Françoise Pascal

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Françoise Pascal
Dénomination(s) Mademoiselle Pascal
Biographie
Date de naissance 1632
Date de décès Après 1689
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)
Dictionnaire Pierre-Joseph Boudier de Villemert (1779)
Dictionnaire Fortunée Briquet (1804)
Dictionnaire Charles de Mouhy (1780)
Dictionnaire Philibert Riballier et Catherine Cosson (1779)


Notice de Deborah Steinberger, 2006. (Mise à jour : sept. 2008).

Françoise Pascal, fille de Marguerite Tollot et de Séraphin Pascal, naît à Lyon en 1632. Son père est commis des douanes, avant de devenir en 1644 garde du maréchal de Villeroy, gouverneur de Lyon. Cette illustre famille soutient alors la jeune Françoise, nourrissant ses talents littéraires et artistiques. Elle est à son tour employée par les Villeroy, probablement comme gouvernante ou maîtresse de musique et de dessin. Elle côtoie un milieu cultivé, amateur d’art et de théâtre, dans une ville où circulent de nombreuses compagnies. Le maréchal possède en outre sa propre salle de spectacle et sa troupe. C’est dans ce contexte qu’en 1655, Françoise Pascal publie sa première oeuvre, la tragicomédie Agathonphile martyr, tirée d’un roman de Jean-Pierre Camus. Ses Diverses Poésies paraissent en 1657, incluant également deux farces en un acte, parodies d’une certaine préciosité de province. La même année, elle publie une pièce à machines, la tragi-comédie Endymion, inspirée d’un roman de Gombauld et probablement jouée à Dijon en 1668 par l’ancienne troupe de M. de Villeroy, d’après les recherches récentes d’Aurore Évain. F. Baldensperger a suggéré qu’une ou deux pièces de Françoise Pascal ont été jouées par Molière et sa troupe pendant leur séjour à Lyon (1653-1657), mais les preuves manquent. Il est cependant certain que Françoise Pascal a subi les mêmes influences que son confrère, notamment celle de la commedia dell’arte. Une autre tragicomédie en cinq actes, Sésostris, basée sur un épisode du roman Artamène ou le grand Cyrus de Madeleine de Scudéry, est jouée à Lyon vers 1660. Dans l’Avis au lecteur, l’autrice fait allusion à l’accueil favorable qu’on a réservé à sa pièce et se défend contre ceux qui l’accusent d’avoir eu des «aides étrangères». Elle y déclare que l’écriture dramatique n’est pour elle qu’un passe-temps agréable, et que la peinture reste son occupation principale -une position auctoriale peut-être guidée par la modestie, de la part de la première Française à voir jouer ses pièces par des comédiens professionnels. Fière de sa ville natale, Françoise Pascal ajoute souvent à sa signature l’épithète «fille lyonnaise». Elle dédie plusieurs de ses oeuvres aux notables de la ville, dont elle reçoit des gratifications pour deux de ses pièces.

Vers 1667, elle quitte Lyon pour s’installer à Paris, afin, selon certains historiens du théâtre, d’y poursuivre sa carrière dramatique: sa pièce comique Le Vieillard amoureux (1664) aurait été destinée à Philipin, le farceur de l’Hôtel de Bourgogne, et jouée dans ce théâtre. Il s’agirait cependant de sa dernière pièce représentée sur une scène professionnelle. En 1669, Barbin publie son Commerce du Parnasse, recueil épistolaire en prose et en vers. Une correspondance galante avec «Tersandre» occupe la partie la plus importante du recueil; elle est remarquable par sa critique enjouée du langage précieux et par son parti pris contre les dangers de la passion. La lettre finale, adressée à sa soeur restée à Lyon, nous offre aussi une description du quotidien de Françoise Pascal à Paris, celui d’une célibataire vivant de ses talents artistiques.

L’autrice ne publie plus ensuite que des oeuvres de poésie religieuse, dont plusieurs chants de Noël. Mais, contrairement à ce qu’affirme F. Baldensperger, Françoise Pascal a continué à écrire pour la scène, participant probablement à quelques salons mondains -dont celui de Marie de Lorraine- alors friands de divertissements musicaux et semi-dramatiques. A. Évain a trouvé mention d’une pastorale musicale en cinq actes, non publiée, mais présentée aux Appartements à Versailles en 1686, dont les paroles seraient de «Mlle Pascal». Et, en 1688, paraît dans le Mercure galant une chanson composée par le maître de choeur de l’hôtel de Guise, dont les paroles (profanes) sont également signées de «Mlle Pascal». On ignore la date de sa mort, mais, selon Vertron, l’autrice vit encore en 1698.

