Jeanne de Jussie : Différence entre versions
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− | == Notice de Madeleine Lazard, 2003. == | + | == Notice de [[Madeleine Lazard]], 2003. == |
− | Jeanne de Jussie est mal connue. Elle naît à une date incertaine au début du XVIe siècle, dans la famille noble, mais peu fortunée, des seigneurs de Jussie-l'Evêque. Elle est la nièce du seigneur Pelicier et de la Mère Guillaume de Villette. | + | Jeanne de Jussie est mal connue. Elle naît à une date incertaine au début du XVIe siècle, dans la famille noble, mais peu fortunée, des seigneurs de Jussie-l'Evêque. Elle est la nièce du seigneur Pelicier et de la Mère Guillaume de Villette. |
− | Elle entre très jeune au couvent des clarisses -- le seul couvent de femmes à Genève avant la Réformation. Pourvue d'une bonne instruction, elle est dès 1530 «l'écrivaine» du couvent (c'est-à-dire la secrétaire, chargée de rédiger les suppliques, les quittances des legs, les lettres et requêtes), alors qu'elle en est l'une des plus jeunes soeurs. Elle sait sûrement le latin, car elle emploie parfois des termes de cette langue, munis simplement d'une terminaison française et qu'on ne retrouve dans aucun dictionnaire de l'époque. | + | |
− | Alors qu'éclatent les premiers troubles religieux, Jeanne de Jussie est actrice et témoin d'un épisode haut en couleur: la résistance victorieuse des clarisses aux tentatives des réformés, qui veulent leur faire quitter leur ordre. En août 1535, après l'abolition du culte catholique à Genève, elle obtient enfin l'autorisation de partir avec les autres soeurs. Elles se réfugient à Annecy, où le duc de Savoie met à leur disposition le couvent de Sainte-Croix, dont Jeanne devient l'abbesse. C'est là qu'elle rédige son oeuvre, commencée sans doute en 1535, achevée peut-être vers 1546, et dont la première édition paraîtra en 1611 à Chambéry. | + | Elle entre très jeune au couvent des clarisses -- le seul couvent de femmes à Genève avant la Réformation. Pourvue d'une bonne instruction, elle est dès 1530 «l'écrivaine» du couvent (c'est-à-dire la secrétaire, chargée de rédiger les suppliques, les quittances des legs, les lettres et requêtes), alors qu'elle en est l'une des plus jeunes soeurs. Elle sait sûrement le latin, car elle emploie parfois des termes de cette langue, munis simplement d'une terminaison française et qu'on ne retrouve dans aucun dictionnaire de l'époque. |
− | Sa narration décrit la situation à Genève de 1530 à 1535, dans le but d'entretenir dans sa communauté le souvenir de cette époque troublée. Les trois cinquièmes du récit se rapportent aux tribulations des clarisses et aux circonstances qui ont provoqué leur «départie» (juillet 1535-septembre 1536). La fin décrit les vaines tentatives des réformés pour les amener à défroquer et à se marier, ainsi que le départ pour l'exil jusqu'à l'arrivée à Annecy. Jeanne parle tantôt à la première personne (mais en restant anonyme), tantôt à la troisième, en citant «Jeanne» parmi les plus jeunes soeurs, et aussi les plus exposées car réclamées par les autorités genevoises. Elle s'en prend à Luther (Calvin n'arrive à Genève qu'en 1536), à Farel, à Viret, analyse les causes et les conséquences de la révolution religieuse dont elle est témoin. Son récit, très dramatique, abonde en tableaux violents et tumultueux. Il offre nombre de scènes d'affrontement entre «luthériens hérétiques» et religieuses, et aussi beaucoup de portraits vivants, comme celui de Marie Dentière, une «moine abbesse, fausse, ridée et langue diabolique, ayant mari et enfants, qui se mêlait de prêcher et de pervertir les gens de dévotion», lors de l'irruption des réformés dans le couvent. Sa date de mort n'est pas connue. | + | |
