Anne de Lenclos : Différence entre versions

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== Notice ==
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== Notice de [[Nathalie Grande]], 2013. ==
Ce personnage n'a pas encore de notice moderne.
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Née à Paris vers 1620, Anne de Lenclos est la fille d’un « suivant de M. d’Elbeuf qui jouait fort bien du luth », pour reprendre les mots de Tallemant des Réaux, et de Marie-Barbe de La Marche. Menant une vie aventureuse, ce père disparaît à la suite d’un duel alors que sa fille, à qui il lègue principalement son talent pour le luth, est encore adolescente. La mère, abandonnée et sans ressources, aurait elle-même organisé, toujours selon Tallemant, les premiers rendez-vous galants et rétribués de sa fille, bientôt entretenue publiquement par différents amants. Mais les témoignages que l’on a sur Ninon de Lenclos laissent entendre qu’elle change de vie dès sa jeunesse, devenant plutôt une femme entretenue qu’une prostituée. Tallemant explique ainsi comment elle choisit ses amants selon son « caprice » : « On a distingué ses amants en trois classes : les ''payeurs'', dont elle ne se souciait guère, et qu’elle n’a soufferts que jusqu’à ce qu’elle ait eu de quoi s’en passer ; les martyrs [ceux qu’elle faisait attendre], et les ''favoris'' » (Tallemant, ''Historiettes'', t. II p. 443). Sa maison devient un lieu de rencontre pour les esprits déniaisés, dont la fréquentation l’amène sans doute à formuler de plus en plus clairement des idées libertines. Victime du parti dévot, elle est conduite en mars 1656 sur ordre d’Anne d’Autriche aux « Madelonnettes », institution destinée à enfermer les « femmes de mauvaise vie », ce qui est une manière de la rabaisser au rang de prostituée ; l’enfermement puis le bannissement hors de Paris sont justifiés par des accusations de débauche et d’impiété. De nombreuses voix prennent sa défense contre ce traitement humiliant, et elle est bientôt envoyée quelques temps en retraite dans un couvent de Lagny : c’est là qu’elle reçoit la visite de la reine Christine de Suède, signe de notoriété mais aussi d’une certaine respectabilité, et d’un prestige certain. Et Mme de Motteville, suivante d’Anne d’Autriche, note dans ses ''Mémoires'' que « ce fut à elle seule, de toutes les femmes qu’elle vit en France, à qui [cette reine] donna quelque marque d’estime ». Ainsi on constate que « Mademoiselle de Lenclos », même après ce traitement infamant, continue à ne pas être exclue d’une certaine bonne société : Scarron la loue dans ses vers et elle devient une amie intime de son épouse, Françoise d’Aubigné ; la très respectable Madeleine de Scudéry la peint dans la quatrième partie de ''Clélie'' (1658) sous les traits de « l’aimable Clarice » ; Somaize lui consacre un article dans son ''Grand Dictionnaire des Précieuses'' (1661) sous le nom de « Nidalie ». Sans rien récuser de ce passé, elle vit à sa fantaisie, entourée d’ami(e)s et d’un respect certain, au point que son salon est considéré comme un des lieux majeurs de la mondanité galante du Grand Siècle.
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De nombreuses lettres, et même un opuscule satirique ''La Coquette vengée'' (1659), lui ont été attribués, constituant une véritable œuvre… essentiellement apocryphe. On attribue en fait à sa main une quarantaine de lettres, datant des dernières décennies de sa longue vie, exemple de correspondance mondaine. Celles échangées avec Saint-Evremond, diffusées dès le XVIIe siècle grâce aux éditions des ''Œuvres mêlées'' de ce dernier, font apparaître une complicité d’esprit qui prouve l’amitié et l’estime de celui-là pour celle à qui il dédia, sous le pseudonyme de la « moderne Leontium » -allusion à une célèbre courtisane antique, maîtresse et disciple d’Epicure-  ses réflexions ''Sur la Morale d’Épicure'' (1684). Ces échanges épistolaires, où les deux correspondants expriment une conception de la vie, de l’usage des plaisirs, de la vieillesse, en accord avec une morale épicurienne, montrent comment le salon de Ninon de Lenclos a contribué à transmettre et à diffuser les idées auxquelles les philosophes et les salons du XVIIIe siècle emprunteront. Elle continue à intéresser au XIXe siècle, comme le montrent diverses éditions de ses textes (ou de ceux qui lui étaient attribuées), ou la « Causerie du lundi » que consacra Sainte-Beuve à « Saint-Evremond et Ninon » (Sainte-Beuve, ''Causeries du lundi'', Paris, Garnier Frères, 1927, vol. IV p. 170-191).
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Ninon reste aujourd’hui surtout célèbre pour un certain nombre de bons mots, qui ont traversé le temps grâce aux anecdotes de Tallemant des Réaux ou à la correspondance de Mme de Sévigné. Sa légende galante fait régulièrement le bonheur de biographes largement romanciers et de magazines historiques ; mais elle est aussi perçue comme une figure de « femme libérée » avant l’heure, comme en témoigne la notice biographique que lui a consacrée le centre féministe bruxellois Rosa, où elle a été retenue pour figurer parmi les « femmes remarquables ».
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Version du 28 février 2013 à 16:45

Anne de Lenclos
Dénomination(s) Ninon de Lenclos, Ninon de L’Enclos, Ninon de Lanclos
Biographie
Date de naissance Vers 1620?
Date de décès 1705
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)
Dictionnaire Pierre-Joseph Boudier de Villemert (1779)
Dictionnaire Fortunée Briquet (1804)
Dictionnaire Philibert Riballier et Catherine Cosson (1779)


Notice de Nathalie Grande, 2013.