Il ne reste aucune trace des tableaux de Françoise Pascal, peintresse probablement réputée à qui on confia le portrait de l’éminent évêque de Périgueux. Les Histoires littéraires du XIXe siècle l’ont parfois mentionnée pour ses oeuvres religieuses qui avaient fait l’objet de quelques rééditions au siècle précédent, mais c’est surtout au XXe siècle que l’autrice a été redécouverte par les historiens du théâtre et dans le cadre des recherches sur la préciosité. On a notamment retenu sa contribution à la remise en vogue de la pièce comique en un acte.

Oeuvres

- 1655 : Agathonphile Martyr (tragi-comédie en 5 actes, vers), Lyon, C. Petit -- éd. Theresa Varney Kennedy, Gunter Narr Verlag Tübingen, Biblio 17, 2008.
- 1657 : Diverses poésies, Lyon, Simon Matheret. Inclut L’Amoureux extravagant (pièce comique en 1 acte, vers) et L’Amoureuse vaine et ridicule (pièce comique en 1 acte, vers) -- «L’Amoureux extravagant», dans Femmes dramaturges en France (1650-1750), éd. Perry Gethner, Paris/Seattle, Papers on French Seventeenth Century Literature, 1993 -- «L’Amoureux extravagant» et «L’Amoureuse vaine et ridicule», éd. Perry Gethner, dans Théâtre de femmes, XVIe-XVIIIe siècles, dir. A. Evain, P. Gethner & H. Goldwyn, vol.2, Saint-Étienne, Publications de l'Université, 2008 -- trad. angl.L’Amoureux extravagant, dans The Lunatic Lover: Plays by French Women of the 17th & 18th Centuries, éd. et trad. Perry Gethner, Portsmouth, New Hampshire, Heinemann Drama, 1994.
- 1657 : Endymion, (tragi-comédie en 5 actes, vers), Lyon, C. Petit (trace d’une représentation à Dijon en 1668) -- dans Femmes dramaturges en France (1650-1750), éd. Perry Gethner, vol.2, Tübingen, Biblio17, 2002.
- 1661 : Sésostris, (tragi-comédie en 5 actes, vers), Jeux du Cirque (Lyon), v.1660, Lyon, A. Offray -- éd. Deborah Steinberger, dans Théâtre de femmes, XVIe-XVIIIe siècles, dir. A. Evain, P. Gethner & H. Goldwyn, vol.2, Saint-Étienne, Publications de l'Université, 2008.
- 1662 : La Constance victorieuse (tragi-comédie, perdue) [cette pièce citée dans les archives municipales de Lyon pour une gratification qu’elle valut à F. Pascal n’est peut-être que le sous-titre d’une des oeuvres précédentes de l’autrice].
- 1664 : Le Vieillard amoureux, (pièce comique en 1 acte, vers), Lyon, A. Offray (représentation probable à l’Hôtel de Bourgogne vers 1667) -- éd. Deborah Steinberger, dans Théâtre de femmes, XVIe-XVIIIe siècles, dir. A. Evain, P. Gethner & H. Goldwyn, vol.2, Saint-Étienne, Publications de l'Université, 2008.
- 1669 : Le Commerce du Parnasse, Paris, C. Barbin -- éd. Deborah Steinberger, Exeter, University of Exeter Press, 2001 -- trad angl. Le Commerce du Parnasse (extraits), éd. et trad. Deborah Steinberger, dans Writings by Pre-Revolutionary French Women, dir. Anne R. Larsen et Colette H. Winn, New York, Garland Publishing, 2000.
- 1670 : Cantiques spirituels ou Noëls nouveaux, sur la naissance du Sauveur, Paris, N. Oudot -- La Grande Bible renouvellée, ou Noëls nouveaux, Troyes, Veuve Oudot, 1728.
- 1674 : Les Réflexions de la Madeleine dans le temps de sa pénitence, Paris, M. Coustelier.
- 1680 : Les Entretiens de la Vierge et de Saint Jean l’Évangéliste sur la vie et la mort du Sauveur, Paris, Veuve S. Huré, 1680.
- 1686 : Les Amants jaloux (pastorale en 5 actes, musique de Marchand fils), aux Appartements (Versailles).
- 1688 : «Air nouveau» (musique de M. de Montailly), Mercure galant, février.

