Louise-Elisabeth Joybert de Soulanges et Marson

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Louise-Elisabeth Joybert de Soulanges et Marson
Titre(s) Marquise de Vaudreuil
Conjoint(s) Philippe de Rigaud, marquis de Vaudreuil
Biographie
Date de naissance 1673
Date de décès 1740
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice de Julie Roy, 2005.

Fille aînée de Pierre Joybert de Soulanges et Marson, originaire de Champagne, ancien mousquetaire au Portugal dans le régiment de Briquemault et commandant du fort Jemseg (Acadie), et de Marie-Françoise Chartier de Lotbinière, fille du procureur général de la Nouvelle-France, Louise-Élisabeth naît à Jemseg le 18 août 1673. Baptisée à Québec le 15 juin 1675, elle a pour parrain le gouverneur Frontenac. Au décès du père, en 1678, sa veuve effectue de fréquents voyages à Québec, tant pour la gestion des entreprises de traite de fourrures héritées de son mari que pour réclamer une pension auprès du gouverneur; elle finit par s'embarquer pour la France, où elle vivra sous le nom de Mme de Marson. Grâce à une bourse de la fondation "Madeleine de La Peltrie", Louise-Élisabeth fréquente l'école des ursulines, de 1680 à 1683, puis y fait de brefs séjours par la suite, grâce au soutien de la marquise Brisay de Denonville, épouse du gouverneur du Canada. Le 21 novembre 1690, Louise-Élisabeth épouse le commandant des troupes de la Marine en Nouvelle-France, Philippe de Rigaud, marquis de Vaudreuil, cadet d'une famille du Languedoc. Entre 1690 et 1708, Louise-Élisabeth donne naissance à douze enfants (six garçons et trois filles atteignent l'âge adulte). En 1697, elle accompagne son mari à Versailles où il reçoit la Croix de Saint-Louis. Malgré la méfiance du ministre Pontchartrain; qui redoute les agissements de la marquise en faveur des siens, Vaudreuil est nommé gouverneur de la Nouvelle-France (1703). Louise-Élisabeth s'engage à respecter les volontés du ministre et correspond régulièrement avec lui par la suite. En 1709, les tensions augmentent entre le gouverneur et l'intendant Raudot, qui accuse la famille Vaudreuil de porter atteinte à sa réputation dans un mémoire adressé à Pontchartrain. Louise-Élisabeth se rend immédiatement en France pour défendre les intérêts de son mari. Le navire La Bellonesur lequel elle a embarqué est capturé dans la Manche par les Anglais, mais les prisonniers sont libérés au Havre. De là, Louise-Élisabeth se rend à Versailles où elle obtient l'appui du ministre. Hébergée par des religieuses à Paris, elle ne cesse cependant de demeurer attentive aux affaires de la colonie. En 1713, Mme de Saint-Simon, dame d'honneur de Mme de Maintenon, et Mme de Ventadour (Charlotte-Angélique de la Mothe-Houdancour), gouvernante des Enfants de France, la recommandent comme sous-gouvernante du duc d'Alençon, fils de Charles, duc de Berry et de Louise d'Orléans. Aux funérailles de l'enfant, âgé de trois semaines, elle figure aux côtés de la gouvernante dans le carrosse funèbre qui mène le cortège royal à Saint-Denis, puis au Val-de-Grâce, où le coeur du jeune duc est déposé. Elle est malgré tout confirmée dans ses fonctions par le duc de Berry, qui meurt sans descendance un an plus tard. Son mari vient la rejoindre en France entre 1714 et 1716. À son départ, la marquise quitte la cour et s'installe à Paris pour veiller aux affaires de la colonie et à celles de sa famille. Elle fait notamment interner à Charenton son parent Joybert de Vrizy, victime d'hallucinations. Après sa guérison, elle recommande sa libération à d'Argenson et travaille personnellement à son avancement. À l'automne 1721, son mari s'étant gravement affaibli, elle s'embarque pour le Canada, après onze ans d'absence. La nomination de Maurepas, comme ministre de la Marine, l'incite cependant à revenir en France dès l'automne 1723 afin de s'assurer de sa protection. Elle rentre à Québec l'été suivant pour partager les derniers moments du marquis qui s'éteint à l'âge de 82 ans, le 10 octobre 1725. Trois semaines plus tard, elle retourne définitivement en France où elle obtient une pension du roi de 3000 livres. Louise-Élisabeth s'éteint à Paris en janvier 1740 à l'âge de 67 ans.
La marquise de Vaudreuil a joué un rôle crucial en faveur de la carrière de son mari et pour l'avancement de sa famille. Trois de ses fils seront gouverneurs dans les colonies, dont Pierre Rigaud de Vaudreuil de Cavagnal, dernier gouverneur de la Nouvelle-France. Elle est l'aïeule du célèbre Joseph-Hyacinthe-Francois-de-Paule de Rigaud, Comte de Vaudreuil.

Oeuvres

- 1703-1725 : Lettres et résumés de lettres de la Marquise de Vaudreuil dans «Correspondance du marquis de Vaudreuil», Rapport de l'archiviste de la Province de Québec, Archives nationales du Québec, 1942-43 et 1946-47.

