Suzanne Élisabeth d’Orville : Différence entre versions
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Version du 15 décembre 2014 à 17:48
Suzanne Élisabeth d’Orville | ||
Conjoint(s) | Jean-Wolfgang Schönemann (1717-1763) | |
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Biographie | ||
Date de naissance | 2 janvier 1722 | |
Date de décès | 20 novembre 1782 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
Sommaire
Notice de Laure Hennequin-Lecomte, 2014
Suzanne d’Orville naît à Francfort le 2 janvier 1722, dans une famille de réformés du Nord de la France installée en Allemagne dans la seconde moitié du XVIe siècle pour fuir les persécutions religieuses espagnoles. Son père, Jean-Noé d'Orville, dirige un établissement bancaire. Le 25 mars 1749, Suzanne épouse Jean-Wolfgang Schoenemann. En 1750, son époux fonde un établissement bancaire et le dirige avec un associé, Heyder. Veuve le 12 août 1763, elle se retrouve à la tête d'une maison bancaire et commerciale d'envergure, pour laquelle elle reçoit l'aide paternelle. En 1766, Bernard Frédéric de Turckheim, le futur époux de sa fille, y est envoyé par Jean de Turckheim. Cela indique la renommée de l'entreprise.
Suzanne met au monde ses six enfants à Francfort. Sa fille, Anne-Elisabeth, née en 1758, a une destinée plus heureuse que ses fils qui vont subir les aléas financiers du négoce familial. Jean-Noé Schönemann, né le 1er juillet 1752, se suicide le 20 août 1784 à Heidelberg, suite à la ruine de sa banque. Jacques-Philippe Schönemann, né le 27 juillet 1754, décède le 25 mars 1799, impliqué lui aussi dans une affaire de malversation bancaire. Jean-Frédéric Schönemann, le frère préféré de sa fille, né le 28 octobre 1756, meurt en 1832, après une malheureuse carrière économique. Jacques-Georges Schönemann, né le 30 janvier 1760, meurt à Baltimore en 1819 et Jean-Wolfgang Schönemann, né en 1763, le 24 novembre 1813. De la fin de 1774 jusqu’à l’automne 1775, Suzanne consent à l’idylle de sa fille avec l’auteur de Werther. Elle participe à leurs conversations, qui ont un tour romanesque et moral. Elle estime toutefois que Goethe n’est pas un parti souhaitable pour sa fille. Appartenant au monde des affaires, elle ne peut imaginer que cette dernière puisse être heureuse sans disposer d’une grande fortune. En revanche, elle favorise l'union de sa fille de 20 ans avec Bernard-Frédéric de Turckheim, et c’est là le point de départ de la correspondance échangée avec sa fille de 1778 à sa mort en 1782.
À 57 ans, la mère vit dans l'attente anxieuse des lettres d’Alsace. Elle est fière de la réussite sociale de « Lili », sa seule fille, mais, dès le début de l'année 1779, l’échange épistolaire se focalise sur l’espoir, puis la réalité de la grossesse de celle-ci. Lui déconseillant le plaisir mondain de la danse, ainsi que l'usage immodéré des voyages en carrosse, la mère insiste sur ces dangers auprès de son gendre, pensant qu’un discours masculin pourrait avoir plus de poids que ses propres conseils et que la volonté maritale doit servir de règle à une femme. En 1779, elle raconte aussi à sa fille une visite de Goethe, après un concert où l’écrivain l’a présentée au duc de Weimar. L’écrivain lui rend visite une deuxième fois, l’ancienne fiancée étant un des sujets de leurs conversations. La correspondance, véritable gazette familiale et amicale, cherche à abolir la distance physique entre la mère et la fille, mais celle-ci trouve parfois pesantes les larmes et la sollicitude maternelles. Le 20 novembre 1782, Suzanne meurt à Francfort, tandis que l'établissement bancaire Schönemann périclite.
La correspondance de Suzanne a suscité un grand intérêt de la part de la communauté scientifique, et d'abord en raison des brèves fiançailles de sa fille avec Goethe. Or, si l'amitié avec l'auteur de Werther est mise en avant par le germaniste Jules Keller qui a établi le texte des lettres, elle n'est qu'un aspect minoritaire de ces missives. L'édition contemporaine des échanges épistolaires de cette patricienne avec sa progéniture est surtout utile pour la connaissance des élites rhénanes à la fin du siècle des Lumières, compte tenu de la langue utilisée, le français. Cette correspondance permet par ailleurs de cerner des rapports mère-fille et d’informer sur la vie sociale et culturelle d'un espace transfrontalier vécu différemment par les hommes et les femmes.
Oeuvres
- 'Aus dem Alltagsleben einer Frankfurter Goethe-Freundin : unveröffentlichte Briefe der Anna Elisabeth Schönemann geborene d'Orville an ihre Tochter Lili in Strassburg, 1778-1782 , éd. Julles Keller, Bern, New York, Peter Lang, 1997.
Choix bibliographique
- Hennequin-Lecomte Laure, Le patriciat strasbourgeois (1789-1830), Destins croisés et voix intimes, Strasbourg, Presses Universitaires de Strasbourg, 2011.
Choix iconographique
- Portrait de Suzanne Elisabeth Schönemann, née d’Orville –- Reproduction dans John Ries, Die Briefe der Elise von Türckheim, geb. Schönemann, Goethes Lili, Francfort, Verlag Englert und Schlosser, 1924, p. IX.
Jugements
- « En reprenant l’histoire de mes relations avec Lili, je trouve dans mes souvenirs que j’ai passé avec elle les heures les plus agréables, tantôt en présence de sa mère, tantôt en tête à tête avec elle. » (Goethe, Poésie et Vérité, souvenirs de ma vie, trad. Pierre du Colombier, Aubier, 1992, p. 439).