Choix bibliographique

- Baldensperger, Fernand, «Françoise Pascal, fille lyonnaise», dans Études d’histoire littéraire, vol.3, Paris, Droz, 1939 (réimpr. Genève, Slatkine Reprints, 1973), p.1-31.
- Gethner, Perry, Femmes dramaturges en France (1650-1750), Paris/Seattle, Papers on French Seventeenth-Century Literature, 1993, p.25-30.
- Lancaster, Henry Carrington, A History of French Dramatic Literature in the Seventeenth Century, part 3, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 1936, p.125-126, 158-160, 500-502, 547-548, 679-680, 861.
- Maître, Myriam, Les Précieuses: naissance des femmes de lettres en France au XVIIe siècle, Paris, Honoré Champion, 1999, p.362-365, 394-395.
- Steinberger, Deborah (éd.), Le Commerce du Parnasse, Exeter, University of Exeter Press, 2001, p.v-xxiii.

Jugements

- «MELPOMENE, THALIE, et l’illustre CLIO, Trouvent en vous ce beau Trio:
Et vous égalez bien ces trois doctes Pucelles,
On le sçait par tout l’Univers:
Vous peignez, vous chantez, et vous faites des vers,
N’est-ce pas valoir autant qu’elles?
[...]
Jeune encor comme elle est achever tant d’Ouvrages
Et les faire avec jugement;
Avoir et l’entretien, et le discours charmant:
Sont-ce pas de beaux avantages?»
(Anonyme, «Portrait de Mademoiselle Pascal, fait par Tersandre», pièce liminaire de Sésostris [1661], voir supra, oeuvres).

- «Palimène est une vieille précieuse. Elle fait fort bien des vers, et l’on a représenté aux jeux du Cirque une pièce qu’elle a composée, et qui a été trouvée fort belle.» (Antoine de Somaize, Le Dictionnaire des précieuses [1661], éd. Ch.-L. Livet, Paris, 1856, réimpr. Hildesheim, Georg Olms Verlag, 1972, vol.1, p.273).

- «L’auteur n’était pourtant pas une nouvelle Louise Labé: Mlle. Pascal, qui dédie sa tragi-comédie [Agathonphile martyr] aux échevins de Lyon, a peut-être des idées, ou du moins des intentions dramatiques; mais elle ne sait pas écrire.» (Bibliotheque Dramatique de Monsieur de Soleinne [1843-45], éd. P.L. Jacob, Graz, Akademische Druck- und Verlagsanstalt, 1969, vol.1, p.291).

- «Les Cantiques de Françoise eurent plusieurs éditions, et on les réimprimait encore en 1723; c’est sur des airs de l’Opéra ou des chansons les plus populaires de ce temps-là qu’ils se chantaient. Le style en est assez coulant, et il en est quelques-uns, tels que ceux-ci, qui pourraient encore trouver place dans les recueils qu’on publie chaque année.» (Péricaud, Notes et documents pour servir à l’Histoire de Lyon, t.10-11, s.l. s.n., 1858-1861, p.86).

- (à propos de Sésostris) «[T]he forest scenes contrast agreeably with those of the court, the dialogue is well handled, and the style is largely free from affectations or provincialisms.» (Henry Carrington Lancaster, A History of French Dramatic Literature... [1936], voir supra, choix bibliographique, p.548).

- «Quelque âpreté combative, dès lors, une veine de raillerie assez mordante, l’orgueil d’une femme qui se juge supérieure à l’opinion que les hommes affectent à l’égard de son sexe: il ne fallait pas moins à une époque où l’activité intellectuelle de la femme semblait aisément, en attendant sa pleine réhabilitation par Mlle de Scudéry, prêter à quelque équivoque.» (Fernand Baldensperger, «Françoise Pascal, fille lyonnaise» [1939], voir supra, choix bibliographique, p.20).

- «Les pièces de Françoise Pascal marquent un tournant capital pour les femmes dramaturges en France. Avant le milieu du dix-septième siècle, les femmes qui composaient des pièces semblaient envisager leur travail comme purement littéraire et ne faisaient guère attention à l’aspect gestuel et scénique de leur texte, ni au goût de leur public. Mais aux yeux de Françoise Pascal [...] qui réussit à faire jouer au moins deux de ses pièces en public, la théâtralité était d’une suprême importance.» (Perry Gethner, Femmes dramaturges en France (1650-1750) [1993], voir supra, choix bibliographique, p.27).

- «Mlle Pascal [...] passe sans transition de la tragédie sacrée à la tragi-comédie profane, de la féerie chantée annonciatrice de l’opéra à la farce et à la petite comédie de caractères. La plasticité de son inspiration paraît la marque de sa quête de succès» (Myriam Maître, Les Précieuses... [1999], voir supra, choix bibliographique, p.363).

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