Élisabeth d'Aliès de Mondonville, présidente Du Bourg : Différence entre versions

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De la vaste correspondance de la présidente se dégagent les remarquables échanges poursuivis pendant trente ans avec son amie parisienne la marquise de Livry, veuve d’un premier maître d’hôtel du roi. S’y lit notamment la passion du public des années 1780 pour les aérostats et montgolfières d’abord, puis pour le magnétisme animal introduit par Mesmer en 1778. Les épistolières offrent ici une véritable tribune scientifique, la marquise manifestant son scepticisme, tandis que Mme Du Bourg, enthousiaste, cherche à s’investir activement dans cette pratique thérapeutique qui rejoint son intérêt pour les questions médicales, autant que son souci de faire œuvre charitable. Mathias et Joseph partagent ses convictions. Depuis Paris, la marquise transmet toutes les nouvelles et les ouvrages circulant sur le sujet, devenant de facto passeuse de savoir. Mathias de son côté se forme au magnétisme à la Société de la Concorde de Lyon dont font partie plusieurs Élus Coën adeptes d’Amand de Puységur : ce neveu d’une des amies proches de la marquise de Livry, disciple de Mesmer, a découvert en 1784 comment induire le somnambulisme magnétique, prémices de l’hypnose. La présidente, bravant une fois de plus le préjugé, magnétise bientôt à Toulouse avec ses deux fils, utilisant le baquet comme Mesmer autant que le somnambulisme magnétique comme Puységur. L’agentivité des épistolières fait ainsi de leurs lettres une source précieuse pour l’histoire du magnétisme au féminin.
 
De la vaste correspondance de la présidente se dégagent les remarquables échanges poursuivis pendant trente ans avec son amie parisienne la marquise de Livry, veuve d’un premier maître d’hôtel du roi. S’y lit notamment la passion du public des années 1780 pour les aérostats et montgolfières d’abord, puis pour le magnétisme animal introduit par Mesmer en 1778. Les épistolières offrent ici une véritable tribune scientifique, la marquise manifestant son scepticisme, tandis que Mme Du Bourg, enthousiaste, cherche à s’investir activement dans cette pratique thérapeutique qui rejoint son intérêt pour les questions médicales, autant que son souci de faire œuvre charitable. Mathias et Joseph partagent ses convictions. Depuis Paris, la marquise transmet toutes les nouvelles et les ouvrages circulant sur le sujet, devenant de facto passeuse de savoir. Mathias de son côté se forme au magnétisme à la Société de la Concorde de Lyon dont font partie plusieurs Élus Coën adeptes d’Amand de Puységur : ce neveu d’une des amies proches de la marquise de Livry, disciple de Mesmer, a découvert en 1784 comment induire le somnambulisme magnétique, prémices de l’hypnose. La présidente, bravant une fois de plus le préjugé, magnétise bientôt à Toulouse avec ses deux fils, utilisant le baquet comme Mesmer autant que le somnambulisme magnétique comme Puységur. L’agentivité des épistolières fait ainsi de leurs lettres une source précieuse pour l’histoire du magnétisme au féminin.
 
La Révolution bouleverse rapidement la vie familiale. L’abbé Philippe devient le chef de file du clergé réfractaire de toute la région toulousaine. Joseph et Bruno émigrent en Espagne où ils rejoignent l’armée des princes. La présidente assiste à l’emprisonnement des parlementaires toulousains parmi lesquels se trouve son fils Mathias. Il meurt guillotiné à Paris le 14 juin 1794, âgé de 48 ans. Élisabeth décède le 19 novembre de la même année.
 
