Françoise Nicole Gravillon Du Hausay

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Françoise Nicole Gravillon Du Hausay
Conjoint(s) François Hus
Dénomination(s) Mademoiselle Hus
Biographie
Date de naissance Après 1700
Date de décès Vers 1780
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)
Dictionnaire Fortunée Briquet (1804)


Notice de Aurore Evain, 2004.

Françoise Nicole Gravillon Du Hausay serait née à Bordeaux au début du XVIIIe siècle. Aucune des diverses graphies de Du Hausay ne figurant dans les nobiliaires, il est probable qu'elle ait ajouté ce toponyme à son nom, usage courant chez les comédiens. Elle épouse François Hus, qui appartient à une famille de comédiens et de danseurs dont on suit la trace depuis la fin du XVIIe siècle, et rejoint sa troupe. Elle est mère d'au moins cinq enfants, dont Adélaïde-Louise-Pauline, née à Rennes en 1734, qui se rendra célèbre sous le nom de Mlle Hus à la Comédie-Française. La famille parcourt la France et l'Europe avec plusieurs étapes à Nantes, en Provence et aux Pays-Bas, subissant le sort difficile des compagnies itinérantes: un incendie du théâtre de Bordeaux, probablement en 1731, met à mal les affaires de la famille, qui essuie également une épidémie de peste à Arles et Marseille, avant d'être capturée par des «pirates barbaresques» en 1741, près de Gênes, après un long séjour en Italie. En 1746, une lettre de son mari à la Comédie-Française témoigne de leurs difficultés financières. À partir de 1750, la troupe se disperse et la carrière de Françoise Hus prend un tour plus personnel: les débuts de sa fille à la Comédie-Française en 1751 sont probablement l'occasion de son installation à Paris. En septembre 1756, elle fait représenter son unique pièce, une comédie allégorique en un acte intitulée Plutus, rival de l'Amour, jouée à quatre reprises à la Comédie-Italienne. Cette pièce laisse suggérer qu'une fois installée dans la capitale, Françoise Hus a fréquenté les milieux demi-mondains parisiens. Sa fille est alors une actrice connue qui entretient une liaison non moins célèbre avec le trésorier général des fonds particuliers du roi, Bertin de Blagny. Ils tiennent un salon que fréquentent gens de lettres et du spectacle. Familière de ce milieu, Françoise Hus paraît avoir retranscrit au pays de Cythère l'atmosphère de ces cercles libertins où règnent les courtisanes et leurs mécènes, tous fervents de théâtre, de dîners et de spectacles: Plutus y défie l'Amour auprès des Grâces, tentant en vain de les séduire par l'appât de son or; vaincu, il s'en retourne sur la terre où ses bienfaits achètent facilement le coeur des terriennes. Françoise Hus échappe au ton moralisateur grâce au personnage de la Folie, qui emporte toute l'assemblée dans l'insouciance, les ris et les jeux. On peut penser que ce personnage est un rappel figuré des «folies» de l'époque où se réunissaient les mondains et leurs favorites. Françoise Hus profite également de cette pièce d'actualité pour rendre hommage au maréchal de Richelieu, vainqueur à Minorque et héros du jour. La comédie est assez bien accueillie et certainement goûtée par ses contemporains, séduits par ce mélange de patriotisme et de galanterie, dans l'air du temps: le prologue que l'actrice Silvia compose et récite à l'occasion de la première en témoigne. Rééditée en 1757, la pièce est certainement encore donnée sur les théâtres de société cette année-là. En 1762, Mme Hus débute dans les rôles de caractère à la Comédie-Française, mais abandonne à la deuxième représentation devant la sévérité du public. Son nom apparaît en 1774 sur le registre de mariage de sa fille: elle est veuve et donne son consentement par écrit. D'après Michaud, elle meurt vers 1780, mais aucune autre source ne le confirme.
Aïeule d'une longue dynastie de comédiens et danseurs, la première de la famille à tenter une carrière d'auteur, elle est une figure connue de son temps, que Restif de la Bretonne cite encore en 1777 parmi les noms de femmes célèbres. Comme toutes les dramaturges de l'époque, Françoise Hus a été calomniée par plusieurs de ses contemporains. Réduite à être la «mère de Mlle Hus», elle a été injustement oubliée dans la plupart des biographies consacrées à cette famille. Le parcours de Françoise Hus est pourtant à la fois précieux et original. Précieux, car il retrace les conditions de vie d'une comédienne itinérante au XVIIIe siècle. Original, car il nous présente les ambitions d'une comédienne lettrée qui s'essaya, à un âge avancé, en tant qu'actrice et dramaturge, sur les deux scènes les plus prestigieuses de la capitale. Il reste à dépouiller archives et documents d'époque afin de mieux cerner encore l'intégration de cette comédienne-auteure dans le Paris des années 1750/1760.

