitude ce qu'elle avait été par tempérament. La seconde lui fit entreprendre des choses louables qui furent rarement achevées, et des guerres injustes qui lui laissent au moins cette espèce de gloire qu'on ne peut refuser aux grandes entreprises et aux heureux succès. La générosité de Catherine, l'éclat de son règne, la magnificence de sa cour, ses instituts, ses monuments, ses guerres, sont pour la Russie ce que le siècle de Louis XIV fut pour l'Europe» (C.-F.-P. Masson. Mémoires secret sur la Russie, et particulièrement sur la fin du règne de Catherine II et sur celui de Paul Ier, T. I, Paris, chez Levrault, Schoell et Compagnie, 1804, p. 81-82).
- «Lorsqu'on peint Catherine, ses faiblesses sont les ombres de ce grand tableau; mais elles laissent au moins briller la générosité de son caractère. Peu de femmes, revêtues d'un pouvoir absolu, montreraient autant de modération, en voyant leurs sentiments trahis et leur amour-propre blessé. Cet empire qu'elle savait prendre sur son courroux est d'autant plus louable, qu'elle était naturellement, comme elle me l'a dit plusieurs fois, très vive et même violente. [...] Ne doit-on pas juger avec quelque indulgence les erreurs de cette femme, nommée Catherine le Grand par le prince de Ligne, lorsqu'elle montrait à la fois dans sa conduite tant de fierté, de douceur et de magnanimité?» (Comte de Ségur. Mémoires ou souvenirs et anecdotes, par M. le Comte de Ségur, T. 3,Paris, Alexis Eymery, 1826, p. 497-498).