Honorine Crozat du Châtel : Différence entre versions
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Sa sœur aînée Antoinette-Eustachie épouse en 1744 le duc de Gontaut; elle prend pour amant le comte Etienne-François de Choiseul-Stainville, futur duc de Choiseul et décède en 1747 trois jours après avoir donné naissance au futur duc de Lauzun. | Sa sœur aînée Antoinette-Eustachie épouse en 1744 le duc de Gontaut; elle prend pour amant le comte Etienne-François de Choiseul-Stainville, futur duc de Choiseul et décède en 1747 trois jours après avoir donné naissance au futur duc de Lauzun. | ||
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Honorine Crozat du Châtel | ||
Titre(s) | Duchesse de Choiseul | |
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Conjoint(s) | Etienne-François de Choiseul-Stainville, comte de, puis duc de | |
Dénomination(s) | Louise Honorine Crozat du Châtel, duchesse de Choiseul | |
Biographie | ||
Date de naissance | 1734 | |
Date de décès | 1801 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
Sommaire
Notice de Mélinda Caron et Marianne Charrier-Vozel, 2016.
Louise Honorine de Crozat du Châtel est née en 1734. Elle est la petite-fille d’Antoine Crozat, fondateur de la Compagnie de la Louisiane et une des premières fortunes de France sous Louis XIV. Dans une lettre envoyée à Mme du Deffand, Louise Honorine évoque une éducation peu satisfaisante qu’elle ne doit ni aux livres ni aux préceptes. C’est à l’école du malheur, «la meilleure de toutes», qu’elle doit sa grandeur d’âme. Sa sœur aînée Antoinette-Eustachie épouse en 1744 le duc de Gontaut; elle prend pour amant le comte Etienne-François de Choiseul-Stainville, futur duc de Choiseul et décède en 1747 trois jours après avoir donné naissance au futur duc de Lauzun. Le 22 décembre 1750, Louise Honorine respecte la promesse qu’elle a faite à sa sœur sur son lit de mort en épousant Etienne-François, sans fortune, à qui elle apporte une dot de plus de cent vingt mille livres de rente. Elle fait une fausse couche un an après son mariage. Louise Honorine accompagne son époux nommé ambassadeur à Rome en 1753 où les rejoint l’abbé Barthélémy en 1755. Elle côtoie alors savants, artistes et mène une vie de réceptions et de distractions. Après un séjour à Vienne, le couple revient à Paris en 1758. Le duc de Choiseul obtient les secrétariats d’Etat aux Affaires étrangères de 1758 à 1761, à la Guerre de 1761 à 1771 puis à la Marine de 1761 à 1766. Il devient ainsi de fait Premier Ministre de Louis XV. L’entourage de Mme de Choiseul s’attache à souligner la patience, la modération et la prudence d’une femme dont l’époux est un séducteur volage qui la trompe publiquement. La duchesse trouve dans l’amitié avec Mme du Deffand et l’abbé Barthélémy une consolation aux maux de la vie. La fin de l’année 1770 est marquée par la disgrâce du duc de Choiseul exilé dans sa propriété de Chanteloup, en Touraine, par Louis XV. Mme de Choiseul, que rejoignent le duc de Lauzun et Mme de Grammont, découvre à Chanteloup les joies d’une vie simple, loin des artifices de la cour. Elle administre parfaitement le domaine, s’intéresse à l’élevage et à la culture. Elle lit les Mémoires de Mme de Maintenon et joue la comédie avec ses amis tandis qu’elle reçoit la visite de hautes personnalités qui bravent ainsi l’autorité royale. Mme de Choiseul fait preuve de dignité et de fierté dans l’exil. En juillet 1771, elle se querelle avec Mme du Deffand à propos de Mme d’Aiguillon, mère du duc d’Aiguillon dont la nomination aux Affaires étrangères est imminente. Louise Honorine reproche à son amie d’avoir rapporté des propos élogieux à Mme d’Aiguillon, donnant l’impression de quémander sa bienveillance. L’amitié que Mme du Deffand entretient avec Voltaire est source d’une seconde querelle; dans sa correspondance, Mme de Choiseul affirme n’éprouver que dégoût et pitié pour celui qui «souffle le froid et le chaud». Pourtant, elle aide Voltaire en 1770 dans la commercialisation des montres fabriquées à Ferney. Elle n’est pas plus indulgente pour Rousseau dont elle critique, dans une lettre écrite en 1766, le masque de vertu. A partir de 1771, la santé de la duchesse s’altère. La demeure de Chanteloup est froide l’hiver et vétuste. Mais dans la correspondance échangée avec Mme du Deffand de 1761 à 1780, la duchesse exprime une philosophie de la vie fondée sur la tempérance et la raison. Elle ne trouve nul réconfort dans la religion et affirme sa méfiance à l’égard du conformisme. En 1774, le roi Louis XV meurt de la petite vérole. Les Choiseul reviennent à Paris et font édifier à Chanteloup, en 1778, la Pagode qui témoigne de la fidélité de tous ceux qui leur ont rendu visite pendant leur exil. A la fin de sa vie, la duchesse s’occupe beaucoup de ses nièces et de ses neveux. Après la mort de son époux qui ne lui laisse que des dettes en 1785, elle se retire au couvent des Récolettes, rue du Bac, à Paris. Alors que la Révolution supprime les couvents, elle s’installe définitivement rue Saint-Dominique. Mme de Choiseul est arrêtée en 1794 sur l’ordre du Comité de sûreté générale. Elle reste six mois dans la prison des Oiseaux mais elle échappe à la guillotine. Elle intervient auprès de Bonaparte pour que son neveu le comte de Choiseul-Stainville soit radié de la liste des émigrés. Elle meurt le 3 décembre 1801 dans le plus grand dénuement. La postérité retient la figure d’une femme exemplaire, qui n’a pas sacrifié à la mode de la sensibilité, ainsi que la qualité de sa correspondance échangée avec Mme du Deffand et l’abbé Barthélemy.
