Philippe de Gueldre : Différence entre versions

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Philippe de Gueldre et son frère Charles naissent le 22 novembre 1467 de Catherine de Bourbon (belle-sœur de Charles le Téméraire) et d’Adolphe d’Egmont (petit-neveu de Philippe le Bon), duc de Gueldre. Les deux enfants reçoivent d’ailleurs leurs prénoms en référence aux deux ducs de Bourgogne. La jeune Philippe, élevée par l’épouse du Téméraire, Marguerite d’York, constitue très vite un enjeu pour le contrôle de la Gueldre (aujourd’hui située aux Pays-Bas), suscitant les demandes en mariage de la part de la maison de Clèves (dont les terres la jouxtent). Le traité d’Arras vient rebattre les cartes matrimoniales : Charles demeure à la cour de Bourgogne alors que sa sœur Philippe rejoint la cour de France, réclamée par les Beaujeu (dont elle est la nièce). Anne de France y parfait son éducation et l’implique dans ses visées matrimoniales. Afin de briser toute ligue entre les grands féodaux, Philippe épouse le duc de Lorraine René II le 1er septembre 1485 à Orléans. Ce dernier se trouve alors sans enfants et se prête volontiers aux termes de l’échange.<br/>
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Philippe de Gueldre et son frère Charles naissent le 22 novembre 1467 de Catherine de Bourbon (belle-sœur de Charles le Téméraire) et d’Adolphe d’Egmont (petit-neveu de Philippe le Bon), duc de Gueldre. Les deux enfants reçoivent d’ailleurs leurs prénoms en référence aux deux ducs de Bourgogne. La jeune Philippe, élevée par l’épouse du Téméraire, Marguerite d’York, constitue très vite un enjeu pour le contrôle de la Gueldre (aujourd’hui située aux Pays-Bas), suscitant les demandes en mariage de la part de la maison de Clèves (dont les terres la jouxtent). Le traité d’Arras vient rebattre les cartes matrimoniales : Charles demeure à la cour de Bourgogne alors que sa sœur Philippe rejoint la cour de France, réclamée par les Beaujeu (dont elle est la nièce). [[Anne de France]] y parfait son éducation et l’implique dans ses visées matrimoniales. Afin de briser toute ligue entre les grands féodaux, Philippe épouse le duc de Lorraine René II le 1er septembre 1485 à Orléans. Ce dernier se trouve alors sans enfants et se prête volontiers aux termes de l’échange.<br/>
 
Duchesse de Lorraine et de Bar, Philippe de Gueldre participe à la continuité dynastique, à la vie de cour et à la construction de l’État lorrain. Douze maternités scandent sa vie dans une cour se déplaçant entre Lorraine et Barrois. La duchesse ne dédaigne pas non plus de visiter les couvents, où elle réside souvent lors de ses grossesses. Le choix des prénoms de ses enfants souligne la spiritualité exigeante, d’inspiration franciscaine, du couple ducal. Forte de sa capacité à assurer l’avenir de la dynastie (cinq enfants survivent), Philippe exerce un rôle actif dans le gouvernement de l’État lorrain lors des absences du duc. En matière diplomatique, Philippe remplit des missions de pacification : elle se rend à Metz pour sceller la paix retrouvée avec la cité impériale (1494), rencontre Louis XII et Anne de Bretagne à Lyon (1501). Cette dernière lui remet alors l’insigne de la cordelière (insigne d’un ordre chevaleresque créé par Anne de Bretagne en référence à François d’Assise et à la corde à nœuds de son ordre) : les deux femmes partagent un rapport semblable au pouvoir et à la spiritualité. Elles figurent ainsi parmi les principales actrices du marché des reliques sacrées autour de 1500.<br/>
 
Duchesse de Lorraine et de Bar, Philippe de Gueldre participe à la continuité dynastique, à la vie de cour et à la construction de l’État lorrain. Douze maternités scandent sa vie dans une cour se déplaçant entre Lorraine et Barrois. La duchesse ne dédaigne pas non plus de visiter les couvents, où elle réside souvent lors de ses grossesses. Le choix des prénoms de ses enfants souligne la spiritualité exigeante, d’inspiration franciscaine, du couple ducal. Forte de sa capacité à assurer l’avenir de la dynastie (cinq enfants survivent), Philippe exerce un rôle actif dans le gouvernement de l’État lorrain lors des absences du duc. En matière diplomatique, Philippe remplit des missions de pacification : elle se rend à Metz pour sceller la paix retrouvée avec la cité impériale (1494), rencontre Louis XII et Anne de Bretagne à Lyon (1501). Cette dernière lui remet alors l’insigne de la cordelière (insigne d’un ordre chevaleresque créé par Anne de Bretagne en référence à François d’Assise et à la corde à nœuds de son ordre) : les deux femmes partagent un rapport semblable au pouvoir et à la spiritualité. Elles figurent ainsi parmi les principales actrices du marché des reliques sacrées autour de 1500.<br/>
 
La mort de René II, le 10 décembre 1508, laisse entrevoir à Philippe de Gueldre la possibilité d’exercer le pouvoir en Lorraine. Mais les États de ce duché la contraignent à se retirer au profit de son fils Antoine. Et si ce dernier lui confère la lieutenance de ses États lors de ses absences, ses relations avec sa mère sont compliquées, et une transaction s’avère nécessaire (1516).<br/>
 
