Madeleine Noble : Différence entre versions

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(Notice de Nicole Pellegrin, 2022)
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* Archives départementales de la Vienne : 6 B 266, Bailliage de Lusignan.
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Archives départementales de la Vienne :  
* Archives départementales de la Charente : 3 E 117/1, registres paroissiaux de Courcôme (1755-1801); 3 E 334/1, registres paroissiaux de Saint-Coutant (1737-1791)
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* 6 B 266, Bailliage de Lusignan.
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Archives départementales de la Charente :  
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* 3 E 117/1, registres paroissiaux de Courcôme (1755-1801)  
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* 3 E 334/1, registres paroissiaux de Saint-Coutant (1737-1791)
 
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Version actuelle en date du 31 août 2022 à 08:58

Madeleine Noble
Dénomination(s) « mademoiselle de Jousserand », « mademoiselle de Jousserand la cadette », « demoiselle de la Voulernie », « Marie Anne »
Biographie
Date de naissance 7 décembre 1760
Date de décès ?
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice de Nicole Pellegrin, 2022

Native d’un écart du bourg de Saint-Coutant (actuel département de la Charente) dans lequel sa mère, Jeanne Beaussand/Beausens/Bosseng, habite encore en 1785, Madeleine Noble est « âgée de 21 ans ou environ » (en fait 24) quand elle dépose le 16 février 1785 dans un procès intenté, pour calomnie, par la sœur d’un ancien maître, une demoiselle noble qui aurait accouché clandestinement et avec qui elle fut un temps peut-être confondue. À ses dires (elle ne sait les contresigner), « elle a eu le malheur detre abusée par le sieur chevalier de Jousserand des œuvres duquel elle a accouchée d’un garçon chés le sieur Joseau chirurgien a Courcôme sur la fin de 1781 [en fait, le 29 janvier 1782], quelle avoit prise chés ce chirurgien le nom de marie anne, […] que son enfans a été porté a la boiste Dangoulesme » trois mois plus tard. Après ce temps (passé chez la femme de son probable accoucheur) et l’abandon – anonyme – de son enfant dans un établissement religieux équipé d’un « tour » ou « boîte », Marie Noble est servante dans plusieurs maisons d’Angoulême pendant 18 mois. Puis, elle revient chez sa mère où elle se dit désormais journalière quand elle est interrogée comme témoin. Elle prétend ne pas savoir avoir été surnommée « mademoiselle de Jousserand », ni connaître les responsables des bruits répandus à l’égard de « la plaintive […] par tant de personnes quelle ne peut en nommer aucune ».
Son bref et tardif témoignage (le 151éme d’une série de 167, tous évasifs à son égard) est en fait la seule source qui permette d’imaginer quelque peu ce que furent les premières années d’une servante de 17-18 ans, analphabète et séduisante, engrossée par le fils de son maître et chassée aussitôt son état connu. À noter que, contrairement à beaucoup d’autres, elle n’a pas eu à déclarer sa grossesse devant un juge seigneurial pour obtenir dédommagement et frais de gésine et se protéger ainsi de l’accusation d’infanticide en cas de mort du nouveau-né. Dans la procédure judiciaire qui la fait connaître mais dont elle n’est pas l’objet, Madeleine Noble se révèle une protagoniste essentielle bien que toujours fantomatique. Elle semble néanmoins avoir épousé à Saint-Coutant le 14 janvier 1788 un tailleur de pierre nommé Charles Dechâtre (son père, Pierre Lenoble, alors décédé, est déclaré « journalier »), mais elle disparaît ensuite des sources mobilisables dans sa région de naissance.
Ce destin de fille-mère est classique, à quelques détails près : d’une part, son choix d’un pseudonyme élégant le temps de sa grossesse ; d’autre part, la prise en charge, en un lieu coûteux, de son accouchement par un séducteur et amant, plus attentionné que de coutume ; enfin, la publicité que celui-ci donne à la naissance de leur enfant par souci – probable – de compromettre sa propre sœur, Marguerite de Jousserand en lui attribuant des relations fécondes hors mariage. Malgré des amours ancillaires connues de toute la contrée, cet homme réussit à se bien marier, quand sa sœur et sa servante ont sans doute perdu l’une et l’autre leur bonne renommée, en ces temps de patriarcat officiel et dominant.
Le cas de Madeleine Noble vaudrait d’être comparé à celui d’autres jeunes femmes, victimes parfois consentantes de leurs maîtres et mères d’enfants qui, abandonnés, sont voués à mourir très vite.