La Révolution bouleverse rapidement la vie familiale. L’abbé Philippe devient le chef de file du clergé réfractaire de toute la région toulousaine. Joseph et Bruno émigrent en Espagne où ils rejoignent l’armée des princes. La présidente assiste à l’emprisonnement des parlementaires toulousains parmi lesquels se trouve son fils Mathias. Il meurt guillotiné à Paris le 14 juin 1794, âgé de 48 ans. Élisabeth décède le 19 novembre de la même année.
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==Principales sources==
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* Correspondance inédite de la présidente Du Bourg (Archives municipales de Toulouse, fonds Du Bourg, sous-série 5 S).
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* Clément Tournier, ''Le mesmérisme à Toulouse, suivi de Lettres inédites sur le XVIIIe siècle, d’après les archives de l’hôtel Du Bourg'', Toulouse, Imprimerie Saint-Cyprien, 1911, 194 p. L’étude sur le magnétisme s’arrête à la page 26. La publication des lettres couvre les pages 27 à 170.
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* Saint-Martin, Louis-Claude de, ''Lettres aux Du Bourg : 1776-1785'', éd. Robert Amadou, Boulogne-Billancourt, L'Initiation, 1977, 89 p.
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==Choix bibliographique==
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* Dousset, Christine, « La Présidente du Bourg : diffuser et mettre en pratique ses lectures. Réflexions à partir d’un exemple toulousain », dans Plagnol-Diéval, M.-E. et Brouard-Arends I. (dir)., ''Femmes éducatrices au siècle des Lumières'', Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007, p. 75-92.
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* Dousset, Christine, « De la gazette à l'intime : les lettres de Madame de Livry à la présidente Dubourg (1763-1792) », dans Mouysset, S., Bardet J.-P. et Ruggiu F.-J. (dir.), ''"Car c'est moy que je peins" : écritures de soi, individu et liens sociaux (Europe, XVe-XXe siècle)'', Toulouse, CNRS : Université de Toulouse-Le Mirail, 2011, p. 163-174.
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* Dousset, Christine, « Une Mère et ses fils dans la seconde moitié du XVIIIe siècle : la correspondance familiale de la présidente Dubourg », dans Daumas, M. (dir.), ''Thèmes et figures du for privé'', Presses universitaires de Pau et des Pays de l’Adour, 2012, p. 125-140.
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* Havelange, Isabelle, « De Paris à Toulouse : le magnétisme animal dans les lettres de la marquise de Livry à la présidente du bourg, 1779-1788 », ''Annales historiques de la Révolution française'', 2023, n° 2 (412), p. 3-26.
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* Marquise de Livry, ''Lettres à la présidente Du Bourg (1779-1792). De Paris à Toulouse'', édition d’Isabelle Havelange. Paris, Classiques Garnier, 2023, 623 p.
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Version du 22 mars 2025 à 14:55

Élisabeth d'Aliès de Mondonville, présidente Du Bourg
Conjoint(s) Du Bourg, Valentin (1720-1778)
Dénomination(s) présidente Du Bourg, présidente du Bourg, présidente Dubourg
Biographie
Date de naissance 28 décembre 1721
Date de décès 19 novembre 1794
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice d' Isabelle Havelange, 2025

Née le 28 décembre 1721 à Toulouse, Élisabeth est la fille de François d’Aliès, seigneur de Mondonville, conseiller au parlement de Toulouse, et de Jeanne de Brunet de Pujols de Castelpers, dont la propre mère est née La Croix de Castries.
En 1745, Élisabeth épouse Valentin Du Bourg, conseiller au parlement de Toulouse, issu comme elle de la vieille noblesse catholique languedocienne. En 1764, son époux devient président à mortier de la troisième chambre des enquêtes. En 1771, l’opposition de ce dernier à la réforme de la justice et des parlements du chancelier Maupeou entraîne son exil et celui de sa famille dans leur château de Rochemontès sis dans la commune de Seilh, proche de Toulouse. En 1775, après la disgrâce du ministre Maupeou et le retour des parlements, Valentin Du Bourg quitte sa charge et devient conseiller d’honneur. Quatorze enfants au moins sont attestés au sein du couple Du Bourg, dont six seulement atteindront l’âge adulte.
Élisabeth, essentiellement connue par sa correspondance, en partie inédite, est représentative de la passion des Lumières pour la pédagogie. Après la parution de l’Émile en 1762, elle choisit d’éduquer son cadet, Bruno, né en 1761, « à la Jean-Jacques ». Favorable aux idées nouvelles, elle milite en 1763 pour l’inoculation contre la variole.
Sa foi profonde guide son œuvre philanthropique qu’elle déploie auprès des prisonniers, des pauvres, des malades, comme de ses « bons paysans » de Seilh, à qui elle dédie en 1773 des traductions en gascon d’œuvres morales et religieuses. Ouverte aux Lumières, la présidente Du Bourg est aussi une âme mystique, bientôt séduite par les théories des Élus Coën, branche ésotérique chrétienne de la franc-maçonnerie, qualifiée d’illuministe. Elle y est introduite en 1776 par Bernard Mazade de Percin, son futur gendre, alors à la tête du temple de Toulouse et par ailleurs avocat. Bientôt initiée, comme ses fils Mathias et Joseph, elle devient l’une des rares femmes admises au sein de cette société secrète. Louis-Claude de Saint-Martin, l’une des figures centrales de la société, par ailleurs théosophe célèbre, devient son guide spirituel. Valentin Du Bourg meurt inopinément en juillet 1778. Fortement éprouvée, la présidente continue à vivre dans l’hôtel familial avec Mathias, désormais marié et père de famille, qui a succédé à son père en 1775 dans la charge de conseiller du Parlement, ainsi qu’avec Philippe, l’ecclésiastique. Joseph et Bruno, depuis peu chevaliers de Malte, entament une carrière militaire, respectivement dans l’infanterie et dans la marine. Jeanne a convolé en novembre 1776 avec Mazade de Percin. En avril 1779, Élisabeth épouse Guillaume-Joseph d’Omézon, président des trésoriers de France à Toulouse. En 1780, Mazade de Percin et sa famille partent pour les Antilles. La conduite du temple Coën de Toulouse passe à Mathias.
De la vaste correspondance de la présidente se dégagent les remarquables échanges poursuivis pendant trente ans avec son amie parisienne la marquise de Livry, veuve d’un premier maître d’hôtel du roi. S’y lit notamment la passion du public des années 1780 pour les aérostats et montgolfières d’abord, puis pour le magnétisme animal introduit par Mesmer en 1778. Les épistolières offrent ici une véritable tribune scientifique, la marquise manifestant son scepticisme, tandis que Mme Du Bourg, enthousiaste, cherche à s’investir activement dans cette pratique thérapeutique qui rejoint son intérêt pour les questions médicales, autant que son souci de faire œuvre charitable. Mathias et Joseph partagent ses convictions. Depuis Paris, la marquise transmet toutes les nouvelles et les ouvrages circulant sur le sujet, devenant de facto passeuse de savoir. Mathias de son côté se forme au magnétisme à la Société de la Concorde de Lyon dont font partie plusieurs Élus Coën adeptes d’Amand de Puységur : ce neveu d’une des amies proches de la marquise de Livry, disciple de Mesmer, a découvert en 1784 comment induire le somnambulisme magnétique, prémices de l’hypnose. La présidente, bravant une fois de plus le préjugé, magnétise bientôt à Toulouse avec ses deux fils, utilisant le baquet comme Mesmer autant que le somnambulisme magnétique comme Puységur. L’agentivité des épistolières fait ainsi de leurs lettres une source précieuse pour l’histoire du magnétisme au féminin. La Révolution bouleverse rapidement la vie familiale. L’abbé Philippe devient le chef de file du clergé réfractaire de toute la région toulousaine. Joseph et Bruno émigrent en Espagne où ils rejoignent l’armée des princes. La présidente assiste à l’emprisonnement des parlementaires toulousains parmi lesquels se trouve son fils Mathias. Il meurt guillotiné à Paris le 14 juin 1794, âgé de 48 ans. Élisabeth décède le 19 novembre de la même année.

