Claude le Hain
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Claude le Hain | ||
Conjoint(s) | Guillaume Colletet, Jean Morain | |
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Dénomination(s) | Claudine, Mlle Colletet, Mademoiselle C. | |
Biographie | ||
Date de naissance | 1634 | |
Date de décès | 1660 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
Notice de Claudine Nédelec, 2025
Fille de Jean le Hain, « bourgeois de Paris » et de Marguerite Hubert, née en 1634, Claude le Hain devient à 16 ans, le 19 novembre 1652, la troisième femme de Guillaume Colletet (1598-1659 – il a donc alors 54 ans), un des premiers membres de l’Académie française, poète assez réputé qui lui a dédié dans ses Poésies diverses une série de 54 sonnets amoureux, voire érotiques, intitulée « Les Amours de Claudine », prénom sous lequel il la désigne. Il la dépeint comme charmante, spirituelle et... vierge. Elle avait d’abord été sa femme de chambre, comme d’ailleurs sa première femme, Marie Prunelle (morte en 1641), et sa « seconde » (il ne l’épousa pas), Michelle Soyer, morte en 1651, dont Claudine était peut-être la nièce. Ces mariages faisaient évidemment faire des gorges chaudes dans les milieux lettrés et mondains. Voici ce qu’écrit Urbain Chevreau, écrivain polygraphe (1613-1701) : « Il était naturellement voluptueux, et pour le tenter, il ne fallait être ni belle ni jeune. Comme il ne voulait point être en scandale à son voisinage, et qu’il ne pouvait vivre sans quelque servante, il épousait celle qu’il avait prise, et qui n’était pas plutôt morte qu’il en cherchait quelque autre dont il ne manquait pas de faire sa femme » (Chevraeana). Pourtant, Claudine, que tout le monde décrit comme aussi spirituelle que belle, fut vite recherchée dans le petit monde littéraire parisien : un cercle d’admirateurs (voire d’amants) se rassemble autour d’elle, dont plusieurs poètes, que Pinchesne dénomme « les sept Sectateurs de Claudine » dans ses Chroniques des chapons et des gélinottes du Mans, où elle tient une grande place comme hôtesse, mais aussi comme « Nymphe savante », « autre Sapho », chanteuse, muse et poète. François Colletet (1628-1680 ?), fils du premier mariage de Guillaume, lui-même poète et littérateur, écrivit lui aussi des poèmes à sa louange. Plusieurs poésies signées « C. » ou « Mademoiselle C. » ont paru dans divers recueils : selon le chroniqueur Tallemant des Réaux, « Cette Claudine fait mieux des vers que lui [Colletet] ». Le manuscrit des Chroniques contient l’autographe d’une réponse versifiée à un madrigal du comte de Saint-Aignan à « l’illustre Claudine ». La Fontaine n’est pas cité dans les Chroniques : il lui dédia pourtant une épigramme élogieuse. Mais, dès la mort de G. Colletet, le bruit courut qu’elle n’avait été en fait que son prête-nom : même son poème d’adieu à son mari, cité par Tallemant, où elle dit « J’ensevelis mon cœur et ma plume avec vous » est réputé avoir été écrit d’avance par lui pour annoncer son futur silence ! Et La Fontaine se rétracte. Selon Tallemant, après cette mort, « insensiblement elle se décria très fort » ; son beau-fils lui reprocha la vente de la bibliothèque de son père, et, toujours pour Tallemant, « On trouva que ce qu’elle avait fait de vers était pitoyable, mais que ses galants les raccommodaient. Elle devint misérable [...] : elle épousa un je ne sais qui. [...] Elle buvait comme un templier; et enfin elle mourut saoule ». Ce « je ne sais qui » était Jean Morain, « bourgeois de Paris ». Claudine a-t-elle été à la fois écrivaine et galante ? Peut-être, peut-être pas. Mais la réputation que lui firent les contemporains est assez emblématique des préjugés sociaux du temps : une jolie jeune femme entourée de galants ne saurait être que légère, et une servante ne saurait être capable d’écrire de la poésie !