La mort de René II, le 10 décembre 1508, laisse entrevoir à Philippe de Gueldre la possibilité d’exercer le pouvoir en Lorraine. Mais les États de ce duché la contraignent à se retirer au profit de son fils Antoine. Et si ce dernier lui confère la lieutenance de ses États lors de ses absences, ses relations avec sa mère sont compliquées, et une transaction s’avère nécessaire (1516).<br/>

Version du 25 mars 2018 à 15:22

Philippe de Gueldre
Titre(s) Duchesse de Lorraine et de Bar
Reine de Sicile
Conjoint(s) René II (1451-1508), duc de Lorraine et de Bar, comte de Vaudémont, d’Aumale, baron d’Elbeuf, de Mayenne, sire de Joinville
Dénomination(s) sœur Philippe de Gueldre, le « povre ver de terre »
Biographie
Date de naissance 9 novembre 1467
Date de décès 26 février 1547
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)
Dictionnaire Hilarion de Coste (1647)


Notice de Ghislain Tranié, 2018

Philippe de Gueldre et son frère Charles naissent le 22 novembre 1467 de Catherine de Bourbon (belle-sœur de Charles le Téméraire) et d’Adolphe d’Egmont (petit-neveu de Philippe le Bon), duc de Gueldre. Les deux enfants reçoivent d’ailleurs leurs prénoms en référence aux deux ducs de Bourgogne. La jeune Philippe, élevée par l’épouse du Téméraire, Marguerite d’York, constitue très vite un enjeu pour le contrôle de la Gueldre (aujourd’hui située aux Pays-Bas), suscitant les demandes en mariage de la part de la maison de Clèves (dont les terres la jouxtent). Le traité d’Arras vient rebattre les cartes matrimoniales : Charles demeure à la cour de Bourgogne alors que sa sœur Philippe rejoint la cour de France, réclamée par les Beaujeu (dont elle est la nièce). Anne de France y parfait son éducation et l’implique dans ses visées matrimoniales. Afin de briser toute ligue entre les grands féodaux, Philippe épouse le duc de Lorraine René II le 1er septembre 1485 à Orléans. Ce dernier se trouve alors sans enfants et se prête volontiers aux termes de l’échange.
Duchesse de Lorraine et de Bar, Philippe de Gueldre participe à la continuité dynastique, à la vie de cour et à la construction de l’État lorrain. Douze maternités scandent sa vie dans une cour se déplaçant entre Lorraine et Barrois. La duchesse ne dédaigne pas non plus de visiter les couvents, où elle réside souvent lors de ses grossesses. Le choix des prénoms de ses enfants souligne la spiritualité exigeante, d’inspiration franciscaine, du couple ducal. Forte de sa capacité à assurer l’avenir de la dynastie (cinq enfants survivent), Philippe exerce un rôle actif dans le gouvernement de l’État lorrain lors des absences du duc. En matière diplomatique, Philippe remplit des missions de pacification : elle se rend à Metz pour sceller la paix retrouvée avec la cité impériale (1494), rencontre Louis XII et Anne de Bretagne à Lyon (1501). Cette dernière lui remet alors l’insigne de la cordelière (insigne d’un ordre chevaleresque créé par Anne de Bretagne en référence à François d’Assise et à la corde à nœuds de son ordre) : les deux femmes partagent un rapport semblable au pouvoir et à la spiritualité. Elles figurent ainsi parmi les principales actrices du marché des reliques sacrées autour de 1500.
La mort de René II, le 10 décembre 1508, laisse entrevoir à Philippe de Gueldre la possibilité d’exercer le pouvoir en Lorraine. Mais les États de ce duché la contraignent à se retirer au profit de son fils Antoine. Et si ce dernier lui confère la lieutenance de ses États lors de ses absences, ses relations avec sa mère sont compliquées, et une transaction s’avère nécessaire (1516).
Dès lors, et à l’instar de sa belle-sœur Marguerite de Lorraine, Philippe prépare sa retraite. Elle entre au monastère des clarisses colettines de Pont-à-Mousson en 1519 et y fait sa profession l’année suivante. Elle refuse le titre d’abbesse mais déploie un patronage protégeant le couvent puis l’ensemble des Clarisses face à la diffusion des idées luthériennes. La mystique affective qu’elle pratique trouve là un espace privilégié d’expression (elle aurait eu une vision de la bataille de Pavie le 25 février 1525) à un moment où les princes lorrains se représentent comme des guerriers de Dieu. Sœur Philippe y prend toute sa part, à travers le mécénat et une influence allant jusqu’à Rome, en raison de ses relations privilégiées avec les généraux franciscains successifs. Cette situation lui permet d’exercer un pouvoir qui lui avait été refusé à la cour de Lorraine, recevant tous les hôtes importants de passage, et même Charles Quint en 1544.
Sa santé se dégrade au début de la décennie 1540. Elle meurt le 28 février 1547. Ses funérailles fastueuses ont lieu en présence des régents de Lorraine, qui passent commande à Ligier Richier d’un monument funéraire achevé en 1548 (aujourd’hui visible au musée Lorrain). Entre la fin du XVIe siècle et le début du XVIIIe siècle, les discours sur Philippe de Gueldre façonnent l’image d’une véritable sainte régionale. Plusieurs biographies spirituelles sont publiées, moins pour célébrer la maison princière que pour exalter la catholicité du duché. Figure populaire et non plus dynastique, Philippe de Gueldre intègre le panthéon des saints lorrains, même si son souvenir tend à s’effacer après la réunion de la Lorraine à la France en 1737. Ailleurs, son souvenir demeure surtout cultivé dans les milieux franciscains, où elle est portée au nombre des bienheureuses.

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