Antoinette-Adrienne de Rabaudy : Différence entre versions

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Antoinette-Adrienne de Rabaudy est née le 23 mars 1744 de l’union de Pierre de Rabaudy (1702-1754) et de Marie de Comère (1727-1792). Issue d’une famille de parlementaires toulousains, elle épouse, le 25 novembre 1766, Joseph-Henri de Cassan de Glatens, conseiller au Parlement. De ce mariage naissent trois enfants, deux fils et une fille. À la suite de la Révolution, le fils et le gendre d’Antoinette-Adrienne de Rabaudy choisissent d’émigrer de l’autre côté des Pyrénées, d’abord en Espagne puis à Lisbonne. Antoinette-Adrienne, elle, reste à Toulouse avec sa fille et son mari. <br/>
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Le 23 mars 1793, la Convention nationale assimile les parents d’émigrés à des émigrés si les premiers ont porté secours aux seconds, les rendant donc passibles des mêmes peines. Le 17 septembre de la même année, un décret, connu sous le nom de « loi des suspects », définit comme suspects « ceux des ci-devant nobles, ensemble les maris, les femmes, les pères, mères, fils ou filles, frères ou soeurs, et agents d'émigrés, qui n'ont pas constamment manifesté leur attachement à la révolution », ce qui entraîne un renforcement de la suspicion à Toulouse. En conséquence, le 6 octobre 1793, Antoinette-Adrienne et sa fille sont arrêtées comme suspectes et incarcérées. Au cours de son emprisonnement, elle rédige par deux fois, les 6 et 8 novembres 1793, une pétition pour protester et demander sa libération, sans succès. Son procès se tient le 1er mars 1794. Pour prouver sa duplicité et sa trahison, l’accusateur public s’appuie sur une lettre de Mme de Rabaudy, rédigée en décembre 1792 à destination de son fils, émigré à Lisbonne, Lors de son interrogatoire, elle avoue  lui avoir envoyé des fonds mais se défend de toute hostilité à la Révolution : elle indique que ses actions sont motivées par le seul souci de pallier les difficultés financières de son fils. Cependant, reconnue coupable d’avoir correspondu avec son fils émigré, de lui avoir envoyé de l’argent et, de ce fait, d’avoir participé à des entreprises contre-révolutionnaires, elle est condamnée à mort le jour même et guillotinée le lendemain, le 2 mars. Elle est la seule femme exécutée par le Tribunal révolutionnaire toulousain. Face à la piété que manifeste Antoinette-Adrienne sur l’échafaud, la foule se serait émue de son exécution. Cette compassion, contraire aux sentiments que les spectateurs sont supposés ressentir devant le spectacle de la mort d’une contre-révolutionnaire, est difficilement quantifiable. Elle semble néanmoins avoir poussé les autorités à réagir. Un certain Pescayre, prisonnier au moment des faits, indique, dans le récit de son incarcération, que la compagne de l’un de leurs geôliers s’est vue interdire tout contact avec eux après avoir publiquement exprimé son émotion devant la mort de Mme de Rabaudy.  <br/>
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Le procès et l’exécution d’Antoinette-Adrienne doivent être inscrits dans le contexte révolutionnaire de l’hiver 1793-1794. La République est en guerre avec l’Espagne et le Portugal. Toulouse, centre logistique majeur pour les armées révolutionnaires, est particulièrement concernée par ce conflit. Or, les premiers mois de guerre voient les armées françaises perdre plusieurs batailles, faisant craindre l’invasion de la ville par les Espagnols et les Portugais. Ainsi, la pression s’accroit à mesure que le péril se rapproche : les parents d’émigrés deviennent alors d’autant plus suspects que leurs proches ont choisi la péninsule ibérique comme lieu d’exil, ce qui est le cas d’Antoinette-Adrienne. Perçus comme d’éventuels espions au service des ennemis de la Révolution, les parents d’émigrés font alors l’objet d’une répression plus importante. La condamnation d’Antoinette-Adrienne résulte de cette dynamique : une peur constante de l’ennemi intérieur accrue par la crainte d’une invasion étrangère. <br/>
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Son procès et son exécution ont été décrits par plusieurs historiens royalistes au début du XIXe siècle. Antoinette-Adrienne apparait, dans leurs récits, comme une martyre de la violence révolutionnaire, symbole du dévouement maternel et de la dignité de la noblesse toulousaine, condamnée à tort par une justice aveugle et impitoyable. Ce traitement hagiographique est mis au service d’une critique virulente des années révolutionnaires visant à discréditer durablement l’héritage de la Révolution française dans le contexte de la Restauration.
  
