Hedwig Margrethe Elisabeth von Ranzau : Différence entre versions

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Hedwig von Rantzau, née vers 1625, à Hadersleben, est issue d’une famille noble du Schleswig-Holstein, province alors danoise, dont son père Gehrard est le gouverneur. Il meurt en 1627, peu après la naissance de sa benjamine. Au décès de sa mère, Dorothea Brockdorff (1630), l’éducation d’Hedwig est confiée aux d’Ahlefelt, parents des Rantzau, qui l’élèvent dans la foi luthérienne. Vers 1638-1639, elle épouse son petit-cousin Josias, moins fortuné qu’elle, mais déjà illustre sur les champs de bataille, au service de l’Empire, de la Suède, puis de la France. Installée avec lui à Paris dès 1640, Mme de Rantzau s’investit dans la catéchèse auprès de ses coreligionnaires. Elle paraît également à la cour, où [Anne d’Autriche]  travaille à sa conversion. Mais Hedwig résiste et triomphe des tentatives d’approches des théologiens catholiques. Quand elle ne suit pas son mari sur les champs de bataille, la comtesse fréquente l’aristocratie parisienne, et, donc, bon nombre de militants catholiques. Pierre Colombet, curé de Saint-Germain l’Auxerrois, finit par ébranler ses convictions. Elle abjure en 1643 et s’engage dans l’autre camp. Paroissienne de Jean-Jacques Olier et disciple de Vincent de Paul, elle devient une lectrice assidue de François de Sales. S’associant aux œuvres des Dames de la Charité, elle travaille aux côtés de la duchesse d’Aiguillon , de la princesse de Condé  et de Louise-Marie de Gonzague , œuvre à la conversion des protestants, obtenant, notamment, celle de son mari en 1645, et fréquente les parloirs des couvents, salons spirituels où se bouscule la bonne société civile et religieuse. Lors de la Fronde, le maréchal paie le prix fort de sa proximité avec Condé. Emprisonné à Vincennes en 1649, puis libéré l’année suivante, il meurt peu après. Sa veuve, qu’il a en partie ruinée, projette de se retirer du monde. La protection de Mazarin et d’Anne d’Autriche lui permet d’espérer une place dans un établissement prestigieux. Mais son choix se porte sur le modeste couvent de l’Annonciade céleste , que Marie Agnès Dauvaine,  a rendu célèbre pour son respect de la clôture . Elle y prend l’habit en 1652 en présence de son amie la duchesse de Schomberg . Devenue Mère Marie Élisabeth, elle garde un contact régulier avec le monde, à travers les grilles. Les quémandeurs d’avis spirituels se pressent au parloir, encouragés par le clergé, tandis que le St-Siège lui accorde la permission d’y poursuivre son œuvre de mission auprès des luthériens allemands de passage à Paris. Elle aurait joué à cette occasion un rôle diplomatique important dans la mise en place de la Ligue du Rhin (1658). Prieure entre 1660 et 1663, elle ne l’est plus quand arrive Angélique de Saint-Jean Arnauld d’Andilly , déplacée de Port-Royal chez les annonciades, sur ordre de l’archevêque de Paris (1664). La crise janséniste  bat alors son plein. Durant plus de dix mois, deux fortes personnalités s’affrontent : lorsque l’autorité pontificale a parlé, il n’y a point de place chez Mme de Rantzau pour la liberté de conscience, ce à quoi ne peut souscrire la moniale de Port-Royal. L’annonciade ne parvient pas à convertir son adversaire. En 1665, elle s’entretient encore avec son compatriote l’anatomiste Niels Stensen qui témoigne avoir discuté avec elle de la question de la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie. L’année suivante, elle part ériger un couvent à Hildesheim (Basse-Saxe), encore largement occupée par les luthériens. Elle y est invitée par le duc de Brunswick-Calenberg, récemment converti, qui prend la nouvelle communauté d’annonciades sous sa protection. Pendant quarante ans, la fondatrice y déploie une énergie considérable pour assurer l’avenir matériel et spirituel de l’établissement et poursuivre sans relâche son œuvre de reconquête catholique. Elle s’éteint le 7 février 1706 dans sa fondation saxonne, devenue lieu d’accueil pour d’anciennes protestantes converties par ses soins.  
