Marie Jonet/Aloïs Delacoux

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[73] DUGÈS (MARIE JONET, dame). Sage-femme en chef de l’Hôtel-Dieu de Paris, née en 1730, morte à la Maternité en 1797, fille de dame Jonet, sage-femme jurée au Châtelet, mère de madame Lachapelle, et aïeule du professeur Dugès.

En 1775, madame Dugès fut nommée sage-femme en chef de l’Hôtel-Dieu; elle s’y établit et en remplit les fonctions avec distinction. Son zèle et son activité dépassèrent souvent les limites de ses fonctions comme sage-femme. De temps immémorial, avant 1793, il n’y avait d’autre asile pour les pauvres femmes enceintes et en couches qu’une salle de l’Hôtel-Dieu, au-dessus de celle des blessés, insalubre par cela même, et trop petite pour le nombre de celles qu’on y recevait; aussi elles y étaient entassées pêle-mêle; plusieurs couchaient ensemble dans le même lit, et souvent par le fait de cet encombrement il y régnait des épidémies désastreu-[74]ses, qui, malgré tous les soins des médecins, en faisaient périr le plus grand nombre. Ce fut pendant le cours de ces épidémies meurtrières que madame Dugès déploya un zèle et un dévouement au-dessus de tout éloge, et qu’elle racheta de la mort un grand nombre de malheureuses, en secondant les vues de Doublet dans l’application du traitement spécial, réglé par cet habile praticien, touchant la fièvre des nouvelles accouchées, appelée si improprement fièvre puerpérale. Sollier de La Romillaie, médecin du même hôpital en 1782, dans un Mémoire qu’il lut en présence de la Faculté de médecine de Paris, se plut à rendre au dévouement de madame Dugès toute la justice qui lui était due, en reconnaissant les importans services qu’elle avait rendus à l’humanité et même à la science en expérimentant si heureusement la méthode de Doublet. Tant de services méritèrent à madame Dugès, plus encore à titre honorifique qu’à titre de récompense, une pension sur la cassette du roi Louis XVI, laquelle pension lui fut garantie par brevet, dont la teneur ajoutait encore au bienfait. Ce fut le baron de Breteuil qui, ayant fait ressortir dans un rapport le dévouement de madame Dugès, obtint cette faveur de la munificence royale.

Les inconvénients qui résultaient de l’ordre de choses concernant le service des femmes en couches de l’Hôtel-Dieu, étaient trop évidens et trop graves pour ne pas éveiller la sollicitude d’un gouvernement qui s’était constitué pour les seuls intérêts du peuple; en 1794 on chercha les moyens d’y remédier, et l’on s’occupa de choisir un édifice salubre par sa situation et son isolement, et propre en même temps à l’instruction. Le Val-de-Grâce fut d’abord indiqué, mais ensuite on désigna définitivement la maison de Port-Royal, [75] aujourd’hui maison d’accouchement. Lorsque tout fut disposé et régularisé dans ce local par les soins de madame Lachapelle, madame Dugès sa mère s’y transporta et s’y établit comme sage-femme en chef. Dès lors on reçut des femmes enceintes, on y admit des élèves, et les leçons y furent continuées telles qu’elles se faisaient auparavant à l’Hôtel-Dieu.

Rendons hommage à cette femme de bien non-seulement pour ses actes de dévouement, l’étendue de son zèle et la réalité de ses services, mais encore comme institutrice. Quand toute sa carrière serait d’avoir formé l’éducation obstétricale de sa fille, qui s’est élevée au plus haut degré de la science des accouchemens, elle eût fait assez pour bien mériter de la postérité. Sans madame Dugès, notre époque compterait-elle une Lachapelle? Sans cette dernière compterions-nous aujourd’hui tant de sages-femmes recommandables par leur instruction et les services journaliers qu’elles rendent à l’humanité?

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