Catherine Fradonnet/Fortunée Briquet
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DESROCHES, (Catherine Fradonnet) fille de Magdeleine Neveu et de M. Desroches, naquit à Poitiers. Les soins que sa mère prit de son éducation ne furent point inutiles, et les voeux qu'elle forma pour son immortalité ne furent point trompés. Mademoiselle Desroches eut l'avantage d'être dans son tems un des esprits les plus délicats de la province, et peut-être de la France. Elle connaissait le latin et le grec. Aux grâces de la figure, elle réunissait les qualités du coeur, et méritait qu'on lui appliquât l'un de ses vers:
Elle est plus belle aussi d'autant qu'elle est plus sage.
Cependant elle ne fut point à l'abri des traits de la calomnie, pour avoir composé des vers sous les noms de Charité et de Sincéro. Elle avait écrit, dans l'Épître à sa Mère, qu'elle ne connaissait ces deux personnages que par imagination, et qu'elle avait voulu former un parfait amoureux, comme quelques auteurs avaient représenté un roi parfait, un parfait orateur et un parfait courtisan. Mais l'envie tient-elle compte des meilleures raisons? Elle trouve trop de plaisir à troubler le repos des autres:
Car le repos d'autrui fait son propre malheur,
a dit ingénieusement Mademoiselle Desroches. Plusieurs écrivains lui dédièrent leurs ouvrages. Scévole de Sainte-Marthe lui a donné une place distinguée dans son Recueil d'éloges latins. Le père Hilarion de Coste l'a mise dans ses Éloges des femmes illustres; Mornac, dans ses Ferioe forenses, en parle comme de l'un des plus grands génies connus alors. Il la compare à Sapho et à Sulpice. Pierre l'Anglois de Belestat, dans ses Hyéroglyphes, lui adressa, ainsi qu'à sa mère, le tableau deuxième, qui est celui du Phénix. La piété filiale l'empêcha de faire un choix parmi les amans qui briguèrent sa main. Elle désirait de ne pas survivre à sa mère: ses souhaits furent exaucés; elles moururent l'une et l'autre le même jour et de la même maladie.
On trouve ses ouvrages dans les différentes éditions indiquées à l'article de Madame de Lavillée: édition de 1579, Dialogue de vieillesse et de jeunesse, semé de traits ingénieux; Dialogue de vertu et fortune; Dialogue de la main, du pied et de la bouche; Dialogue de la pauvreté et la faim; Dialogue d'amour, de beauté et de Physis; Dialogue de Sincéro et de Charite; Sonnets et Chansons de Sincéro à Charite; Sonnets et Chansons de Charite à Sincéro; Réponse au dernier Sonnet de Charite; la Rose, pièce d'un style gracieux; Stances pour une Mascarade d'Amazone; Chansons des Amazones; à sa Quenouille; à ses Écrits; elle les compare à Bitonet Cléobis, qui traînèrent au temple d'Apollon le char de celle qui leur donna le jour; de la Musique; Hymne de l'eau, à la reine, mère du roi; Imitation de la mère de Salomon; la Femme forte, décrite par Salomon, pièce adressée à sa mère; l'Agnodice; Antithèse du somme et de la mort; Épitaphes de Médée, Clytemnestre, Lucrèce, Niobe; Tobie, tragi-comédie en un acte, avec des choeurs; Stances au roi, sur son retour de Pologne. A la suite de ces stances, on en lit deux traductions, l'une en vers grecs, par Joseph Scaliger, et l'autre en vers latins, par Sainte-Marthe. Édition de 1583, Épître à sa mère, en faveur des femmes qui s'adonnent à l'étude; les Vers dorés de Pythagore; les Énigmes du même auteur; Quatrains; Cantique de l'heureuse Vierge, mère de Dieu; Second Cantique; Épître à sa mère sur sa bergerie; Bergerie; Épitaphes; Chansons; deux Dialogues en prose, le premier de Placide et Sévère, le second d'Iris et Pasithée; les Fleurs; Réponses; Sonnets; la Puce. Parmi les oeuvres de Mademoiselle Desroches, on voit encore deux Dialogues, sur les avantages que les femmes peuvent retirer de l'étude; le Ravissement de Proserpine, poëme en trois chants, traduit de Claudien. Les lettres de sa composition, publiées avec celles de sa mère, sont au nombre de 70. On y distingue particulièrement la 1ere., le 39e., le 69e., et la 70e. Il parut sous son nom: Panthée, tragédie prise de Xénophon, dédiée à l'évêque de Coutances, mise en ordre par Caie Jules Guersans; Poitiers, les Bouchets, 1571, in-4. Quelques auteurs attribuent cette pièce à Guersans, quoiqu'il ait protesté que cet OEuvre n'étoit jamais sorti de son esprit; mais d'un Jupiter du cerveau duquel la Pallas de notre France l'avoit fait naître.