Marie Antoinette Cailleau : Différence entre versions
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Version du 17 décembre 2019 à 16:53
Marie Antoinette Cailleau | ||
Conjoint(s) | Nicolas-Bonaventure Duchesne | |
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Dénomination(s) | Veuve Duchesne | |
Biographie | ||
Date de naissance | inconnue (après 1713) | |
Date de décès | 25 mai 1793 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
Notice de Sabine Juratic, 2019
Fille d’André Cailleau et d’Antoinette Pérette Huguier, Marie Antoinette Cailleau naît à Paris après 1713 et baigne dès l’enfance dans le monde du livre, puisque son père et son grand-père maternel, Charles Huguier, sont libraires. Son frère André Charles Cailleau embrasse la même profession et elle-même épouse le 28 avril 1747 Nicolas-Bonaventure Duchesne, un marchand venu du Cotentin travailler dans la capitale au service de différents libraires. Grâce à son mariage avec la fille d’un maître, Duchesne est reçu dans la communauté, puis reprend la boutique de ses beaux-parents et développe une politique d’édition très active privilégiant le théâtre et la littérature, la publication d’auteurs célèbres comme Voltaire et Rousseau, et l’édition d’almanachs et de périodiques.
Après le décès de Duchesne, le 4 juillet 1765, sa veuve prend les rênes d’une maison de librairie prospère, établie rue Saint-Jacques, au-dessous de la fontaine Saint-Benoit, à l’enseigne du Temple du goût, où, selon les usages de son temps, elle mène de front les activités d’édition et la vente des livres au détail. Tutrice de ses trois enfants mineurs, elle exploite l’affaire avec le concours du commis de la maison, Pierre Guy, jusqu’en 1775, puis avec l’aide d’André Defer de Maisonneuve, qu’elle emploie comme secrétaire. Elle poursuit la politique d’édition initiée par son mari, enrichit sa collection des pièces de théâtre et fait réaliser ses livres par plusieurs imprimeurs de Paris et de province. Elle publie régulièrement des catalogues de son fonds ou des feuilles d’avis annonçant ses publications et défend âprement ses droits vis-à-vis des concurrents. Louis de Lesbros de La Versane, un auteur qui s’était aventuré à faire paraître en 1769 un ouvrage intitulé l'Esprit de Marivaux en fait l’amère expérience. La veuve Duchesne, estimant que cette publication porte atteinte à son privilège d’édition des œuvres de l’écrivain, et bien que Louis de Lesbros lui ait proposé trois cents exemplaires de son ouvrage à titre de dédommagement, en exige cinq cents et menace de se pourvoir au Conseil privé du roi, la juridiction chargée des contestations relatives aux privilèges royaux, pour obtenir satisfaction.
La liste des ouvrages publiés ou vendus par la veuve Duchesne est très étendue et son commerce la met en relation avec d’autres libraires, en France et à l’étranger. Elle entretient aussi de nombreux contacts avec les auteurs. Elle est ainsi en relation épistolaire suivie avec Voltaire à l’occasion de la publication d’une nouvelle édition de ses Œuvres de théâtre en 1767 et elle cultive à Paris des liens durables avec Rétif de la Bretonne dont elle vend les ouvrages. À l’époque de la Révolution, sa librairie accueille les productions des hommes et des femmes du jour puisqu’elle diffuse les pièces de Collot d’Herbois, de Fabre d’Églantine ou d’Olympe de Gouges.
Sa réussite commerciale permet à Marie Antoinette Cailleau de faire l’acquisition de la maison mitoyenne de la sienne rue Saint-Jacques en 1780, puis de faire construire une maison de campagne dans le village de Saint-Mandé après 1783. Elle est imposée tout au long de son exercice à des taux élevés de capitation dans sa communauté professionnelle. Ses qualités de femme d’affaires se manifestent aussi lors du mariage de ses deux filles. Lorsque l’aînée, Marie Antoinette, épouse en 1769 Nicolas Defer, ingénieur des Ponts et chaussées et entrepreneur des fermes du roi, et que la cadette, Charlotte Antoinette, se marie en 1771 avec Jean Colombier, docteur régent de la Faculté de médecine de Paris, leur mère négocie avec ses gendres la possibilité de s’acquitter d’une partie de la dot en ouvrages de son fonds. La veuve Duchesne reste à la tête de l’entreprise même après la majorité de son fils Jean Nicolas (1757-1845) ; elle travaille en association avec lui à partir de 1787, mais il ne devient pleinement maître de l’affaire qu’au décès de sa mère, le 25 mai 1793.
Au cours d’une carrière de près de trente années Marie Antoinette Cailleau a donc assumé avec brio l’héritage de son mari et l’administration d’une des librairies les plus dynamiques de son temps. Ses relations familiales, sa capacité à s’entourer de collaborateurs de valeur ont conforté, semble-t-il, des talents personnels reconnus dans son milieu. Désignée dès 1752 par l’inspecteur de la librairie Joseph d’Hémery comme une « maîtresse commère », elle devient sous la plume de Voltaire en 1767 « l’exacte et avisée veuve Duchesne ».