Oeuvres
- Mémoires de M. le duc de Choiseul écrits par lui-même et imprimés sous ses yeux, dans son cabinet à Chanteloup en 1778. Suivi des Opuscules de Mme la Duchesse de Choiseul, publié par Soulavie, Chanteloup et Paris, Buisson, 1790.
- Unpublished Correspondence of Mme du Deffand with D’Alembert, Montesquieu, the president Hénault, the duchess du Maine, mesdames de Staal, de Choiseul, the marquis d’Argens, the chevalier d’Aydie, &c., éd. Mary Berry, Londres, A.K. Newman & Co, 1809, 2 vol.
- Correspondance inédite de Mme du Deffand avec D’Alembert, Montesquieu, le président Hénault, la duchesse du Maine, mesdames de Choiseul, de Staal, le marquis d'Argens, le chevalier d'Aydie, etc. Suivie des lettres de M. de Voltaire à Mme du Deffand..., Paris, L. Collin, 1809, 2 vol.
- Correspondance inédite de Mme du Deffand, précédée d'une notice, par le marquis de Sainte-Aulaire, Paris, Michel Lévy frères, 1859, 2 vol.
- Correspondance complète de Mme du Deffand avec la duchesse de Choiseul, l'abbé Barthélemy et M. Craufurt, éd. marquis de Sainte-Aulaire, nouvelle éd. revue et considérablement augmentée, Paris, Michel Lévy frères, 1866, 3 vol.
- Quelques lettres inédites de la marquise du Châtelet et de la duchesse de Choiseul, éd. Ernest Jovy, Paris, H. Leclerc, 1906.
- Voltaire’s Correspondence, éd. Theodore Besterman, Genève, Institut et musée Voltaire, 1953-1965.
- Lettres de Mme du Deffand, 1742-1780, préface de Chantal Thomas, Paris, Mercure de France, 2002.
- Correspondance croisée avec la duchesse de Choiseul et l’abbé Barthélemy, augmentée de très nombreux inédits, éd. Pierre E. Richard, Nîmes, copyright Pierre E. Richard, 2011, 2 vol.
Choix bibliographique
- Chanteloup. Un moment de grâce autour du duc de Choiseul, Catalogue d’exposition (Tours, Musée des Beau-Arts), Tours, Somogy éditions d’art, 2007.
- Craveri, Benedetta, «Louise-Honorine Crozat du Châtel, duchesse de Choiseul “une raisonneuse” de talent», dans Par les siècles et par les genres. Mélanges en l'honneur de Giorgetto Giorgi, dir. Elisabeth Schulze-Busacker et Vittorio Fortunati, Paris, Classiques Garnier, 2014, p.195-212.
- Grasset, Joseph, Madame de Choiseul et son temps, étude sur la société française à la fin du XVIIIe siècle, Paris, Didier, 1874.
- Lenormant, Charles et al., Recueil. Dossiers bibliographiques. Documentation sur Louise Honorine Crozat du Châtel, duchesse de Choiseul, Paris, Le Correspondant, Revue bleue, 1859-1897.
- Maugras, Gaston, La Duchesse de Choiseul et le patriarche de Ferney, Paris, C. Lévy, 1889.
- Maugras, Gaston, La Disgrâce du duc et de la duchesse de Choiseul, la vie à Chanteloup, le retour à Paris, la mort, Paris, Plon-Nourrit et Cie, 1903.
