Françoise d'Issembourg d'Happencourt/Fortunée Briquet : Différence entre versions
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GRAFIGNY, (Françoise d'Issembourg-d'Happoncourt, Dame de) née à Nancy en 1694, épousa François Huguet de Grafigny, chambellan du duc de Lorraine. Cette union ne fut point heureuse. Son époux était d'un caractère violent et emporté; elle se vit obligée de s'en faire séparer juridiquement. Après la mort de ses enfans et de leur père, elle se rendit, en 1740, à Paris, où son mérite ne tarda point à être connu. Les qualités de son coeur et de son esprit lui firent des amis illustres. L'empereur et l'impératrice-reine de Hongrie et de Bohème avaient pour elle une estime particulière, et la gratifièrent de plusieurs présens. L'Académie de Florence se l'associa. On trouve, dans le Cours de Littérature de Laharpe, l'anecdote suivante: «Le cinquième acte d'Oreste, que Voltaire avait trop fidèlement imité du grec, fut mal reçu par le public de Paris: C'est pourtant Sophocle, disait l'auteur à Madame de Grafigny; elle lui répondit, en parodiant un vers des Femmes Savantes:
Excusez-nous, Monsieur, nous ne sommes pas Grecs.
Elle avait raison. Quand on fait des tragédies en France, il faut les faire pour des Français, et Voltaire le sentit; car il refit un autre cinquième acte». Madame de Grafigny mourut à Paris le 12 décembre 1758.
Une société de gens de lettres engagea Madame de Grafigny à leur fournir quelques pièces pour le Recueil de ces Messieurs, Amsterdam, 1745, in-12. Elle leur donna une nouvelle espagnole, intitulée: Le mauvais exemple produit autant de vertus que de vices. Ce roman déplut à quelques-uns des associés. Madame de Grafigny, blessée des critiques que sa production essuya, résolut d'y répondre par un ouvrage meilleur que le premier. Elle composa les Lettres d'une Péruvienne, 1747; 1749, in-12; 1752, 2 vol. in-12; traduit en italien par Deodati, 1759, 2 vol. in-12; trad. en anglais par Robert; Londres, Cadell, 1775. La traduction en italien de Deodati a été imprimée plusieurs fois. L'édition de 1797 est ornée du portrait de Madame de Grafigny, gravé par Gaucher. Peu de romans sont aussi agréable que les Lettres péruviennes. Leur auteur ajouta à sa gloire, en publiant Cénie, comédie en cinq actes et en prose; Paris, Cailleau, 1751, in-12. Cette pièce, jouée pour la première fois le 25 juin 1750, eut 14 représentations, et 11 à la reprise qui eut lieu le 18novembre de la même année. Elle a été mise en vers par de Long-champs et traduite en italien. Hugues Blair, en parlant de la Comédie sérieuse ou touchante, n'a point oublié de mettre Cénie au nombre de celles qui en France ont du mérite et de la réputation. Rousseau lui-même, (Lettre à d'Alembert) rend hommage aux talens de Madame de Grafigny. On lui doit encore la Fille d'Aristide, comédie en cinq actes et en prose, représentée pour la première fois le 29avril 1758; Paris, Duchesne, 1759, in-12. Cette pièce, dédiée à l'impératrice-reine de Hongrie et de Bohème, est dans le genre de Cénie, sans en avoir le mérite. On y reconnaît cependant le style gracieux de l'auteur. -- Azor, féerie en un acte. -- OEuvres posthumes, contenant Ziman et Zenise, suivi de Phaza, comédies en un acte et en prose; Amsterdam, 1770, in-12. Ces deux pièces furent représentées à Vienne par les enfans de l'empereur. Madame de Grafigny adressa les vers suivans au chevalier d'Arcq, en lui envoyant une écritoire:
Chassé honteusement du temple de mémoire,
Un écrivain bas et jaloux,
Sur le bureau du dieu qui rédige l'histoire,
En s'en allant, dit-on, vola cette écritoire:
Si c'est un fait, elle est à vous.