Marguerite d'Autriche (1480-1530) : Différence entre versions

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* «Il est impossible de parcourir l’histoire des Pays-Bas au commencement du XVIe siècle sans y rencontrer à tout bout de champ Marguerite d’Autriche. Elle y est vraiment la dame du logis. Qu’il s’agisse des arts ou des lettres, de la politique ou de l’administration, on y retrouve partout les traces de son passage. Et si l’on songe aux vicissitudes extraordinaires que le sort a infligées à cette femme demeurée malgré tout si active et si vivante, on comprendra qu’elle ait séduit presque tous ceux qui se sont occupés d’elle» (Henri Pirenne, ''Préface'' à Marguerite d’Autriche-Savoie de Ghislaine de Boom, Paris, 1935).  
 
* «Il est impossible de parcourir l’histoire des Pays-Bas au commencement du XVIe siècle sans y rencontrer à tout bout de champ Marguerite d’Autriche. Elle y est vraiment la dame du logis. Qu’il s’agisse des arts ou des lettres, de la politique ou de l’administration, on y retrouve partout les traces de son passage. Et si l’on songe aux vicissitudes extraordinaires que le sort a infligées à cette femme demeurée malgré tout si active et si vivante, on comprendra qu’elle ait séduit presque tous ceux qui se sont occupés d’elle» (Henri Pirenne, ''Préface'' à Marguerite d’Autriche-Savoie de Ghislaine de Boom, Paris, 1935).  
  
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Marguerite d'Autriche (1480-1530)
Titre(s) Archiduchesse d'Autriche
Duchesse de Savoie
Gouvernante des Pays-Bas
Conjoint(s) Charles VIII, roi de France
Jean de Castille
Philibert II, duc de Savoie
Biographie
Date de naissance 1480
Date de décès 1530
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)
Dictionnaire Hilarion de Coste (1647)


Notice de Judy Kem, 2008

Marguerite d’Autriche, née à Bruxelles le 10 janvier 1480, est la fille de Marie de Bourgogne et de Maximilien Ier d’Autriche. Orpheline de mère à deux ans, elle en a trois quand elle est mariée au futur Charles VIII (22.06.1483). «Madame la Dauphine» reçoit une excellente éducation à la cour de sa belle-soeur, Anne de Beaujeu, à Amboise, où elle étudie le latin et le français. En décembre 1490, son père se remarie par procuration avec l’héritière de Bretagne, la duchesse Anne. Dès l’annonce du mariage, les forces françaises envahissent ce duché que la France convoite, contraignant Anne à épouser Charles VIII. Du coup, les mariages du père et de la fille sont annulés. Marguerite reste prisonnière à Melun pendant qu’on se dispute sa dot; elle n’est libérée que deux ans plus tard par le traité de Senlis.

Fort malheureuse, semble-t-il, elle regagne les Pays-Bas en juin 1493, où sa marraine Marguerite d’York, veuve de son grand-père Charles le Téméraire, poursuit son éducation. Elle commence à écrire des vers, apprend l’anglais et le castillan; elle n’apprendra que très tardivement le flamand, qu’elle parlera toujours assez mal. En 1495, son père l’unit à Juan d’Aragon, fils unique des «rois catholiques» Ferdinand et Isabelle, dont la fille Jeanne épouse l’année suivante son frère Philippe. Juan meurt cependant après sept mois de vie conjugale (4 octobre 1497), tandis que Marguerite accouche, le 8 décembre, d’une fille qui meurt aussitôt. Elle n’aura pas d’autre enfant et se dévouera plus tard à son neveu et à ses nièces.

En 1500, elle rentre aux Pays-Bas, où son père l’unit à Philibert II le Beau de Savoie (28.11 1501). Elle connaît avec lui presque trois ans de bonheur, mais il meurt d’une pleurésie en septembre 1504. Marguerite adopte alors la devise «Fortune infortune fort une».

Moins de deux ans plus tard, son frère Philippe et Henri VII d’Angleterre signent une alliance assortie d’un double projet de mariage: Charles, le fils de Philippe, épousera Marie, la fille du roi, tandis que ce dernier deviendra l’époux de la jeune veuve. Cette fois-ci, Marguerite refuse. Son frère décédant peu après (1506), elle quitte la Savoie pour devenir régente des Pays-Bas pendant la minorité de son neveu Charles Quint. Déchargée de ses responsabilités lorsqu’il accède au trône, en 1515, sous l’influence d’un de ses ennemis, elle se retire à Malines. Mais en 1519, son neveu la rappelle au pouvoir. Elle y restera jusqu’à sa mort.

