Charlotte-Flandrine d'Orange-Nassau : Différence entre versions

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== Notice d'[[Antoine Coutelle]], 2018 ==
 
== Notice d'[[Antoine Coutelle]], 2018 ==
Abbesse de Sainte-Croix de Poitiers. Cette notice est en cours de rédaction.<br />
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Charlotte-Flandrine d’Orange-Nassau, née à Anvers en 1579, est la quatrième fille de Guillaume de Nassau dit le Taciturne, prince d'Orange, et de sa troisième épouse, Charlotte de Bourbon-Montpensier, ancienne abbesse devenue protestante. Son second prénom évoque la lutte des Pays-Bas contre la tutelle espagnole. Orpheline de mère à trois ans, Flandrine est confiée à une parente, abbesse du Paraclet de Troyes. <br/>
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Après l'assassinat de son père, le 10 juillet 1584, l'éducation religieuse de la princesse de Nassau devient un enjeu politique européen. Sa tutrice s'étant convertie à la Réforme, son grand-père maternel obtient en 1588 un ordre royal pour la faire remettre à sa tante Jeanne de Bourbon, abbesse de Sainte-Croix (Poitiers) et de Jouarre, contrariant ainsi le vœu fait par Elisabeth Ire d'Angleterre de faire élever les enfants du Taciturne dans la foi réformée. Lorsque Flandrine manifeste la volonté d'entrer au couvent, la princesse douairière de Nassau proteste auprès d'Henri IV qui accepte de surseoir à la décision de quelques mois. C’est finalement en 1594, âgée de 15 ans, que Flandrine prend le voile à Poitiers. Elle gardera toute sa vie des liens épistolaires étroits avec ses sœurs (Louise-Juliana, Élisabeth, Catherine-Belgique, Émilie-Antwerpiana et Charlotte-Brabantine), bien que restées protestantes.<br/>
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La jeune princesse est formée pour prendre la tête de l'abbaye royale de Sainte-Croix fondée au VIe siècle par la reine Radegonde. Elle est nommée grande prieure en 1594, puis abbesse en 1603, à 24 ans. Cette charge lui échoit dans une logique de patrimonialisation des grands bénéfices ecclésiastiques. Elle succède à sa tante qui avait succédé elle-même à sa cousine. Au début du XVIIe siècle, le monastère accueille toujours une trentaine de moniales, le temporel a souffert des ravages des guerres de religion et, sous la direction de Jeanne de Bourbon, l'observance semble s'être relâchée. Flandrine de Nassau impose un retour progressif à la règle bénédictine (selon les us de Sainte-Croix), qu'elle fait imprimer en 1611. Le respect de la clôture est renforcé, la communauté des biens redevient effective, des tâches manuelles sont de nouveau exercées par les moniales. Ce rétablissement d'une vie monastique plus exigeante s'accompagne de nombreux travaux pour rénover les bâtiments de l'abbaye et pour enrichir le décor de l’église. Le renouveau est également spirituel. Flandrine est influencée par le modèle ignacien des jésuites. Elle passe pour avoir composé un recueil d'exercices spirituels pour les novices. Elle rénove la liturgie en donnant plus de place au chant et en autorisant des communions plus fréquentes, L’abbesse privilégie la célébration des cérémonies consacrées à la Passion, s'inscrivant dans le mouvement post-tridentin de glorification du Christ souffrant. D'inclination mystique, elle aurait envisagé de rejoindre l’ordre des bénédictines du Calvaire. Elle contribue également à revivifier le culte de sainte Radegonde. Ce renouveau s'accompagne du rétablissement de la situation matérielle de la maison : les finances de l'abbaye s’équilibrent, soutenues par la fortune personnelle de l’abbesse, le nombre des moniales augmente,  un prieuré est créé aux Sables-d’Olonne en 1633.<br/>
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L'abbatiat de Flandrine s'inscrit dans le contexte local d'une réforme catholique dynamique. Sa figure forme un diptyque avec celle d'Henri-Louis de La Rocheposay qui occupe le siège épiscopal de 1612 à 1651. Vivant au cœur de la ville de Poitiers, la communauté de Sainte-Croix en partage le quotidien et les difficultés (menaces militaires des années 1610-1620, épisodes de pestes et de disettes), ce qui contribue à faire de l'abbesse une figure protectrice et bienfaisante, en particulier auprès des pauvres. Les origines familiales et la trajectoire de Flandrine ont permis à ses biographes de tisser un parallèle avec la fondatrice de l’abbaye, une princesse étrangère elle-aussi, qui trouve dans l’engagement religieux l’accomplissement de son existence.
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La figure qui s'est imposée est celle d'une réformatrice déterminée et bienveillante, surmontant des obstacles physiques (une surdité précoce), matériels (le temporel en péril de l’abbaye), spirituels et politiques (l’évêque de Poitiers, gallican, tente de limiter l’influence des jésuites sur l'abbesse). Jusqu’ici, la fragilité des traces laissées par Flandrine (sa correspondance n'est que partiellement publiée) n'a pas permis de mesurer l'importance de ses multiples rôles : guide spirituel et gestionnaire d'une communauté féminine, figure locale de la reconquête catholique, princesse insérée dans des réseaux familiaux et diplomatiques européens, rôles qui méritent réévaluation.
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Version du 9 octobre 2018 à 13:05

