Anne Boger : Différence entre versions
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| naissance = 6 juillet 1671 | | naissance = 6 juillet 1671 |
Version du 3 mars 2013 à 16:55
Anne Boger | ||
Conjoint(s) | François Margaritte Pommier, maître, avocat et procureur fiscal de l’ancienne baronnie de Pont-l’Abbé | |
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Biographie | ||
Date de naissance | 6 juillet 1671 | |
Date de décès | 14 juillet 1752 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
Sommaire
Notice d'André Chatalic, 2013
Anne Boger est née le 6 juillet 1671 à Locronan, à quelques lieues de Quimper en Bretagne, et elle y est morte le 14 juillet 1752. Locronan est alors une petite ville prospère, siège de plusieurs justices seigneuriales et centre d’une « manufacture » rurale de toiles à voiles (des ateliers dispersés et indépendants) qui fournit non seulement la marine royale de France, mais aussi celles d’autres pays comme l’Angleterre ou l’Espagne. Les parents d’Anne Boger, Guillaume Boger (ou Bocher) et Marie Marzin, ont eu treize enfants dont six (un garçon et cinq filles) ont vécu jusqu’à leur mariage. Le père, à la fois marchand-boucher, c’est-à-dire marchand de bétail, et débitant de vin, faisait partie de la bourgeoisie locale et a donné une éducation soignée à ses enfants comme le montre l’examen des signatures élégantes des cinq sœurs. Les conjoints des six enfants mariés seront tous fils ou fille de marchands ou d’un homme de loi. Quant à Anne, elle épouse, à vingt-cinq ans, le 6 août 1696, François Margaritte Pommier, maître, avocat et procureur fiscal de l’ancienne baronnie de Pont-l’Abbé. Il lui donne cinq enfants dont deux seulement survivront : Jean-François et Corentin-Louis. La famille se partage entre la région de Pont-L’Abbé, où le mari a sans doute conservé ses fonctions juridiques, et Locronan, où il est aussi marchand de toiles.
Après le décès de son mari vers 1706, Anne Boger reprend le commerce de toiles de son mari, ainsi que celui de ses parents. Elle choisit de rester veuve et signe désormais la Pommier (sur les actes officiels, elle est « Demoiselle (veuve) » Pommier ou Boger). Ses affaires ne se développent vraiment qu’après 1720, date de la relance de la Compagnie des Indes à Port-Louis près de Lorient. Alors qu’elle payait 4 livres de capitation en 1720, comme la plupart des autres bourgeois de la ville, sa contribution bondit à 37 livres en 1742, alors que celle du deuxième contribuable de la ville ne s’élève qu’à 10 livres. Ses nombreux achats immobiliers à Locronan, ainsi que les prêts qu’elle accorde sous forme d’obligations ou de rentes constituées, sont autant de preuves de la bonne marche de ses affaires. À sa fonction de chef d’entreprise, elle ajoute donc celle de banquière.
A partir de 1720, tout en restant l’unique propriétaire de l’entreprise, elle se fait aider par son fils Jean-François qui reçoit, en 1730, une importante donation de l’ordre de 10 000 livres et la promesse de recevoir au décès de sa mère « tous ses meubles, mêmes ses chevaux, vaches, brebis et mouches à miel, avec sa manufacture de toiles et tous ses fils », en remerciement des très grands services rendus « pour son commerce de toile pour le service du Roy et de la Compagnie des Indes ». Mais, alors qu’elle est veuve depuis trente ans, Anne Boger perd ses deux fils, encore célibataires : Jean-François disparaît le 4 février 1736 et son frère Corentin-Louis le 8 mars 1740. Faute d’héritier direct, elle choisit Pierre Chardon, l’époux de sa nièce Marie Anne Penhoat, pour l’assister dans la direction de son entreprise.
Ses achats immobiliers sont peu nombreux dans les années 1740, preuve du déclin probable de sa « manufacture ». À l’occasion d’un règlement permettant le contrôle de la qualité des toiles, les artisans tisserands se plaignent pourtant en 1742 que cet édit a surtout servi à conforter le monopole d’Anne Boger sur la production.
La réussite économique et sociale d’Anne Boger est aussi illustrée par une fondation de 3400 livres qu’elle fait en 1740 au bénéfice de la fabrique de l’église Saint-Ronan, pour le repos de son âme et de celles de ses ancêtres. Quand elle décède, douze ans plus tard, elle laisse une fortune, considérable pour l’époque, de l’ordre d’une centaine de milliers de livres, et cède son entreprise à Pierre Chardon.
Effacée de la mémoire locale (sa belle demeure en bas de la Grande Place de Locronan est connue comme « l’hôtel de la Compagnie des Indes »), Anne Boger semble un cas exceptionnel de réussite féminine. Décriée en son temps, elle mérite d’être comparée à d’autres négociantes de Bretagne et d’ailleurs dont l’importance économique est restée longtemps méconnue.