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Hedwig von Rantzau, née vers 1625, à Hadersleben, est issue d’une famille noble du Schleswig-Holstein, province alors danoise, dont son père Gehrard est le gouverneur. Il meurt en 1627, peu après la naissance de sa benjamine. Au décès de sa mère, Dorothea Brockdorff (1630), l’éducation d’Hedwig est confiée aux d’Ahlefelt, parents des Rantzau, qui l’élèvent dans la foi luthérienne. Vers 1638-1639, elle épouse son petit-cousin Josias, moins fortuné qu’elle, mais déjà illustre sur les champs de bataille, au service de l’Empire, de la Suède, puis de la France. Installée avec lui à Paris dès 1640, Mme de Rantzau s’investit dans la catéchèse auprès de ses coreligionnaires. Elle paraît également à la cour, où [[Anne d’Autriche]]  travaille à sa conversion. Mais Hedwig résiste et triomphe des tentatives d’approches des théologiens catholiques. Quand elle ne suit pas son mari sur les champs de bataille, la comtesse fréquente l’aristocratie parisienne, et, donc, bon nombre de militants catholiques. Pierre Colombet, curé de Saint-Germain l’Auxerrois, finit par ébranler ses convictions. Elle abjure en 1643 et s’engage dans l’autre camp. Paroissienne de Jean-Jacques Olier et disciple de Vincent de Paul, elle devient une lectrice assidue de François de Sales. S’associant aux œuvres des Dames de la Charité, elle travaille aux côtés de la duchesse d’Aiguillon , de la princesse de Condé  et de Louise-Marie de Gonzague , œuvre à la conversion des protestants, obtenant, notamment, celle de son mari en 1645, et fréquente les parloirs des couvents, salons spirituels où se bouscule la bonne société civile et religieuse. Lors de la Fronde, le maréchal paie le prix fort de sa proximité avec Condé. Emprisonné à Vincennes en 1649, puis libéré l’année suivante, il meurt peu après. Sa veuve, qu’il a en partie ruinée, projette de se retirer du monde. La protection de Mazarin et d’Anne d’Autriche lui permet d’espérer une place dans un établissement prestigieux. Mais son choix se porte sur le modeste couvent de l’Annonciade céleste , que Marie Agnès Dauvaine,  a rendu célèbre pour son respect de la clôture . Elle y prend l’habit en 1652 en présence de son amie la duchesse de Schomberg . Devenue Mère Marie Élisabeth, elle garde un contact régulier avec le monde, à travers les grilles. Les quémandeurs d’avis spirituels se pressent au parloir, encouragés par le clergé, tandis que le St-Siège lui accorde la permission d’y poursuivre son œuvre de mission auprès des luthériens allemands de passage à Paris. Elle aurait joué à cette occasion un rôle diplomatique important dans la mise en place de la Ligue du Rhin (1658). Prieure entre 1660 et 1663, elle ne l’est plus quand arrive Angélique de Saint-Jean Arnauld d’Andilly , déplacée de Port-Royal chez les annonciades, sur ordre de l’archevêque de Paris (1664). La crise janséniste  bat alors son plein. Durant plus de dix mois, deux fortes personnalités s’affrontent : lorsque l’autorité pontificale a parlé, il n’y a point de place chez Mme de Rantzau pour la liberté de conscience, ce à quoi ne peut souscrire la moniale de Port-Royal. L’annonciade ne parvient pas à convertir son adversaire. En 1665, elle s’entretient encore avec son compatriote l’anatomiste Niels Stensen qui témoigne avoir discuté avec elle de la question de la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie. L’année suivante, elle part ériger un couvent à Hildesheim (Basse-Saxe), encore largement occupée par les luthériens. Elle y est invitée par le duc de Brunswick-Calenberg, récemment converti, qui prend la nouvelle communauté d’annonciades sous sa protection. Pendant quarante ans, la fondatrice y déploie une énergie considérable pour assurer l’avenir matériel et spirituel de l’établissement et poursuivre sans relâche son œuvre de reconquête catholique. Elle s’éteint le 7 février 1706 dans sa fondation saxonne, devenue lieu d’accueil pour d’anciennes protestantes converties par ses soins.  
 