+ | Alors qu'éclatent les premiers troubles religieux, Jeanne de Jussie est actrice et témoin d'un épisode haut en couleur: la résistance victorieuse des clarisses aux tentatives des réformés, qui veulent leur faire quitter leur ordre. En août 1535, après l'abolition du culte catholique à Genève, elle obtient enfin l'autorisation de partir avec les autres soeurs. Elles se réfugient à Annecy, où le duc de Savoie met à leur disposition le couvent de Sainte-Croix, dont Jeanne devient l'abbesse. C'est là qu'elle rédige son oeuvre, commencée sans doute en 1535, achevée peut-être vers 1546, et dont la première édition paraîtra en 1611 à Chambéry. | ||
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+ | Sa narration décrit la situation à Genève de 1530 à 1535, dans le but d'entretenir dans sa communauté le souvenir de cette époque troublée. Les trois cinquièmes du récit se rapportent aux tribulations des clarisses et aux circonstances qui ont provoqué leur «départie» (juillet 1535-septembre 1536). La fin décrit les vaines tentatives des réformés pour les amener à défroquer et à se marier, ainsi que le départ pour l'exil jusqu'à l'arrivée à Annecy. Jeanne parle tantôt à la première personne (mais en restant anonyme), tantôt à la troisième, en citant «Jeanne» parmi les plus jeunes soeurs, et aussi les plus exposées car réclamées par les autorités genevoises. Elle s'en prend à Luther (Calvin n'arrive à Genève qu'en 1536), à Farel, à Viret, analyse les causes et les conséquences de la révolution religieuse dont elle est témoin. Son récit, très dramatique, abonde en tableaux violents et tumultueux. Il offre nombre de scènes d'affrontement entre «luthériens hérétiques» et religieuses, et aussi beaucoup de portraits vivants, comme celui de Marie Dentière, une «moine abbesse, fausse, ridée et langue diabolique, ayant mari et enfants, qui se mêlait de prêcher et de pervertir les gens de dévotion», lors de l'irruption des réformés dans le couvent. Sa date de mort n'est pas connue. | ||
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Les études féministes des dernières décennies ont fait resurgir l'écrivaine du couvent des clarisses de Genève, mais toujours en relation avec Marie Dentière, ex-abbesse réformée, qui a bien davantage retenu l'attention. | Les études féministes des dernières décennies ont fait resurgir l'écrivaine du couvent des clarisses de Genève, mais toujours en relation avec Marie Dentière, ex-abbesse réformée, qui a bien davantage retenu l'attention. | ||
== Oeuvres == | == Oeuvres == | ||
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- Pontenay de Fontenette, Micheline. ''Les Religieuses à l'âge classique du droit canon''. Paris, Vrin, 1967.<br /> | - Pontenay de Fontenette, Micheline. ''Les Religieuses à l'âge classique du droit canon''. Paris, Vrin, 1967.<br /> | ||
- Roelker, Nancy. «The Appeal of Calvinism in French Noble Women in the XVIe Century»,. ''The Journal of Interdisciplinary History'', 2, 1972, p.402, 407. | - Roelker, Nancy. «The Appeal of Calvinism in French Noble Women in the XVIe Century»,. ''The Journal of Interdisciplinary History'', 2, 1972, p.402, 407. | ||
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Version actuelle en date du 6 janvier 2011 à 20:28
Jeanne de Jussie | ||
Biographie | ||
Date de naissance | Après 1500 | |
---|---|---|
Date de décès | Avant 1600 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
Notice de Madeleine Lazard, 2003.
Jeanne de Jussie est mal connue. Elle naît à une date incertaine au début du XVIe siècle, dans la famille noble, mais peu fortunée, des seigneurs de Jussie-l'Evêque. Elle est la nièce du seigneur Pelicier et de la Mère Guillaume de Villette.