Ce personnage n'a pas encore de notice moderne
 
  
  

Version du 17 décembre 2019 à 12:16

Antoinette-Adrienne de Rabaudy
Conjoint(s) Joseph-Henri de Cassan de Glatens
Biographie
Date de naissance 23 mars 1744
Date de décès 2 mars 1794
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice de Guillaume Debat, 2019

Antoinette-Adrienne de Rabaudy est née le 23 mars 1744 de l’union de Pierre de Rabaudy (1702-1754) et de Marie de Comère (1727-1792). Issue d’une famille de parlementaires toulousains, elle épouse, le 25 novembre 1766, Joseph-Henri de Cassan de Glatens, conseiller au Parlement. De ce mariage naissent trois enfants, deux fils et une fille. À la suite de la Révolution, le fils et le gendre d’Antoinette-Adrienne de Rabaudy choisissent d’émigrer de l’autre côté des Pyrénées, d’abord en Espagne puis à Lisbonne. Antoinette-Adrienne, elle, reste à Toulouse avec sa fille et son mari.

Le 23 mars 1793, la Convention nationale assimile les parents d’émigrés à des émigrés si les premiers ont porté secours aux seconds, les rendant donc passibles des mêmes peines. Le 17 septembre de la même année, un décret, connu sous le nom de « loi des suspects », définit comme suspects « ceux des ci-devant nobles, ensemble les maris, les femmes, les pères, mères, fils ou filles, frères ou soeurs, et agents d'émigrés, qui n'ont pas constamment manifesté leur attachement à la révolution », ce qui entraîne un renforcement de la suspicion à Toulouse. En conséquence, le 6 octobre 1793, Antoinette-Adrienne et sa fille sont arrêtées comme suspectes et incarcérées. Au cours de son emprisonnement, elle rédige par deux fois, les 6 et 8 novembres 1793, une pétition pour protester et demander sa libération, sans succès. Son procès se tient le 1er mars 1794. Pour prouver sa duplicité et sa trahison, l’accusateur public s’appuie sur une lettre de Mme de Rabaudy, rédigée en décembre 1792 à destination de son fils, émigré à Lisbonne, Lors de son interrogatoire, elle avoue lui avoir envoyé des fonds mais se défend de toute hostilité à la Révolution : elle indique que ses actions sont motivées par le seul souci de pallier les difficultés financières de son fils. Cependant, reconnue coupable d’avoir correspondu avec son fils émigré, de lui avoir envoyé de l’argent et, de ce fait, d’avoir participé à des entreprises contre-révolutionnaires, elle est condamnée à mort le jour même et guillotinée le lendemain, le 2 mars. Elle est la seule femme exécutée par le Tribunal révolutionnaire toulousain. Face à la piété que manifeste Antoinette-Adrienne sur l’échafaud, la foule se serait émue de son exécution. Cette compassion, contraire aux sentiments que les spectateurs sont supposés ressentir devant le spectacle de la mort d’une contre-révolutionnaire, est difficilement quantifiable. Elle semble néanmoins avoir poussé les autorités à réagir. Un certain Pescayre, prisonnier au moment des faits, indique, dans le récit de son incarcération, que la compagne de l’un de leurs geôliers s’est vue interdire tout contact avec eux après avoir publiquement exprimé son émotion devant la mort de Mme de Rabaudy.

Le procès et l’exécution d’Antoinette-Adrienne doivent être inscrits dans le contexte révolutionnaire de l’hiver 1793-1794. La République est en guerre avec l’Espagne et le Portugal. Toulouse, centre logistique majeur pour les armées révolutionnaires, est particulièrement concernée par ce conflit. Or, les premiers mois de guerre voient les armées françaises perdre plusieurs batailles, faisant craindre l’invasion de la ville par les Espagnols et les Portugais. Ainsi, la pression s’accroit à mesure que le péril se rapproche : les parents d’émigrés deviennent alors d’autant plus suspects que leurs proches ont choisi la péninsule ibérique comme lieu d’exil, ce qui est le cas d’Antoinette-Adrienne. Perçus comme d’éventuels espions au service des ennemis de la Révolution, les parents d’émigrés font alors l’objet d’une répression plus importante. La condamnation d’Antoinette-Adrienne résulte de cette dynamique : une peur constante de l’ennemi intérieur accrue par la crainte d’une invasion étrangère.

Son procès et son exécution ont été décrits par plusieurs historiens royalistes au début du XIXe siècle. Antoinette-Adrienne apparait, dans leurs récits, comme une martyre de la violence révolutionnaire, symbole du dévouement maternel et de la dignité de la noblesse toulousaine, condamnée à tort par une justice aveugle et impitoyable. Ce traitement hagiographique est mis au service d’une critique virulente des années révolutionnaires visant à discréditer durablement l’héritage de la Révolution française dans le contexte de la Restauration.

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