Charlotte-Flandrine d'Orange-Nassau
Titre(s) Abbesse de Sainte-Croix de Poitiers
Biographie
Date de naissance 10 août 1579
Date de décès 10 avril 1640
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)



Notice d'Antoine Coutelle, 2018

Charlotte-Flandrine d’Orange-Nassau, née à Anvers en 1579, est la quatrième fille de Guillaume de Nassau dit le Taciturne, prince d'Orange, et de sa troisième épouse, Charlotte de Bourbon-Montpensier, ancienne abbesse devenue protestante. Son second prénom évoque la lutte des Pays-Bas contre la tutelle espagnole. Orpheline de mère à trois ans, Flandrine est confiée à une parente, abbesse du Paraclet de Troyes.
Après l'assassinat de son père, le 10 juillet 1584, l'éducation religieuse de la princesse de Nassau devient un enjeu politique européen. Sa tutrice s'étant convertie à la Réforme, son grand-père maternel obtient en 1588 un ordre royal pour la faire remettre à sa tante Jeanne de Bourbon, abbesse de Sainte-Croix (Poitiers) et de Jouarre, contrariant ainsi le vœu fait par Elisabeth Ire d'Angleterre de faire élever les enfants du Taciturne dans la foi réformée. Lorsque Flandrine manifeste la volonté d'entrer au couvent, la princesse douairière de Nassau proteste auprès d'Henri IV qui accepte de surseoir à la décision de quelques mois. C’est finalement en 1594, âgée de 15 ans, que Flandrine prend le voile à Poitiers. Elle gardera toute sa vie des liens épistolaires étroits avec ses sœurs (Louise-Juliana, Élisabeth, Catherine-Belgique, Émilie-Antwerpiana et Charlotte-Brabantine), bien que restées protestantes.
La jeune princesse est formée pour prendre la tête de l'abbaye royale de Sainte-Croix fondée au VIe siècle par la reine Radegonde. Elle est nommée grande prieure en 1594, puis abbesse en 1603, à 24 ans. Cette charge lui échoit dans une logique de patrimonialisation des grands bénéfices ecclésiastiques. Elle succède à sa tante qui avait succédé elle-même à sa cousine. Au début du XVIIe siècle, le monastère accueille toujours une trentaine de moniales, le temporel a souffert des ravages des guerres de religion et, sous la direction de Jeanne de Bourbon, l'observance semble s'être relâchée. Flandrine de Nassau impose un retour progressif à la règle bénédictine (selon les us de Sainte-Croix), qu'elle fait imprimer en 1611. Le respect de la clôture est renforcé, la communauté des biens redevient effective, des tâches manuelles sont de nouveau exercées par les moniales. Ce rétablissement d'une vie monastique plus exigeante s'accompagne de nombreux travaux pour rénover les bâtiments de l'abbaye et pour enrichir le décor de l’église. Le renouveau est également spirituel. Flandrine est influencée par le modèle ignacien des jésuites. Elle passe pour avoir composé un recueil d'exercices spirituels pour les novices. Elle rénove la liturgie en donnant plus de place au chant et en autorisant des communions plus fréquentes, L’abbesse privilégie la célébration des cérémonies consacrées à la Passion, s'inscrivant dans le mouvement post-tridentin de glorification du Christ souffrant. D'inclination mystique, elle aurait envisagé de rejoindre l’ordre des bénédictines du Calvaire. Elle contribue également à revivifier le culte de sainte Radegonde. Ce renouveau s'accompagne du rétablissement de la situation matérielle de la maison : les finances de l'abbaye s’équilibrent, soutenues par la fortune personnelle de l’abbesse, le nombre des moniales augmente, un prieuré est créé aux Sables-d’Olonne en 1633.
L'abbatiat de Flandrine s'inscrit dans le contexte local d'une réforme catholique dynamique. Sa figure forme un diptyque avec celle d'Henri-Louis de La Rocheposay qui occupe le siège épiscopal de 1612 à 1651. Vivant au cœur de la ville de Poitiers, la communauté de Sainte-Croix en partage le quotidien et les difficultés (menaces militaires des années 1610-1620, épisodes de pestes et de disettes), ce qui contribue à faire de l'abbesse une figure protectrice et bienfaisante, en particulier auprès des pauvres. Les origines familiales et la trajectoire de Flandrine ont permis à ses biographes de tisser un parallèle avec la fondatrice de l’abbaye, une princesse étrangère elle-aussi, qui trouve dans l’engagement religieux l’accomplissement de son existence. La figure qui s'est imposée est celle d'une réformatrice déterminée et bienveillante, surmontant des obstacles physiques (une surdité précoce), matériels (le temporel en péril de l’abbaye), spirituels et politiques (l’évêque de Poitiers, gallican, tente de limiter l’influence des jésuites sur l'abbesse). Jusqu’ici, la fragilité des traces laissées par Flandrine (sa correspondance n'est que partiellement publiée) n'a pas permis de mesurer l'importance de ses multiples rôles : guide spirituel et gestionnaire d'une communauté féminine, figure locale de la reconquête catholique, princesse insérée dans des réseaux familiaux et diplomatiques européens, rôles qui méritent réévaluation.

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