Marie-Anne Botot Dangeville/Henri Lyonnet
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[56] C'est Mademoiselle Dangeville la jeune, la plus célèbre de toute cette tribu des Botot dits Dangeville, qui donna plus de six artistes de ce nom au théâtre. Filleule de Mademoiselle Duclos, la tragédienne, «enfant de la balle», la petite Marie-Anne monta sur les planches dès l'âge le plus tendre. Son père lui apprenait la danse, sa mère, son oncle, sa tante, la tragédie et la comédie. A quinze ans, elle était admise à partager l'emploi des soubrettes avec Mademoiselle Quinault la cadette.
Douée d'une physionomie charmante et fine, de traits réguliers, vifs et pleins d'expression, Mademoiselle Dangeville offrait dans sa personne l'ensemble le plus flatteur. [57] Garrick disait d'elle qu'elle avait le vrai génie de son art et qu'elle y joignait tout ce que l'esprit et le goût peuvent ajouter au génie. Voltaire prétendait qu'il y avait en elle de quoi faire cinq ou six actrices. Dorat rimait en son honneur:
Il me semble la voir l'oeil brillant de gaîté,
Parler, agir, marcher avec légèreté;
Piquante sans apprêt et vive sans grimace,
A chaque mouvement découvrir une grâce,
Sourire, s'exprimer, se taire avec esprit,
Joindre le jeu muet à l'éclair du débit,
Nuancer tous les tons, varier sa figure,
Rendre l'art naturel et parer la nature.
D'un caractère doux et conciliant, Mademoiselle Dangeville, en dehors du théâtre, ne se mêla jamais à aucune intrigue. Charitable, elle avait recueilli chez elle une petite-fille du grand Baron, tombée dans la misère. Après avoir passé trente ans au théâtre, Mademoiselle Dangeville jouissait d'une pension de la Comédie et d'une autre sur la cassette particulière du roi; héritière de dons du Duc de Praslin, Mademoiselle Dangeville vécut très vieille, jusqu'au 29 février 1796. Elle avait eu le rare honneur d'assister à son apothéose et de voir Mademoiselle Joly couronner son buste en public. Le Musée de la Comédie-Française possède ce buste en marbre de J.-B. Le Moyne, et un des portrait d'elle de Vigée père dans les Trois Cousines.
Ces deux comédiennes ont fourni le sujet de pièces de théâtre à l'époque où, au commencement du [58] XIXe siècle, on était très friand de comédies-vaudevilles dont les actrices du temps passé étaient les héroïnes.
[Portraits:
- «Mademoiselle Dangeville, par La Tour», pl. 30, p.63
- «Mademoiselle Dangeville dans Les trois Cousines par Louis Vigée (Comédie Française)», pl.31, p.66]