Principales sources

  • Correspondance inédite de la présidente Du Bourg (Archives municipales de Toulouse, fonds Du Bourg, sous-série 5 S).
  • Clément Tournier, Le mesmérisme à Toulouse, suivi de Lettres inédites sur le XVIIIe siècle, d’après les archives de l’hôtel Du Bourg, Toulouse, Imprimerie Saint-Cyprien, 1911, 194 p. L’étude sur le magnétisme s’arrête à la page 26. La publication des lettres couvre les pages 27 à 170.
  • Saint-Martin, Louis-Claude de, Lettres aux Du Bourg : 1776-1785, éd. Robert Amadou, Boulogne-Billancourt, L'Initiation, 1977, 89 p.

Choix bibliographique

  • Dousset, Christine, « La Présidente du Bourg : diffuser et mettre en pratique ses lectures. Réflexions à partir d’un exemple toulousain », dans Plagnol-Diéval, M.-E. et Brouard-Arends I. (dir)., Femmes éducatrices au siècle des Lumières, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007, p. 75-92.
  • Dousset, Christine, « De la gazette à l'intime : les lettres de Madame de Livry à la présidente Dubourg (1763-1792) », dans Mouysset, S., Bardet J.-P. et Ruggiu F.-J. (dir.), "Car c'est moy que je peins" : écritures de soi, individu et liens sociaux (Europe, XVe-XXe siècle), Toulouse, CNRS : Université de Toulouse-Le Mirail, 2011, p. 163-174.
  • Dousset, Christine, « Une Mère et ses fils dans la seconde moitié du XVIIIe siècle : la correspondance familiale de la présidente Dubourg », dans Daumas, M. (dir.), Thèmes et figures du for privé, Presses universitaires de Pau et des Pays de l’Adour, 2012, p. 125-140.
  • Havelange, Isabelle, « De Paris à Toulouse : le magnétisme animal dans les lettres de la marquise de Livry à la présidente du bourg, 1779-1788 », Annales historiques de la Révolution française, 2023, n° 2 (412), p. 3-26.
  • Marquise de Livry, Lettres à la présidente Du Bourg (1779-1792). De Paris à Toulouse, édition d’Isabelle Havelange. Paris, Classiques Garnier, 2023, 623 p.
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