Principales sources manuscrites

Archives départementales de la Vienne :

  • 6 B 266, Bailliage de Lusignan.

Archives départementales de la Charente :

  • 3 E 117/1, registres paroissiaux de Courcôme (1755-1801)
  • 3 E 334/1, registres paroissiaux de Saint-Coutant (1737-1791)

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Choix bibliographique

  • Véronique Demars-Sion, Femmes séduites et abandonnées au 18e siècle. L’exemple du Cambrésis, Hellemes, L’Espace Juridique, 1991, ill.
  • Nicole Pellegrin, « L’art d’accoucher : savoir féminin ou science virile ? », « Former des sages-femmes au XVIIIe siècle », « Des enfants (non) voulus. Filles-mères sous l’Ancien Régime. Abandons d’enfants. Infanticides », « La publication du privé », « À l’origine de l’état-civil : les registres paroissiaux », « Layettes poitevines », in Nicole Pellegrin et Marie-Christine Planchard (dir.), Entrer dans la vie en Poitou du XVIe siècle à nos jours (catalogue d’exposition), Poitiers, Musées de la ville de Poitiers, 1987, p. 31-34, 48-51, 93-102, 125-127, 130-131, 147-149, passim, ill.
  • Nicole Pellegrin, « Rumeurs de déshonneur en Angoumois. La fille du châtelain a accouché clandestinement (1782-1785) », in A.-M. Cocula & M. Combet (dir.), Le Château "à la une" ! Événements et faits divers, Bordeaux, Ausonius, 2009, p. 221-234.
  • Marie-Christine Phan, « Les déclarations de grossesse en France (XVIe-XVIIIe) : essai institutionnel », Revue d’Histoire Moderne et Contemporaine, 1975, p. 105-126.

Jugements

Ces dépositions en justice sont toutes issues des Archives départementales de la Vienne, 6 B 266.

  • Dépose […] « que […] Magdelene noble sa cousinne germaine […] dans ces temps la sortit de la maison de la Voulernie enceinte des œuvres de Monsieur le chavalier de Jousserand et a qui on a donné le nom de Mademoiselle de Jousserand la cadette » (Jeanne Lingault femme de Jean Saulnier sabotier, paroisse du Bouchage, 55 ans ; 10 décembre 1784).
  • Dépose […] « que sur la fin de l’année 1781, on emmena chés lui une fille enceinte des faits du sieur chevalier de la Voulernie, qui demeura chés luy huit mois, et qui prit le nom de Marie anne quelle accoucha d’un garçon sur la fin de février autant quil peut se rappeller en l’année 1782, quil fut baptisé a Courcôme et qu’environ deux mois après il fut porté a la boîte dangoulesme par un quelqu'un dont il ne se rappelle pas le nom qui y conduisit aussy en même temps la mère c’est a dire dans la ville Dangoulesme ou elle saccueillit [devint servante] chés la demoiselle Pressac [épouse du déposant] ou elle resta peu de temps et se raccüellit chés le sieur pontberton négociant, que cette fille etoit habillée comme les paysannes du pays, avec dassées mauvais vêtemens, que c’etoit le sieur chevalier de Jousserand qui devoit payer sa nourriture ches luy et quil est venu l’y voir trois ou quatre fois, que le sieur dalençon desvergnes et la dame son epouse sont allés avec luy […] dans tout le temps quelle a demeurée chés luy n’a jamais été surnommée ni mademoiselle de La Voulernie ni mademoiselle de Jousserand la cadette et n’a été connues sous d’autres noms que celui de Marie anne » (le sieur Charles Joseau, maître chirurgien, paroisse et bourg de Courcôme, 52 ans ; 11 décembre 1784).
  • Dépose « que vers le commencement de l’année 1782 magdelene noble de sa paroisse étant servante au logis de la voulernie y devient grosse des œuvres du sieur chevalier de Jousserand, que des paysans de sa paroisse lui dirent dans ce temps la en parlant de ladite Noble quils qualifioient entre eux de mademoiselle de Jousserand etoit partie de chés sa mère ou elle setoit retirée a la sortie de chés Monsieur de Jousserand et que quelques jours apres ces mêmes paysans lui dirent que Mademoiselle de Jousserand avoit accouchée d’une fille, […] » (messire Etienne Oudin, prêtre curé de la paroisse de Saint-Coutant, 42 ans ; 16 février 1785).


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