Née à Paris vers 1620, Anne de Lenclos est la fille d’un « suivant de M. d’Elbeuf qui jouait fort bien du luth », pour reprendre les mots de Tallemant des Réaux, et de Marie-Barbe de La Marche. Menant une vie aventureuse, ce père disparaît à la suite d’un duel alors que sa fille, à qui il lègue principalement son talent pour le luth, est encore adolescente. La mère, abandonnée et sans ressources, aurait elle-même organisé, toujours selon Tallemant, les premiers rendez-vous galants et rétribués de sa fille, bientôt entretenue publiquement par différents amants. Mais les témoignages que l’on a sur Ninon de Lenclos laissent entendre qu’elle change de vie dès sa jeunesse, devenant plutôt une femme entretenue qu’une prostituée. Tallemant explique ainsi comment elle choisit ses amants selon son « caprice » : « On a distingué ses amants en trois classes : les payeurs, dont elle ne se souciait guère, et qu’elle n’a soufferts que jusqu’à ce qu’elle ait eu de quoi s’en passer ; les martyrs [ceux qu’elle faisait attendre], et les favoris » (Tallemant, Historiettes, t. II p. 443). Sa maison devient un lieu de rencontre pour les esprits déniaisés, dont la fréquentation l’amène sans doute à formuler de plus en plus clairement des idées libertines. Victime du parti dévot, elle est conduite en mars 1656 sur ordre d’Anne d’Autriche aux « Madelonnettes », institution destinée à enfermer les « femmes de mauvaise vie », ce qui est une manière de la rabaisser au rang de prostituée ; l’enfermement puis le bannissement hors de Paris sont justifiés par des accusations de débauche et d’impiété. De nombreuses voix prennent sa défense contre ce traitement humiliant, et elle est bientôt envoyée quelques temps en retraite dans un couvent de Lagny : c’est là qu’elle reçoit la visite de la reine Christine de Suède, signe de notoriété mais aussi d’une certaine respectabilité, et d’un prestige certain. Et Mme de Motteville, suivante d’Anne d’Autriche, note dans ses Mémoires que « ce fut à elle seule, de toutes les femmes qu’elle vit en France, à qui [cette reine] donna quelque marque d’estime ». Ainsi on constate que « Mademoiselle de Lenclos », même après ce traitement infamant, continue à ne pas être exclue d’une certaine bonne société : Scarron la loue dans ses vers et elle devient une amie intime de son épouse, Françoise d’Aubigné ; la très respectable Madeleine de Scudéry la peint dans la quatrième partie de Clélie (1658) sous les traits de « l’aimable Clarice » ; Somaize lui consacre un article dans son Grand Dictionnaire des Précieuses (1661) sous le nom de « Nidalie ». Sans rien récuser de ce passé, elle vit à sa fantaisie, entourée d’ami(e)s et d’un respect certain, au point que son salon est considéré comme un des lieux majeurs de la mondanité galante du Grand Siècle. De nombreuses lettres, et même un opuscule satirique La Coquette vengée (1659), lui ont été attribués, constituant une véritable œuvre… essentiellement apocryphe. On attribue en fait à sa main une quarantaine de lettres, datant des dernières décennies de sa longue vie, exemple de correspondance mondaine. Celles échangées avec Saint-Evremond, diffusées dès le XVIIe siècle grâce aux éditions des Œuvres mêlées de ce dernier, font apparaître une complicité d’esprit qui prouve l’amitié et l’estime de celui-là pour celle à qui il dédia, sous le pseudonyme de la « moderne Leontium » -allusion à une célèbre courtisane antique, maîtresse et disciple d’Epicure- ses réflexions Sur la Morale d’Épicure (1684). Ces échanges épistolaires, où les deux correspondants expriment une conception de la vie, de l’usage des plaisirs, de la vieillesse, en accord avec une morale épicurienne, montrent comment le salon de Ninon de Lenclos a contribué à transmettre et à diffuser les idées auxquelles les philosophes et les salons du XVIIIe siècle emprunteront. Elle continue à intéresser au XIXe siècle, comme le montrent diverses éditions de ses textes (ou de ceux qui lui étaient attribuées), ou la « Causerie du lundi » que consacra Sainte-Beuve à « Saint-Evremond et Ninon » (Sainte-Beuve, Causeries du lundi, Paris, Garnier Frères, 1927, vol. IV p. 170-191). Ninon reste aujourd’hui surtout célèbre pour un certain nombre de bons mots, qui ont traversé le temps grâce aux anecdotes de Tallemant des Réaux ou à la correspondance de Mme de Sévigné. Sa légende galante fait régulièrement le bonheur de biographes largement romanciers et de magazines historiques ; mais elle est aussi perçue comme une figure de « femme libérée » avant l’heure, comme en témoigne la notice biographique que lui a consacrée le centre féministe bruxellois Rosa, où elle a été retenue pour figurer parmi les « femmes remarquables ».

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