Elle entre très jeune au couvent des clarisses -- le seul couvent de femmes à Genève avant la Réformation. Pourvue d'une bonne instruction, elle est dès 1530 «l'écrivaine» du couvent (c'est-à-dire la secrétaire, chargée de rédiger les suppliques, les quittances des legs, les lettres et requêtes), alors qu'elle en est l'une des plus jeunes soeurs. Elle sait sûrement le latin, car elle emploie parfois des termes de cette langue, munis simplement d'une terminaison française et qu'on ne retrouve dans aucun dictionnaire de l'époque.
Alors qu'éclatent les premiers troubles religieux, Jeanne de Jussie est actrice et témoin d'un épisode haut en couleur: la résistance victorieuse des clarisses aux tentatives des réformés, qui veulent leur faire quitter leur ordre. En août 1535, après l'abolition du culte catholique à Genève, elle obtient enfin l'autorisation de partir avec les autres soeurs. Elles se réfugient à Annecy, où le duc de Savoie met à leur disposition le couvent de Sainte-Croix, dont Jeanne devient l'abbesse. C'est là qu'elle rédige son oeuvre, commencée sans doute en 1535, achevée peut-être vers 1546, et dont la première édition paraîtra en 1611 à Chambéry.
Sa narration décrit la situation à Genève de 1530 à 1535, dans le but d'entretenir dans sa communauté le souvenir de cette époque troublée. Les trois cinquièmes du récit se rapportent aux tribulations des clarisses et aux circonstances qui ont provoqué leur «départie» (juillet 1535-septembre 1536). La fin décrit les vaines tentatives des réformés pour les amener à défroquer et à se marier, ainsi que le départ pour l'exil jusqu'à l'arrivée à Annecy. Jeanne parle tantôt à la première personne (mais en restant anonyme), tantôt à la troisième, en citant «Jeanne» parmi les plus jeunes soeurs, et aussi les plus exposées car réclamées par les autorités genevoises. Elle s'en prend à Luther (Calvin n'arrive à Genève qu'en 1536), à Farel, à Viret, analyse les causes et les conséquences de la révolution religieuse dont elle est témoin. Son récit, très dramatique, abonde en tableaux violents et tumultueux. Il offre nombre de scènes d'affrontement entre «luthériens hérétiques» et religieuses, et aussi beaucoup de portraits vivants, comme celui de Marie Dentière, une «moine abbesse, fausse, ridée et langue diabolique, ayant mari et enfants, qui se mêlait de prêcher et de pervertir les gens de dévotion», lors de l'irruption des réformés dans le couvent. Sa date de mort n'est pas connue.
Les études féministes des dernières décennies ont fait resurgir l'écrivaine du couvent des clarisses de Genève, mais toujours en relation avec Marie Dentière, ex-abbesse réformée, qui a bien davantage retenu l'attention.
Oeuvres
1535-1546? : Le Levain du calvinisme ou commencement de l'hérésie de Genève. Éd. A. C. Griel, Genève, Fr. Jullien, 1865.
Choix bibliographique
- Chroniqueurs du XVIesiècle. Bibliothèque romande, Lausanne, 1974, «Jeanne de Jussie», introd., p.54 et suiv.
- Head, Thomas. «The Religion of the Femmelettes: Ideals and Experience among Women of the Sixteenth Century France», in L. Coon, K. Haldane and E. Somme (dir.), That Gentle Strength: Historical Perspectives on Women in Christianity. Charlottesville, Virginia, 1991, p.149-175.
- Lazard, Madeleine. «Deux soeurs ennemies, Marie Dentière et Jeanne de Jussie: nonnes et réformées à Genève», in B. Chevalier et R. Sauzet (dir.), Les réformes, enracinement socio-culturel. Paris, Éd. de la Maisnie, 1985, p.239-249.
- Pontenay de Fontenette, Micheline. Les Religieuses à l'âge classique du droit canon. Paris, Vrin, 1967.
- Roelker, Nancy. «The Appeal of Calvinism in French Noble Women in the XVIe Century»,. The Journal of Interdisciplinary History, 2, 1972, p.402, 407.