Marie-Amable Petiteau : Différence entre versions
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Version du 29 janvier 2014 à 19:57
Marie-Amable Petiteau | ||
Titre(s) | Marquise de La Férandière | |
---|---|---|
Conjoint(s) | Louis-Antoine Rousseau de La Férandière | |
Dénomination(s) | Madame de La Ferrandière | |
Biographie | ||
Date de naissance | 1736 | |
Date de décès | 1817 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) | ||
Dictionnaire Fortunée Briquet (1804) |
Notice de Martine Bobin, 2013
Marie-Amable Petiteau, née à Tours en 1736 dans une famille de robe, a vingt ans quand elle épouse Louis-Antoine Rousseau, écuyer, seigneur de La Ferandière, capitaine au régiment de Champagne. Ils ont une fille, Jeanne-Amable, qui épousera en 1779 Arnaud Hercule de Caumont. Installée en Poitou, dans le domaine des Touches (commune de Mignaloux), Marie-Amable de La Ferandière fréquente, dès 1760, le château des Ormes où le marquis de Voyer d’Argenson réunit ses amis. Elle y rencontre une noblesse toute imprégnée des idées des philosophes et notamment le président du Parlement de Paris, Charles-Jean-François Hénault (1685-1770), académicien, dramaturge et historien, qui a fréquenté le salon de Mme de Lambert et a pu encourager les penchants littéraires de Mme de la Ferandière.
Partageant son temps entre le château des Touches, près de Poitiers, et cette capitale provinciale, elle gère ses biens, s’emploie à la lecture et à l’écriture et fréquente salons, lieux de promenade et salles de spectacles. Elle entretient une correspondance régulière avec Angélique de Médel (1742-1799), Henriette de Monbielle d’Hus, marquise de Ferrières (1748-1837) et un monsieur de Kérivalant (1750-1815), poète breton, fréquemment imprimé dans l’Almanach des Muses auquel elle adresse un poème. Ses amis la décrivent comme ayant «la plus jolie figure» et «une élégance parfaite» (Henriette de Ferrières). Angélique de Médel évoque cependant un changement de sa situation durant les années 1783 à 1786 et note les longues absences de son mari (que sanctionnent une séparation de biens en 1783 et le départ de son mari pour Ajaccio en novembre 1786) et les problèmes qu’elle doit alors surmonter: «elle n’a plus qu’un laquais», mais elle «sort tous les jours, s’occupe à lire». Le départ de certains de ses amis qui émigrent en 1791-1792 ne semble pas avoir modifié son style de vie.
Mme de La Férandière possède un «cabinet d’antiquités» et une importante bibliothèque. Hasard des confiscations révolutionnaires ou des dons de la poétesse, un certain nombre d’ouvrages lui ayant appartenu sont devenus la propriété de la bibliothèque publique de Poitiers (désormais médiathèque François-Mitterrand). Sur les 161 documents (livres ou brochures) à ce jour repérés qui portent l’ex-libris de Mme de La Férandière (travail en cours de traitement), 80% sont des pièces de théâtre, pour la plupart des comédies (18% seulement de tragédies), ces pièces étant à 90% l’œuvre d’auteurs contemporains. On trouve aussi 7 ouvrages de poésies, 5 livres de fiction, 9 de philosophie et 5 autres de pièces musicales (ballet, opéra comique).
Tous les textes imprimés de Mme de la Férandière sont des poésies. Le premier de ses poèmes, écrit pour sa fille âgée de dix ans, a été publié à son insu dans le Mercure. Félicitée par le directeur du périodique, elle lui envoie régulièrement des pièces poétiques de diverses natures et des fables qui paraissent dans ce journal mais aussi dans le Journal des Dames et dans l’Almanach des Muses. Elle tire son inspiration d’un goût éclectique pour les romans, les pièces de théâtre et le débat d’idées, «glanant» (selon son mot) de Virgile au Roman de la Rose, de Voltaire ou Marivaux à Addison, de La Fontaine à Florian. Servie par la finesse de son observation, elle sait donner sa peinture personnelle de sujets qui la touchent. Sa poésie, au style limpide et délicat malgré ses visées morales, se veut «moderne», distanciée et sensible. Elle y clame son amour et son admiration pour sa fille («Ma folie»); elle dénonce la situation des femmes («Le Mari inconséquent») et elle raille certains travers sociaux («Epître à un ami, habitant de la cour»). Si ses poésies ont contribué à son renom, ce sont ses fables –genre réputé masculin – qui ont particulièrement été remarquées. Elle est la seule femme de lettres contemporaine qui trouve ainsi grâce aux yeux de Charles de Ferrières, pourtant féru de littérature.
A l’heure où Olympe de Gouges plaide haut et fort pour la participation des femmes à la res publica, Mme de la Férandière prend part à l’entrée massive des femmes dans le champ littéraire aux côtés d’épistolières, de romancières et de poétesses comme Fanny de Beauharnais, Adine Joliveau, Stéphanie de Genlis, etc. Demeurée dans tous les dictionnaires biographiques du premier XIXe siècle, elle a été récemment redécouverte par les spécialistes de la fable et des écrits féminins.
Oeuvres
- 1789: Romance de Paul et Virginie, Paris, Imprimerie de Monsieur P. F. Didot Jeune.