Comme régente, puis gouvernante des Pays-Bas, Marguerite connaît de graves problèmes financiers mais aussi de grands triomphes politiques, dont la formation de la Ligue de Cambrai contre Venise, qui assure la paix aux Pays-Bas (1508), l’élection à l’Empire de Charles-Quint (1519) et la «Paix des Dames», négociée avec la mère et la soeur du roi de France, Louise de Savoie et Marguerite de Navarre, qui rétablit la concorde entre Charles Quint et François Ier (1529). Marguerite d’Autriche est également une grande mécène. Elle soutient des écrivains (Erasme, Vivès, Agrippa, Lemaire de Belges) et des musiciens (Josquin Desprez, Pierre de la Rue). Elle collectionne des tableaux de peintres célèbres (Jean van Eyck, Jérôme Bosch, Roger van der Weyden, Hans Memling). Elle fait élever en l’honneur du défunt Philibert de Savoie l’église de Brou, à Bourg-en-Bresse, où elle sera enterrée en 1532, et qui est sans doute sa plus grande contribution à l’art. Elle-même se livre à des travaux d’aiguille (disparus), elle écrit des vers et des chansons, dont certains ont paru de son vivant. Elle décède à Malines le 30 novembre 1530. Restée populaire en Belgique et aux Pays-Bas, Marguerite d’Autriche a fait l’objet d’une quinzaine de biographies au XIXe siècle et d’une douzaine au suivant, mais elle y est fréquemment présentée comme un simple jouet des hommes de son lignage, voire comme une femme gouvernée par ses passions, notamment par sa haine supposée pour la France. Ses vers ont été jugés beaux, simples et mélancoliques, quoique plusieurs critiques aient mis en doute la part qui lui revient. Sa copieuse correspondance a suscité beaucoup d’intérêt, mais elle n’a pas encore fait l’objet d’une édition intégrale. Aujourd’hui Marguerite est surtout considérée comme une femme politique habile et une mécène remarquable. Les études les plus récentes concernent ses collections artistiques, surtout ses portraits et manuscrits.

OEUVRES

  • 1491 : Complainte de Dame Marguerite, Anvers, G. Leeu, 1492 (incomplet)
  • 1492 : «Lettre de Marguerite d’Autriche à Anne de Beaujeu (17 mars 1492)», éd. Christopher Hare, dans The High and Puissant Princess Marguerite of Austria, Londres, 1907, p.39.
  • 1507 : «Lettre inédite de Marguerite d’Autriche [à l’évêque de Tournai]», éd. Marcel Françon, Modern Language Notes, t.51/1, 1936, p.34-35.
  • 1507-1519 : Correspondance de l’Empereur Maximilien Ier et de Marguerite d’Autriche sa fille, Gouvernante des Pays Bas , 2 tomes, éd. critique André Le Glay, Paris, Renouard, 1839 [réimpression New York, Johnson, 1966].
  • 1516-1523 : Albums et oeuvres poétiques de Marguerite d’Autriche, Gouvernante des Pays-Bas, publiés en entier pour la première fois d’après les manuscrits de la Bibliothèque Royale de Belgique, éd. Emile Gachet, Bruxelles, Librairie scientifique et littéraire, 1849 -- The Chanson Albums of Marguerite d’Autriche, Mss. 228 and 11239 of the Bibliothèque royale de Belgique, Brussels. A Critical Edition and Commentary by Martin Picker. Berkeley, University of California Press, 1965.
  • 1529-1530 : Correspondance de Marguerite d’Autriche et de ses ambassadeurs à la cour de France concernant l’exécution du Traité de Cambrai, 1529-1530, éd. Ghislaine De Boom, Bruxelles, Maurice Lamertin, 1935.

Plusieurs lettres concernant le tombeau de Brou (1506-1529) figurent dans les «Pièces Justificatives» de l’ouvrage de Max Bruchet, Marguerite d’Autriche, Duchesse de Savoie, Lille, L. Danel, 1927, 301-447. D’après Charity Cannon Willard, beaucoup de lettres de Marguerite d’Autriche restent inédites.