Connue à Hildesheim mais oubliée en France, Mme de Rantzau s’est illustrée comme agent actif de la Contre-Réforme, conjuguant activités catéchétiques, apologétiques et missionnaires. Aristocrate luthérienne puis nouvelle catholique, maréchale et membre de la cour puis contemplative cloîtrée, elle a expérimenté  tous les états réservés aux femmes de son temps (mariage, veuvage, vie consacrée) et articulé savamment son désir de retraite spirituelle à l’entretien d’un riche réseau relationnel qui l’a maintenue en contact permanent avec de grands acteurs de la vie politique, intellectuelle et religieuse.   
 
Connue à Hildesheim mais oubliée en France, Mme de Rantzau s’est illustrée comme agent actif de la Contre-Réforme, conjuguant activités catéchétiques, apologétiques et missionnaires. Aristocrate luthérienne puis nouvelle catholique, maréchale et membre de la cour puis contemplative cloîtrée, elle a expérimenté  tous les états réservés aux femmes de son temps (mariage, veuvage, vie consacrée) et articulé savamment son désir de retraite spirituelle à l’entretien d’un riche réseau relationnel qui l’a maintenue en contact permanent avec de grands acteurs de la vie politique, intellectuelle et religieuse.   
  

Version du 25 janvier 2014 à 17:47

Hedwig Margrethe Elisabeth von Ranzau
Titre(s) Comtesse von Ranzau (ou Rantzau)
Conjoint(s) Josias von Ranzau, maréchal de France
Dénomination(s) La Maréchale de Ranzau (ou Rantzau), Madame de Ranzau (ou Rantzau), Mère Marie Elisabeth de l'Annonciade
Biographie
Date de naissance Hadersleben (Holstein) vers 1625
Date de décès Hildesheim, 1706
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice

Hedwig von Rantzau, née vers 1625, à Hadersleben, est issue d’une famille noble du Schleswig-Holstein, province alors danoise, dont son père Gehrard est le gouverneur. Il meurt en 1627, peu après la naissance de sa benjamine. Au décès de sa mère, Dorothea Brockdorff (1630), l’éducation d’Hedwig est confiée aux d’Ahlefelt, parents des Rantzau, qui l’élèvent dans la foi luthérienne. Vers 1638-1639, elle épouse son petit-cousin Josias, moins fortuné qu’elle, mais déjà illustre sur les champs de bataille, au service de l’Empire, de la Suède, puis de la France. Installée avec lui à Paris dès 1640, Mme de Rantzau s’investit dans la catéchèse auprès de ses coreligionnaires. Elle paraît également à la cour, où Anne d’Autriche travaille à sa conversion. Mais Hedwig résiste et triomphe des tentatives d’approches des théologiens catholiques. Quand elle ne suit pas son mari sur les champs de bataille, la comtesse fréquente l’aristocratie parisienne, et, donc, bon nombre de militants catholiques. Pierre Colombet, curé de Saint-Germain l’Auxerrois, finit par ébranler ses convictions. Elle abjure en 1643 et s’engage dans l’autre camp. Paroissienne de Jean-Jacques Olier et disciple de Vincent de Paul, elle devient une lectrice assidue de François de Sales. S’associant aux œuvres des Dames de la Charité, elle travaille aux côtés de la duchesse d’Aiguillon , de la princesse de Condé et de Louise-Marie de Gonzague , œuvre à la conversion des protestants, obtenant, notamment, celle de son mari en 1645, et fréquente les parloirs des couvents, salons spirituels où se bouscule la bonne société civile et religieuse. Lors de la Fronde, le maréchal paie le prix fort de sa proximité avec Condé. Emprisonné à Vincennes en 1649, puis libéré l’année suivante, il meurt peu après. Sa veuve, qu’il a en partie ruinée, projette de se retirer du monde. La protection de Mazarin et d’Anne d’Autriche lui permet d’espérer une place dans un établissement prestigieux. Mais son choix se porte sur le modeste couvent de l’Annonciade céleste , que Marie Agnès Dauvaine, a rendu célèbre pour son respect de la clôture . Elle y prend l’habit en 1652 en présence de son amie la duchesse de Schomberg . Devenue Mère Marie Élisabeth, elle garde un contact régulier avec le monde, à travers les grilles. Les quémandeurs d’avis spirituels se pressent au parloir, encouragés par le clergé, tandis que le St-Siège lui accorde la permission d’y poursuivre son œuvre de mission auprès des luthériens allemands de passage à Paris. Elle aurait joué à cette occasion un rôle diplomatique important dans la mise en place de la Ligue du Rhin (1658). Prieure entre 1660 et 1663, elle ne l’est plus quand arrive Angélique de Saint-Jean Arnauld d’Andilly , déplacée de Port-Royal chez les annonciades, sur ordre de l’archevêque de Paris (1664). La crise janséniste bat alors son plein. Durant plus de dix mois, deux fortes personnalités s’affrontent : lorsque l’autorité pontificale a parlé, il n’y a point de place chez Mme de Rantzau pour la liberté de conscience, ce à quoi ne peut souscrire la moniale de Port-Royal. L’annonciade ne parvient pas à convertir son adversaire. En 1665, elle s’entretient encore avec son compatriote l’anatomiste Niels Stensen qui témoigne avoir discuté avec elle de la question de la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie. L’année suivante, elle part ériger un couvent à Hildesheim (Basse-Saxe), encore largement occupée par les luthériens. Elle y est invitée par le duc de Brunswick-Calenberg, récemment converti, qui prend la nouvelle communauté d’annonciades sous sa protection. Pendant quarante ans, la fondatrice y déploie une énergie considérable pour assurer l’avenir matériel et spirituel de l’établissement et poursuivre sans relâche son œuvre de reconquête catholique. Elle s’éteint le 7 février 1706 dans sa fondation saxonne, devenue lieu d’accueil pour d’anciennes protestantes converties par ses soins. Connue à Hildesheim mais oubliée en France, Mme de Rantzau s’est illustrée comme agent actif de la Contre-Réforme, conjuguant activités catéchétiques, apologétiques et missionnaires. Aristocrate luthérienne puis nouvelle catholique, maréchale et membre de la cour puis contemplative cloîtrée, elle a expérimenté tous les états réservés aux femmes de son temps (mariage, veuvage, vie consacrée) et articulé savamment son désir de retraite spirituelle à l’entretien d’un riche réseau relationnel qui l’a maintenue en contact permanent avec de grands acteurs de la vie politique, intellectuelle et religieuse.


Choix bibliographique

  • Henneau, Marie-Elisabeth, "Quand les religieuses cloîtrées sillonnent l’Europe, itinéraires transfrontaliers d’annonciades célestes au XVIIe s.", dans Les rôles transfrontaliers joués par les femmes dans la construction de l’Europe, éd. Guyonne Leduc, Paris, L’Harmattan, coll. Des idées et des femmes, 2012, p. 177-188.
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