- 1806: Œuvres de Madame de La Fer[andière], Première partie : Fables. Seconde partie : Poésies fugitives. Troisième partie : Romances et chansons de Mme de La Fer[andière]. Musique de Madame de C[aumon]t fille de l’auteur, Paris, Colnet, Debray et Lenormand, 3 parties en 1 volume. [1]
- 1816: Œuvres de Madame la Marquise de La F[erandière]. Deuxième édition augmentée de plusieurs fables, romances et pièces fugitives, Paris, Janet et Cotelle, 2 volumes. [2]
Choix bibliographique
- B***, «Notice sur le caractère et les ouvrages de madame de La Férandière», in Affiches, annonces et avis divers de Poitiers, département de la Vienne, n°1, 2 et 10, 1817, p. 10-13, 24-28 et 161-170.
- Pascal, Jean-Noël, «La Glaneuse, la Fauvette et la Maîtresse d’école, ou la Volière et le Jardin, sur les fables pédagogiques de Mesdames de La Ferrandière, Joliveau et de Genlis», in Cahiers Roucher-André Chénier, n°17, 1998 («Poétesses et Egéries de 1770 à 1830»), p.17-31.
Jugements
- «[1766] J’étais priée de dîner le lendemain chez Madame de La Férandière, l’amie de la famille, et que le soir nous irions tous à la comédie, qu’il fallait paraître aimable avec cette dame, qui l’était beaucoup elle-même, et la plus jolie et la plus considérée de la ville […]. Elle avait l’air vif, tranchant […]. [vers 1778] Elle avait beaucoup d’esprit, elle faisait des vers, et était ce qu’on pouvait appeler une femme aimable et du meilleur ton. Elle avait sa fille, plus âgée que mes filles, mais cette jeune personne avait les passions vives, une imagination exaltée […]. Madame de F***, tout occupée de littérature, poésie, ne s’apercevait pas que sa fille et notre jeune cousin se prenaient de la plus belle passion […].[vers 1805] Sa mère [Mme de la Férandière] vit encore et conserve son esprit, son amabilité et fait toujours des vers charmants.» (Henriette de Monbielle d’Hus, marquise de Ferrières-Marsay, 1744-1837, Souvenirs en forme de mémoires, publié et annoté par Henri Frotier de La Messelière, 1910, p.31, 52 et 54).
- «Je crois Mme de La Férandière bien affectée de l’absence de son mari et du désordre de ses affaires. […] Je dînai hier chez lui [M. de Ferrières] avec Mme de La Férandière, et Mme de Caumont; je la trouvais plus honnête et plus parlante qu’à l’ordinaire; il paraît même qu’elle s’occupe à lire dans sa retraite. […] L’évêque de Chalon [Antoine-Jules de Clermont-Tonnerre, 1749-1830] […] a passé aux Touches, en venant de Paris. Voilà ce que c’est que d’être jolie femme.» (Angélique-Séraphine de Médel, «Lettres à ***», [1783-1787], in Archives historiques du Poitou. Correspondance de Madame de Médel: 1770-1789, éd. par Henri par H. Carré et annotée par le R. Dom Pierre de Monsabert, 1931, n°47, p.29, 91, 103 et 128)
- «[…] mais ce qui assure à la citoyenne de La Férandière une réputation durable, ce sont ses fables, genre jusqu’à ce jour étranger en quelque sorte à son sexe, et qui suppose une grande habitude de saisir les vrais rapports du caractère que l’on donne à ses interlocuteurs, avec les nuances diverses du caractère original de l’homme et des différentes passions qui l’agitent. Cette manière de mettre la morale en action exige beaucoup de finesse et un tact très-exercé. La fable est peut-être l’histoire la plus vraie et la plus utile du cœur humain. On peut dire que la citoyenne de La Férandière n’a point jusqu’ici de rivale dans son sexe: elle a composé beaucoup de fables, la plupart ont déjà paru dans l’Almanach des Muses, et tout le monde s’est accordé à en louer l’invention, le style aisé, naturel, et la juste application de la morale.» (Le C[itoyen] C[harles] E[lie de] Ferrières, De l’état des lettres dans le Poitou, depuis 300 de l’ère chrétienne, jusqu’à l’année 1789, Poitiers, an VIII, p. 92-93).
- «[…] Daignez, Madame, agréer la dédicace de la seconde année de mon almanach des fabulistes. La première année, j’ose le dire, a été offerte comme un hommage vrai et bien senti. Soyez persuadée, Madame, qu’il en est de même à votre égard. En effet, dans cette France, notre patrie, qui plus que vous est digne par vos fables ingénieuses et philosophiques, d’être mise au premier rang, dans ce genre de littérature, parmi les personnes de votre sexe ? Si j’étais moins éloigné, Madame, de tout ce qui tient à la moindre flatterie, je serais tenté d’invoquer Poitiers, cette cité célèbre qui s’honore d’être votre berceau, afin qu’elle vous surnommât la dixième Muse, celle de l’Apologue. Mais non, Madame, je ne forme point de pareils vœux ; je me restreins à en faire pour que vous restiez encore long-temps au nombre de ce qu’il y a de plus aimable parmi les mortelles; et je désire qu’à la fin d’une longue carrière, votre esprit ne s’éteigne qu’en dictant une dernière fable, au moment où votre âme pure et céleste, s’élèvera vers la Divinité! […] Madame de La Fer***: il faut mettre en toutes lettres, Madame de La Ferandière. Cette omission ne doit pas peser entièrement sur moi; c’est Madame de La Ferandière qui en est un peu cause. Par modestie, sans doute son recueil ne porte que les trois premières lettres de son nom, de ce nom bon à être connu tout au long, et qui mieux est de tous les amants des Apologues.» (Alexandre Duwicquet, [Préface], Almanach des fabulistes: IIe année, Paris, 1816, Martinet et Barba, p.19-21 et p. 281).