Oeuvres

- 1756 : Plutus, rival de l'Amour, Paris, Ballard.

Choix bibliographique

- Fuchs, Max. Lexique des troupes de comédiens au XVIIe siècle. Paris, Droz, 1944.

Jugements

- «Jeudi 2 sept. Plutus rival de l'Amour. Une acte en prose, par Mme Hus, mère de mlle Hus, comédienne française, maîtresse alors de Mr Bertin, des parties casuelles; on prétend que Mr Bertin y a travaillé. Mlle Victoire, qui était à l'Opéra, et admise depuis peu au Théâtre Italien comme pensionnaire, y joua le rôle d'une grâce. Elle chante très bien l'italien. La pièce est froide» (Thomas-Simon Gueullette,Notes et souvenirs sur le Théâtre-Italien au XVIIIe siècle [18e s.], éd. J.-E. Gueullette Paris, Droz, 1938, p.166).
- «Le jeudi 2 septembre, les Comédiens Italiens donnèrent la première représentation de Plutus rival de l'Amour, petite comédie en un acte qui a été reçue favorablement. Elle est de Mme Hus, mère de Mlle Hus, Comédienne Française. Pour prévenir le public en sa faveur, Mlle Silvia fit un compliment qui fut très applaudi et qui mérite d'être retenu par sa précision. Le voici en quatre vers: Par de longs complimens, on vient pour vous séduire, / Et pour mendier un succès, / Je n'ai que deux mots à vous dire: / L'Auteur est femme, et vous êtes Français» (Mercure de France, octobre 1756, vol.I, p.186).
- «Un fond plus neuf, une ordonnance mieux combinée, des situations plus vives, plus touchantes, plus théâtrales, un coloris plus nuancé, plus saillant, plus dramatique, une gradation d'intérêt mieux marquée, un tissu d'intrigue mieux conduit, seraient à désirer dans ce drame. La rivalité, qui fait le fond de la pièce, n'est pas bien établie ni assez soutenue entre Plutus et l'Amour. Ils ne se rencontrent qu'une fois et c'est presque sans combattre que l'Amour triomphe de Plutus. Mais c'est le coup d'essai de Mme Hus et j'adresserais volontiers aux lecteurs de cette petite pièce le compliment que la Folie fit avec tant de sagesse au Parterre le jour de la première représentation [...]. La pièce fut suivie d'un Divertissement analogue au sujet, avec un vaudeville assez ingénieux composé par une personne que l'auteur avait priée de lui rendre ce petit service; sur le Parnasse, comme dans le monde, on doit s'entr'aider. Tel qu'il est, ce petit ouvrage ne peut que faire honneur à Mme Hus. Le style ne manque pas d'une sorte d'élégance et de pureté» (Fréron, L'Année littéraire, vol. 6, 10 octobre 1756).
- «La dame Hus, mère de l'aimable actrice du même nom, et qui, jadis, a joué en province s'est sentie tout à coup animée par une belle émulation dont on est capable à tout âge: elle a voulu rentrer dans la carrière pour partager avec sa fille les applaudissements de Paris. Admise au début pour les rôles de caractère, elle a joué deux fois; le premier jour dans L'Enfant prodige et dans Les Trois cousines; le second dans L'Ambitieux et dans L'Esprit de contradiction. Le public a eu peu d'égard à son zèle; il l'a sans doute jugée avec trop de sévérité: peut-être même s'est-il montré jaloux du droit qu'il s'est arrogé de tout temps sur les talents novices en voyant qu'il ne pourrait contribuer en rien à la perfection de ceux de la dame Hus. Ces dispositions peu favorables de la part du public n'ont pu lui échapper et elle en a pris congé en discontinuant son début.» (L'Avant-coureur, lundi 21 janvier 1760, p.32).
