Anna Bijns/Hilarion de Coste : Différence entre versions

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Ce n'est pas sans sujet qu'ils luy ont consacré un Eloge dans leurs oeuvres: car elle le merite autant, et mesme à meilleur titre que plusieurs hommes illustres, ausquels ils ont donné place et rang honorable dans leurs Eloges et Bibliotheques. Cette fille s'est rendue d'autant plus admirable entre toutes les filles et les femmes de la belle ville d'Anvers, l'oeil des dix-sept Provinces, le sejour de Mercure, et les delices de ces contrées Septentrionales, que les [123] Dames de cette celebre et renommée Cité, excellent entre toutes celles des autres villes de ces Provinces là: car elle estoit sçavante par dessus le commun et l'ordinaire des doctes de son sexe, douée d'un jugement admirable, et qu'on ne sçauroit assez louer pour la candeur de ses moeurs, son affection à la defense de l'Eglise Catholique, Apostolique et Romaine, ferme non seulement en sa Religion, mais zelée en la vraye pieté; laquelle prit un grand soin à enseigner les lettres, les bonnes moeurs, et la devotion à plusieurs jeunes filles et Demoiselles.<br />
 
Ce n'est pas sans sujet qu'ils luy ont consacré un Eloge dans leurs oeuvres: car elle le merite autant, et mesme à meilleur titre que plusieurs hommes illustres, ausquels ils ont donné place et rang honorable dans leurs Eloges et Bibliotheques. Cette fille s'est rendue d'autant plus admirable entre toutes les filles et les femmes de la belle ville d'Anvers, l'oeil des dix-sept Provinces, le sejour de Mercure, et les delices de ces contrées Septentrionales, que les [123] Dames de cette celebre et renommée Cité, excellent entre toutes celles des autres villes de ces Provinces là: car elle estoit sçavante par dessus le commun et l'ordinaire des doctes de son sexe, douée d'un jugement admirable, et qu'on ne sçauroit assez louer pour la candeur de ses moeurs, son affection à la defense de l'Eglise Catholique, Apostolique et Romaine, ferme non seulement en sa Religion, mais zelée en la vraye pieté; laquelle prit un grand soin à enseigner les lettres, les bonnes moeurs, et la devotion à plusieurs jeunes filles et Demoiselles.<br />
Cette honneste fille voyant que les heresies de Luther et de Calvin se répandoient dans le Duché de Brabant, le Comté de Flandre et par les autres Provinces, au grand dommage des Païs-bas (car ces nouvelles heresies ont ruiné tous les Estats,les Royaumes et les Empires où elles se sont glissées) écrivit plusieurs Livres contre les erreurs naissantes en vers Teutoniques ou Flamans; par la lecture desquels un grand nombre de Catholiques sont demeurez fermes et constans en l'ancienne et vraye Religion Catholique et orthodoxe, et une partie de ceux qui avoient suivy les nouvelles opinions des Sectaires sont rentrez en l'Eglise qu'ils avoient quittée. Gilles Eucharius homme docte natif de Gand a mis et tourné en Latin les poësies de cette Sapho de nos jours, et seconde Eudoxia ou Proba Falconia, et les fit imprimer à Anvers l'an 1581. Et l'on voit ce distique dans les Athenes Belgiques de François Sivvert en l'honneur de cette sage et sçavante fille.<br />
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Cette honneste fille voyant que les heresies de Luther et de Calvin se répandoient dans le Duché de Brabant, le Comté de Flandre et par les autres Provinces, au grand dommage des Païs-bas (car ces nouvelles heresies ont ruiné tous les Estats,les Royaumes et les Empires où elles se sont glissées) écrivit plusieurs Livres contre les erreurs naissantes en vers Teutoniques ou Flamans; par la lecture desquels un grand nombre de Catholiques sont demeurez fermes et constans en l'ancienne et vraye Religion Catholique et orthodoxe, et une partie de ceux qui avoient suivy les nouvelles opinions des Sectaires sont rentrez en l'Eglise qu'ils avoient quittée. Gilles Eucharius homme docte natif de Gand a mis et tourné en Latin les poësies de cette [[Sappho|Sapho]] de nos jours, et seconde Eudoxia ou [[Proba|Proba Falconia]], et les fit imprimer à Anvers l'an 1581. Et l'on voit ce distique dans les Athenes Belgiques de François Sivvert en l'honneur de cette sage et sçavante fille.<br />
''Arte pares Lesbis Sapho et mea Binsia, distant<br />
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''Hoc solo, vitia haec dedocet, illa docet.''<br />
 
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''Le voicy mis en nostre langue.<br />
 
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''Par les vers se font admirer,''<br />
 
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''Un seul point les fait differer,''<br />
 
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''Binse fait detester le vice,''<br />
 
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''Et Sapho le fait desirer.''
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''Et [[Sappho|Sapho]] le fait desirer.''
  
