Marthe d'Oraison

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Marthe d'Oraison
Titre(s) Baronne d'Allemagne-en-Provence,
Conjoint(s) Alexandre du Mas de Castellane-Allemagne, baron d'Allemagne, vicomte de Valernes
Dénomination(s) Marthe d'Oraison, soeur Marie
Biographie
Date de naissance 1590
Date de décès 30 mais 1627
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)
Dictionnaire Hilarion de Coste (1647)


Notice de Régis Bertrand, 2011

Née en 1590, Marthe perd ses parents, François de Laigue, marquis d’Oraison, vicomte de Cadenet, et Madeleine «de la Louve» (Louvet de Nogaret?), à l’âge de quatre ans. Le 14 octobre 1610, elle épouse Alexandre du Mas de Castellane, baron d’Allemagne (Alpes-de-Haute-Provence) et vicomte de Valernes, qui meurt l’année suivante dans un duel. Bien que «jeune et belle par excellence», souligne l’un de ses hagiographes, le capucin Marc de Bauduen, elle refuse toute demande en mariage. D’une grande austérité, elle élève sa fille et multiplie oeuvres de charité et exercices de piété, sous la direction des capucins. Par leur intermédiaire, elle rencontre Véronique Bonaud, née Martelly, une modeste laïque de Pertuis, qui devient sa directrice spirituelle et qui lui impose des humiliations publiques, inversant ainsi leurs rapports de classe. Ayant sollicité en vain, vers 1621-1622, son admission au couvent des capucines de Paris, le seul existant alors en France ‒ leurs statuts interdisaient l’entrée aux veuves ‒, elle se voit conseiller par leur supérieure de fonder un établissement semblable en Provence, où elle pourrait être reçue en qualité de fondatrice. Munie de l’autorisation du pape Urbain VIII (15 octobre 1622), elle ouvre donc un couvent de capucines à Marseille en juillet 1623, avec sa fille Gabrielle, marquise de Villeneuve des Arcs. Le 20 février 1626, le général des capucins envoie trois religieuses parisiennes à Marseille pour aider à la fondation. Dans l’attente de leur arrivée, Marthe exerce la charge de supérieure provisoire des postulantes et commence à ses frais la construction du monastère. Néanmoins, aux dires de ses hagiographes, les austérités qu’elle s’inflige posent problème à la communauté. Le vicaire général, représentant l’autorité épiscopale, lui demande alors de se retirer au couvent de la Visitation de Marseille. Une fois les capucines parisiennes arrivées à Marseille, elle obtient, non sans mal, d’être reçue à la vêture avec les autres postulantes le 19 juillet 1626. Ses mortifications continuent cependant à inquiéter ses supérieurs, alors qu’ils soutiennent, par contre, Agnès d’Aguillenqui, qui, dans le même couvent, s’inflige de semblables humiliations et se heurte, elle aussi, à l'abbesse et à sa communauté. Marthe d’Oraison, en religion sœur Marie, décide alors de se rendre à Paris, en dépit de l’opposition de sa fille et de son gendre, dans l’espoir renouvelé de pouvoir faire profession chez les capucines parisiennes. Elle y est froidement par l'abbesse qui refuse toujours d’accueillir une veuve. Elle doit alors quitter l’habit de novice, le nonce et l’archevêque jugeant que c’était un exemple déplorable « de voir par Paris une demy-capucine sur le pavé » (Bonnet, p. 185). Établie dans la capitale, elle y achève précocement sa vie le 30 mai 1627, dans une pauvreté et une humiliation volontaires, après avoir soigné quotidiennement les malades de l’Hôtel-Dieu. L’archevêque Gondi autorise tout de même l’inhumation de la défunte, revêtue de l’habit de novice, au couvent des capucines.
La vie de cette femme de bonne noblesse, qui ne put satisfaire son désir de se cloîtrer, se livra à des mortifications controversées ‒ moins peut-être par leur rigueur que par le statut de celle qui s’abaissait à se les infliger ‒ et mourut en héroïne de la charité, n’est pas réductible à une analyse psychologique sommaire. Elle a suscité chez ses biographes fascination et perplexité : ils suggèrent une quête de sainteté et l’admirent, mais sans se risquer à la proposer en exemple. En effet, son obstination à s’adonner à de rudes pratiques ascétiques contre l’avis de ses supérieurs a sans aucun doute été considérée comme un acte d’insoumission trahissant un esprit indépendant peu prisé dans le contexte religieux de l’époque. Par ailleurs, son état de novice rejetée par sa communauté ne fait pas d’elle un modèle remarquable aux yeux de certains ecclésiastiques qui n’aiment pas les statuts mal définis. Elle a toutefois fait l’objet de deux biographies spirituelles qui l’ont classée dans le catalogue des héroïnes chrétiennes de la Réforme catholique.

Choix bibliographique

  • Bauduen, Marc de, La vie admirable de la très illustre et très vertueuse Dame Marthe d’Oraison, baronne d’Allemagne, vicomtesse de Valernes, Rouen, F. Vaultier, 1680 [Paris, Pierre Bonnet, 1632] [1].
  • Bonnet, Pierre, L’amour de la pauvreté descritte en la vie et en la mort de haute et puissante dame Marthe, marquize d’Oraison, baronne d’Alemagne, vicomtesse de Valernes, laquelle décéda en l’Hostel-Dieu de Paris au service des Pauvres en l’année 1627, Paris, Pierre Rocolet, 1632 [2] -- L’auteur est un ecclésiastique d’Avignon, ce qui lui procure une certaine liberté pour parler des rapports de Marthe d’Oraison avec les capucins).
  • Coste, Hilarion de, « Marthe d’Oraison, baronne d’Allemagne et vicomtesse de Valernes », Les éloges et les vies des reynes, des princesses et des dames illustres en piété, en courage et en doctrine qui ont fleury de nostre temps et du temps de nos pères, nouv. éd., Paris, S. Cramoisy et G. Cramoisy, 1647, t.II, p.703-717 (notice qui ne se trouve que dans cette dernière édition de l’ouvrage). Ajouter adresse
  • Munier, Marie-Odile et al., Claire en Provence, Les clarisses de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, Nantes, Siloë, 2003, p.104-109.
  • Tay, Marie, Une héroïne de la charité, Marthe d’Oraison, baronne d’Allemagne, fondatrice des capucines de Marseille, Clermont-Ferrand, Malleval, 1897.