Choix iconograhique
- sd: «Portrait de la duchesse de Choiseul», dans Gaston Maugras, Le Duc et la duchesse de Choiseul, leur vie intime, Paris, Librairie Plon, 1903, sans pagination et sans nom d’auteur.
Jugements
- «My last new passion, and I think the strongest, is the Duchess de Choiseul. Her face is pretty, not very pretty; her person a little model. Cheerful, modest, full of attentions, with the happiest propriety of expression, and greatest quickness of reason and judgement, you would take her for the queen of an allegory: one dreads its finishing, as much as lover, if she would admit one, would wish it should finish.» (Horace Walpole, Letter to lady Hervey, 11 janvier 1766, dans Horace Walpole’s Correspondence, éd. Wilmarth Sheldon Lewis, New Haven, Yale University Press, 1961, t. 31, p. 95-96)
- «La nature vous a fait naître avec tant de chaleur et de passion, qu’on juge que si elle ne vous avait pas aussi donné infiniment de raison, et que vous ne l’eussiez fortifiée par de continuelles et solides réflexions, vous auriez eu bien de la peine à devenir aussi parfaite, et c’est peut-être ce qui fait qu’on vous pardonne de l’être.» («Portrait de la duchesse de Choiseul par Mme du Deffand», dans Correspondance complète de Mme du Deffand avec la duchesse de Choiseul, l’abbé Barthélemy et M. Craufurt, éd. marquis de Saint-Aulaire, Paris, Michel Lévy Frères, 1866, t.1, p.71)
- «Elle avait formé son esprit en même temps que son cœur et malgré sa modestie, on découvrait bien vite la variété et l’étendue de ses connaissances. Douée d’une remarquable promptitude de raison et de jugement, elle savait donner à sa pensée, le tour le plus heureux avec une parfaite propriété d’expressions.» (Gaston Maugras, Le Duc et la duchesse de Choiseul, leur vie intime, leurs amis et leur temps, Paris, Plon-Nourrit et Cie, 1902. p.16-17)
- «Par ce contentement sans révolte elle n’est guère de son siècle. Elle ne l’est pas davantage par son aversion égale pour la raillerie sèche et pour l’enthousiasme débordant. Entre le ricanement de Voltaire et les larmes de Rousseau, elle reste sérieuse sans emportement. […] Elle méprise le caractère de Voltaire, elle blâme ses excès: mais elle est voltairienne jusqu’au fond de son âme.» (Gustave Lanson, Choix de lettres du XVIIIe siècle, Paris, Hachette et Cie, 1918, p.396)
- «Timide, sans enfants, dépouillée de toute autorité domestique par son arrogante belle-sœur, Mme de Gramont, pour laquelle Choiseul nourrit une affection presque incestueuse, la jeune duchesse se contente de vénérer son mari, sans renoncer à l’idée que, peut-être un jour, elle pourra être aimée à son tour. Le parallélisme avec Mme du Deffand est évident. Les deux femmes suivent obstinément leurs passions; si l’amitié joue un rôle consolateur et s’efforce de se substituer à ces passions, elle contribue aussi à alimenter celles-ci. En se confiant leurs peines et leurs illusions, les deux amies donnent de la consistance à des sentiments dont l’objet est, soit absent [i.e. Walpole], soit indifférent [i.e. le duc de Choiseul].» (Benedetta Craveri, Madame du Deffand et son monde, trad. Sibylle Zavriew, Paris, Seuil, 1987 [Madame du Deffand e il suo mondo, Milano, Adelphi, 1982], p.431)
- «Les lettres de la duchesse de Choiseul ne nous racontent pas seulement le mode de vie et les formes de sensibilité propre à la société aristocratique qui n’en finissait pas de s’analyser et de se mettre en scène jour après jour, mais elles nous en restituent également, et de manière directe, l’élégance de la langue et la grâce du style. En effet, la duchesse est une merveilleuse “raisonneuse” qui aime exprimer ses pensées et ses sentiments, faire des commentaires sur les personnes et leurs comportements, exprimer son opinion sur l’actualité politique et littéraire. Autodidacte, elle a acquis une certaine culture à la suite de nombreuses et systématiques lectures – dont elle évite de se vanter – et à l’“école du monde”, étant à l’écoute aussi bien des conversations de la “parfaitement bonne compagnie” que des entretiens de son mari avec ses amis et collaborateurs.» (Benedetta Craveri, «Louise-Honorine Crozat du Châtel, duchesse de Choiseul, “une raisonneuse” de talent», dans Par les siècles et par les genres. Mélanges en l'honneur de Giorgetto Giorgi, dir. Elisabeth Schulze-Busacker et Vittorio Fortunati, Paris, Classiques Garnier, 2014, p.211)