 
Anne de Bins est encore louable de ce qu'elle est demeurée fille, ayant choisi pour Epoux et donné sa foy à celuy qui est la fleur des champs, le lis des valées, la couronne [124] des Vierges, le salut de ses Amans par sa grace, et l'amour des sauvez en la gloire.
 
Anne de Bins est encore louable de ce qu'elle est demeurée fille, ayant choisi pour Epoux et donné sa foy à celuy qui est la fleur des champs, le lis des valées, la couronne [124] des Vierges, le salut de ses Amans par sa grace, et l'amour des sauvez en la gloire.
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[[Catégorie:Dictionnaire Hilarion de Coste]]

Version actuelle en date du 20 août 2012 à 17:41

[I,122] ANNE BINSIA OU DE BINS DEMOISELLE D'ANVERS.

BALTASAR Comte de Chastillon celebre dans ses écrits la belle Hyppolite Dame Italienne. Olimpia Morata de Ferrare femme sçavante, mais grande heretique, est bien louée par le Ferrarois. Lucain nous a vanté Polla Argentaria. Le grand Scevole ou Gaucher de Sainte Marthe a donné place dans ses beaux Eloges des hommes illustres de nostre France aux Dames des Roches de Poitiers mere et fille. Le Pere de l'eloquence Latine vante ces Dames Romaines les Lelies, les Muties, les Licinies, et Cornelie mere des Gracches. C'est pourquoy il ne faut pas s'estonner si cette docte et chaste fille d'Anvers Anne de Bins ou Binsia, a receu cet honneur d'estre rangée parmy les sçavans et illustres Ecrivains de la Flandre ou des Païs-bas, par ces trois sçavans hommes, Aubert le Mire Doyen de l'Eglise de Nostre-Dame d'Anvers, et Maistre de la Chapelle de l'Infante Elizabet Claire Eugenie d'Espagne, Valere André de Dessels en Brabant, l'un des premiers jurisconsultes de l'Université de Louvain, la premiere Academie des Païs-bas, et François Sivvert d'Anvers le compatriote d'Anne.

Ce n'est pas sans sujet qu'ils luy ont consacré un Eloge dans leurs oeuvres: car elle le merite autant, et mesme à meilleur titre que plusieurs hommes illustres, ausquels ils ont donné place et rang honorable dans leurs Eloges et Bibliotheques. Cette fille s'est rendue d'autant plus admirable entre toutes les filles et les femmes de la belle ville d'Anvers, l'oeil des dix-sept Provinces, le sejour de Mercure, et les delices de ces contrées Septentrionales, que les [123] Dames de cette celebre et renommée Cité, excellent entre toutes celles des autres villes de ces Provinces là: car elle estoit sçavante par dessus le commun et l'ordinaire des doctes de son sexe, douée d'un jugement admirable, et qu'on ne sçauroit assez louer pour la candeur de ses moeurs, son affection à la defense de l'Eglise Catholique, Apostolique et Romaine, ferme non seulement en sa Religion, mais zelée en la vraye pieté; laquelle prit un grand soin à enseigner les lettres, les bonnes moeurs, et la devotion à plusieurs jeunes filles et Demoiselles.
Cette honneste fille voyant que les heresies de Luther et de Calvin se répandoient dans le Duché de Brabant, le Comté de Flandre et par les autres Provinces, au grand dommage des Païs-bas (car ces nouvelles heresies ont ruiné tous les Estats,les Royaumes et les Empires où elles se sont glissées) écrivit plusieurs Livres contre les erreurs naissantes en vers Teutoniques ou Flamans; par la lecture desquels un grand nombre de Catholiques sont demeurez fermes et constans en l'ancienne et vraye Religion Catholique et orthodoxe, et une partie de ceux qui avoient suivy les nouvelles opinions des Sectaires sont rentrez en l'Eglise qu'ils avoient quittée. Gilles Eucharius homme docte natif de Gand a mis et tourné en Latin les poësies de cette Sapho de nos jours, et seconde Eudoxia ou Proba Falconia, et les fit imprimer à Anvers l'an 1581. Et l'on voit ce distique dans les Athenes Belgiques de François Sivvert en l'honneur de cette sage et sçavante fille.
Arte pares Lesbis Sapho et mea Binsia, distant
Hoc solo, vitia haec dedocet, illa docet.
Le voicy mis en nostre langue.
Binse et Sapho d'un pareil artifice
Par les vers se font admirer,
Un seul point les fait differer,
Binse fait detester le vice,
Et Sapho le fait desirer.

Anne de Bins est encore louable de ce qu'elle est demeurée fille, ayant choisi pour Epoux et donné sa foy à celuy qui est la fleur des champs, le lis des valées, la couronne [124] des Vierges, le salut de ses Amans par sa grace, et l'amour des sauvez en la gloire.

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