Anne de La Capelle-Biron : Différence entre versions

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Anne de La Capelle-Biron
Dénomination(s) Soeur de La Chapelle
Soeur La Chapelle
Soeur Anne de Sainte-Aldegonde?
Biographie
Date de naissance Après 1600
Date de décès Avant 1700
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice de Paul Scott, 2007

On ne possède aucun détail sur la vie de la soeur de La Chapelle qui ne soit hypothétique. Son existence nous est seulement connue par une signature («DE LA CHAPELLE REL. C.»), celle de la dédicace d’une tragédie, L’Illustre philosophe, ou l’histoire de sainte Catherine d’Alexandrie, publiée en 1663 chez Blaise Simonnot à Autun. L’abréviation utilisée peut être lue comme «religieuse cloîtrée» et indiquer que la soeur de La Chapelle appartenait à l’une des communautés religieuses présentes dans la ville d’Autun à cette époque: dominicaines, visitandines, ursulines ou bénédictines. De nouvelles recherches permettront peut-être de confirmer son identification avec soeur Anne de Sainte-Aldegonde de la Capelle-Biron, de l’abbaye bénédictine de Saint-Jean-le-Grand, dont le caractère acariâtre (odiosa omnibus) et le goût pour la lecture d’«histoires profanes» (historia profanas legit) semblent déplaire au vicaire général Antoine Dufeu, lors de sa visite régulière en 1676.

Sa pièce, consacrée au martyre de sainte Catherine d’Alexandrie et dédiée à son frère, le prieur de La Chapelle, s’inscrit dans une nouvelle tradition littéraire féminine: l’émergence des femmes dramaturges qui, depuis une décennie, s’emparent du thème du martyre. À la suite de Marthe Cosnard et Mme de Saint-Balmon (1650), puis de Françoise Pascal (1654) -et un an après la première représentation d’une tragédie composée par une femme sur la scène parisienne (le Manliusde Mme de Villedieu)-, La Chapelle fait, à son tour, oeuvre de pionnière: elle est, en l’état des recherches, la seule religieuse du XVIIe siècle à avoir publié une pièce de théâtre en France, même si l’on sait combien le théâtre était prisé dans les couvents féminins. En choisissant cette célèbre légende hagiographique, la religieuse participe du goût, devenu provincial, pour le thème des vierges martyres, alors que ce dernier n’est plus en vogue sur les scènes parisiennes. Ce faisant, elle apporte surtout son soutien aux champions des femmes: la légende de sainte Catherine d’Alexandrie, qui parvint, par son savoir et son éloquence, à convertir au christianisme des philosophes païens, est alors citée à l’époque comme une preuve historique et théologique de l’égalité possible des femmes et des hommes. Le traitement de l’histoire par l’autrice et la place qu’elle accorde au personnage de l’impératrice offrent, en outre, une représentation très positive du pouvoir intellectuel et politique des femmes. Loin d’apparaître comme une mystique possédée par la lumière divine, Catherine est avant tout une femme de savoir, dont la conversion est raisonnée: à travers le cartésianisme de cette «illustre philosophe», l’autrice met en scène le triomphe de la religion chrétienne sur le polythéisme, mais aussi la victoire de la raison sur les passions. Cette tragédie se fait ainsi l’apologie de l’éducation féminine par la voix d’une sainte, modèle héroïque de la femme philosophe, capable de débattre de théologie et de l’emporter sur les plus grands esprits de son temps.

Le nombre restreint des rôles masculins peut laisser penser que la pièce était destinée à être jouée par les jeunes novices et écolières d’Autun. Devenu introuvable, son texte est longtemps resté absent des Histoires du théâtre. Au XVIIIe siècle, seules les Anecdotes dramatiques (1775) y font une brève allusion. Dans la première moitié du XXe siècle, l’historien du théâtre, Henry C. Lancaster, en fait mention, tout en précisant qu’il n’avait pu consulter d’exemplaire. Quant à Cioranescu, il l’a inclus en 1965 dans sa Bibliographie de la littérature française du XVIIe siècle, mais en l’attribuant à tort à Jean-François de Nîmes. La pièce n’a donc fait sa réapparition qu’au XXIe siècle à la suite de recherches en 2000 à la Bibliothèque de l’Arsenal à Paris et elle a, depuis peu, retrouvé sa place dans les catalogues de la Bibliothèque nationale de France. Malgré ses faiblesses, cette pièce, rééditée en 2008, offre un éclairage précieux sur cette nouvelle génération de lettrées (citons notamment Marthe Cosnard, Françoise Pascal et Mme de Villedieu) à laquelle, au sein de son couvent, appartient la soeur de La Chapelle: issues de milieux moins favorisés que leurs prédécesseuses, celles-ci n’hésitent pas à publier du théâtre et à se faire les apôtres du savoir féminin et de l’égalité des sexes dans tous les domaines.

Oeuvres

1663 : L’Illustre philosophe, ou l’histoire de sainte Catherine d’Alexandrie (tragédie en 5 actes, en vers), Autun, Blaise Simonnot -- éd. Paul Scott, dans Théâtre de femmes de l’Ancien Régime, vol. 2, XVIIe siècle, dir. A. Evain, P. Gethner, H. Goldwyn, Saint-Etienne, Publications de l’Université de Saint-Étienne, 2008, p.223-315.

Choix bibliographique

- Lancaster, Henry Carrington, A History of French Dramatic Literature in the Seventeenth Century, Baltimore, Johns Hopkins Press, 1929-36, t.III, p.415.

- Scott, Paul, «Saint Catherine in Seventeenth-Century French Tragedy», dans Female Saints and Sinners: Saintes et Mondaines (1450–1650), dir. J. Britnell et A. Moss, Durham, Durham Modern Language Series, 2002, p.39-58.

- Scott, Paul, «Cloisters, Teaching and Tragedy: a Rediscovered Lost Play of 1663», Biblio 17, 144, 2002 («Les Femmes au Grand Siècle»), p.150-161.

Sources

Archives départementales de Saône et Loire (France, Mâcon), Abbaye de St-Jean le Grand à Autun, H 1174.

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