- «Mlle Hus joue depuis 9 ans quantité de petits bouts de rôles; son nom est plus célèbre par les amours, les fureurs, les prodigalités, les abandons et les retours de M. Bertin que par ses propres talents; madame sa mère a fait en 1756 une comédie dans laquelle elle eut la complaisance de peindre sa fille et son amant; Mlle Silvia, qui jouait dans cette comédie intitulée Plutus rival de l'amour, vint l'annoncer au public par ces quatre vers [...]. Le parterre insensible à la cajolerie qu'on lui faisait fut équitable et la pièce trouvée mauvaise; il n'est pas hors de propos d'observer que M. Bertin était le Plutus de la comédie, et le Marquis de la V*** l'Amour» ([François Chevrier], Almanach des gens d'esprit par un homme qui n'est pas sot. Calendrier pour l'année 1762 et le reste de la vie, publié par l'auteur du colporteur, Jean Nourse, 1762, p.31).
- «À la seconde représentation on introduisit le Génie de la France, qui venait annoncer le retour et la gloire de Mars, faisant allusion à la prise du Port-Mahon, qui venait de se rendre à M. le Maréchal de Richelieu. [...] Les Spectateurs furent insensibles à cette cajolerie, et jugèrent cet Ouvrage à la rigueur; il est vrai qu'on ne peut pas dire que ce soit une Comédie, ni même un Drame, puisqu'on n'y trouve ni situations comiques, ni actions théâtrales; mais une allégorie dialoguée, ingénieusement imaginée et très agréablement écrite. Dans quelques classes qu'on le place, il ne peut faire qu'honneur à Madame Hus, qui en est l'Auteur» (Jean-Auguste Jullien dit Desboulmiers, Histoire anecdotique et raisonnée du théâtre italien, Paris, Lacombe, 1769, t.6, p.279-283).
- «Cette comédie est de Mme Hus, mère d'une actrice dont on a longtemps admiré au théâtre français le talent et les grâces; et elle aurait eu plus de succès, si l'ingénieuse allégorie qu'elle présente avait été soutenue d'un peu d'action et de quelques situations comiques» (Origny, Annales du Théâtre italien depuis son origine jusqu'à ce jour, Paris, Veuve Duchesne, 1788, p.272).
- «J'ai entre les mains les ouvrages de quelques autres femmes, qui feront la matière du reste de cette lettre. Je commence par une petite comédie en prose, en un acte, représentée au théâtre Italien, avec un succès médiocre, en 1756, sous le titre de Plutus, rival de l'Amour. L'auteur est Mme Hus, mère de la comédienne de ce nom, et qui a joué elle-même la comédie en province, et débuté sur le théâtre de Paris. Vénus, les trois Grâces, l'Amour, Plutus, Mercure et la Folie sont, Madame, les personnages de cette pièce [...] Dans le temps que Mme Hus fit jouer sa pièce, M. le maréchal de Richelieu venait de triompher de Mahon. On sent, dans ces circonstances, sur qui doit rejaillir l'éclat de cette allégorie. L'amour, vainqueur de son côté, demeure pour toujours auprès des grâces. Plutus n'a garde d'en approcher; souvent il ne les connaît pas. La rivalité qui fait le fond de le pièce n'est pas bien établie, ni assez soutenue entre Plutus et l'Amour; ils ne se rencontrent qu'une fois; et c'est presque sans combattre, que l'Amour triomphe du Dieu des richesses» (Joseph La Porte, Histoire littéraire des femmes françaises, ou lettres historiques et critiques contenant un précis de la vie des femmes qui se sont distinguées dans la littérature française, par une société de gens de lettres, Paris, Lacombe, 1769, vol. 5, p.589).

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