Choix bibliographique

- Bonnault, Claude de, «Branche canadienne des Joybert», Bulletin de recherches historiques, vol. XLII, 1936, p.110-116.
-Michaud-Latrémouille, Alice, Louise-Elisabeth Joybert Marquise de Vaudreuil, Gatineau Les Écrits d'or, 1998.
-Roy, Pierre-Georges, La famille de Rigaud de Vaudreuil, Lévis, 1938.
-Saint-Simon, Louis de Rouvroy de, Mémoires complets et authentiques du duc de Saint-Simon sur le siècle de Louis XIV et la Régence, vol.10, Paris, 1929.
-Zoltvany, Yves F., Philippe de Rigaud de Vaudreuil: Governor of New France, 1703-1725, Toronto, McClelland and Stewart, 1974.

Jugements

- François-Madeleine-Fortuné Ruette d'Auteuil de Monceaux, procureur au conseil général de Québec, se méfie de son influence sur les affaires de la colonie. Il se plaint de la mollesse du Ministre de la Marine qui lui accordait toutes ses demandes: «Mais il est certain que cette conduite (celle du Ministre) encourage Mme de Vaudreuil à mettre tout en usage pour hausser et étendre l'opinion de la protection de ce ministre dont elle se vante, il est certain qu'il lui en accorde une bien éclatante; il ne lui refuse rien, elle dispose de tous les emplois du Canada, elle écrit de toutes parts dans les ports de mer des lettres magnifiques du bien et du mal qu'elle peut faire auprès de lui, elle offre sa faveur, elle menace de son crédit; ce qu'il y a de plus certain en tout ce qu'elle dit c'est qu'elle imprime beaucoup de terreur et qu'elle impose silence à la plupart de ceux qui pourraient parler contre son mari, et que Mr de Pontchartrain de son côté fait tout ce qu'il faut pour l'autoriser et justifier ses discours» (Lettre de François-Madeleine-Fortuné Ruette d'Auteuil de Monceaux à Maurepas, sans date, Archives nationales du Canada, Fonds des Colonies, MG1, C11A, vol.33, f. 265-281).
- «Madame de Vaudreuil a été nommée sous-gouvernante des enfants de Monseigneur le duc de Berry; son mérite personnel, depuis qu'elle est en France, lui a attiré cette place de confiance. Elle a eu de la peine à s'y déterminer par le désir qu'elle avait de vous aller rejoindre au Canada. La mort du duc d'Alençon lui permettait de retourner au Canada, mais le duc de Berry a réclamé ses services» (Lettre de Maurepas à Philippe Rigaud de Vaudreuil, 4 juillet 1713, Archives nationales du Canada, Fonds des Colonies, MG1, Série B).
- Denis Riverin, Conseiller au conseil Supérieur de la Nouvelle France, écrivait au comte de Toulouse en avril 1716: «À présent tout est avili, et ce n'est plus qu'une femme qui règne tant présente qu'absente» (Lettre de Denis Riverin au comte de Toulouse, 9 avril 1716, Archives nationales du Canada, Fonds des Colonies, MG1, C11A, vol.36, f.384).
- Élisabeth Bégon, qui est souvent critique à l'égard de ceux qu'elle appelle avec un certain mépris «les grosses têtes», admirait cependant les réussites professionnelles de la famille de Vaudreuil. Le 15 septembre 1750, elle écrivait à son gendre à propos des fils de la marquise: «Tu as bien raison de dire qu'il n'y a rien d'aussi heureux que la famille de Vaudreuil. Je vois de tout côté qu'ils réussissent tout ce qu'ils entreprennent» (Élisabeth Bégon, Lettres au cher fils. Correspondance d'Élisabeth Bégon avec son gendre (1748-1753), Établissement de textes, notes et avant-propos de Nicole Deschamps, Montréal, Boréal, 1994, 15 septembre 1750, p.272).
- Dans l'Histoire de l'Hôtel-Dieu de Québec, Marie-André Regnard Duplessis de Saint-Hélène et Jeanne-Françoise Juchereau de Saint-Ignace soulignent également la fierté des hospitalières de voir une Canadienne tenir un rôle important à Versailles: «Les belles qualités de madame de Vaudreuil la firent préférer à plusieurs autres dames pour être sous gouvernante des Princes, les enfants du Monseigneur le Duc de Berry; [...] il est glorieux, à la Nouvelle-France, qu'une dame née à l'Acadie et nourrie en Canada se soit fait admirer dans le centre même de la politesse, jusqu'à être choisie pour élever des Princes» (Jeanne Françoise Juchereau de La Ferté de Saint-Ignace et Marie-André Regnard Duplessis de Sainte-Hélène, Histoire de l'Hôtel-Dieu de Québec, Montauban, 1751, p.523).
- «Mlle de Marson, connue plus tard sous le nom de Marquise de Vaudreuil, était une jeune personne d'une vertu solide, d'un esprit supérieur, et douée de toutes ces grâces qui font le charme d'un cercle d'élite. Une sagesse rare tempérait la vivacité de son caractère, et les attraits de sa figure étaient rehaussés par la plus naïve expression de modestie» (Histoire des Ursulines de Québec depuis leur établissement jusqu'à nos jours, t.1, Québec, 1863, p.484-485).
- L'historien Guy Frégault s'en tient à des observations factuelles. Il note que les ursulines de Québec «lui ont montré à tirer des révérences, mais point du tout à mettre l'orthographe». (Le grand marquis, Pierre de Rigaud de Vaudreuil et la Louisiane, Montréal, 1952, p.58).
- Zvoltany précise que «dès 1712, elle est l'éminence grise du régime de Vaudreuil». (Yves Zoltvany, Philippe de Rigaud de Vaudreuil: Governor of New France, 1703-1725, Toronto, McClelland and Stewart, 1974, p. 110).

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