CHOIX BIBLIOGRAPHIQUE

  • Bruchet, Max, Marguerite d’Autriche, duchesse de Savoie, Lille, L. Danel, 1927.
  • Carton de Wiart, Comte Henry. Marguerite d’Autriche, une princesse belge de la Renaissance, Paris, Grasset, 1935.
  • De Boom, Ghislaine, Marguerite d’Autriche-Savoie et la Pré-Renaissance, Paris, Droz, 1935.
  • Ionghe, Jane de, Margaret of Austria, Regent of the Netherlands, Trad. par M. D. Herter Norton, New York, W. W. Norton and Company, 1953.
  • Eichberger, Dagmar (éd.), Women of Distinction, Margaret of York – Margaret of Austria, Davidsfonds, Louvain, Brepols, 2005.

JUGEMENTS

  • «J’ai alors choisi pour sujet de l’ouvrage La noblesse et la précellence du sexe féminin, et je n’ai pas jugé déplacé de la consacrer et de la dédier à une princesse qui, plus que toutes les femmes illustres de notre siècle, m’est apparu comme un exemple unique de la noblesse et de l’excellence des femmes ...» (Corneille Agrippa, «Lettre adressée à Maximilien d’Outremont, conseiller de l’empereur Charles V, 1529», traduction de Charles Béné dans De nobilitate et praecellentia foeminei sexus, éd. Charles Béné, Genève, 1990, p.92).
  • «Nous voudrions [...] disculper Marguerite d’une accusation banale que la plupart de nos historiens font peser sur elle. A les entendre, cette princesse, toujours outrée de l’affront qu’elle avait reçu par son renvoi de la cour de Charles VIII, aurait conservé contre la France une haine implacable, un désir perpétuel de vengeance. [...] rien dans sa conduite, ni dans ses paroles ne décèle une rancune systématique. Marguerite ne fait alors que remplir les devoirs de sa position. [...] Enfin, dans la dernière lettre que sa main ait signée, la veille même de sa mort, ne recommande-t-elle pas à l’Empereur, son neveu, de rester toujours en paix avec la France?» (André Le Glay, «Notice sur Marguerite d’Autriche, gouvernante du Pays-Bas», Correspondance de Maximilien Ier et de Marguerite d’Autriche, Paris, 1839, t.2, p.464-65).
  • «[Marguerite] est le vrai grand homme de la famille, et, selon moi, le fondateur de la maison d’Autriche, la racine et l’exemple de cette médiocrité forte, rusée, patiente, qui a caractérisé cette maison avec un équilibre de qualités extraordinaire, qui l’a rendu si propre à réussir, à concilier l’inconciliable, à exploiter surtout l’entr’acte du seizième siècle à la Révolution française [...] Elle est, nous le répétons, le vénérable fondateur et de la maison d’Autriche et de la diplomatie – elle est la tante, la nourrice de Charles-Quint, élevé sous sa jupe, à Bruxelles, et par elle devenu l’homme complet, équilibré de toute instruction et de toute langue, de flegme et d’ardeur, de dévotion politique, qui devait exploiter la vieille religion contre la Renaissance» (Jules Michelet, Histoire de France, Paris, 1890, Tome 7, p.177).
  • «Elle n’est point, ni sous le règne de Maximilien, ni sous celui de Charles-Quint, un simple instrument de la politique autrichienne. Elle sert cette politique quand elle le peut. Elle s’en détache quand il le faut [...]. Elle est la femme d’une politique sage et réaliste» (Henry Carton de Wiart, Marguerite d’Autriche, une princesse belge de la Renaissance, Paris, 1935, p.162-63).
  • «Souveraine Dame, elle le fut vraiment, non seulement par la gloire de sa race et de ses unions, par l’éclat de son génie politique, mais aussi par l’immortel prestige de l’art et de la poésie» (Ghislaine de Boom, Marguerite d’Autriche-Savoie, Paris, 1935, p.236).
  • «Il est impossible de parcourir l’histoire des Pays-Bas au commencement du XVIe siècle sans y rencontrer à tout bout de champ Marguerite d’Autriche. Elle y est vraiment la dame du logis. Qu’il s’agisse des arts ou des lettres, de la politique ou de l’administration, on y retrouve partout les traces de son passage. Et si l’on songe aux vicissitudes extraordinaires que le sort a infligées à cette femme demeurée malgré tout si active et si vivante, on comprendra qu’elle ait séduit presque tous ceux qui se sont occupés d’elle» (Henri Pirenne, Préface à Marguerite d’Autriche-Savoie de Ghislaine de Boom, Paris, 1935).
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