Marie de Cotteblanche

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Marie de Cotteblanche
Dénomination(s) Marie de Costeblanche
Biographie
Date de naissance Vers 1520
Date de décès Vers 1580
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)
Dictionnaire Pierre-Joseph Boudier de Villemert (1779)
Dictionnaire Fortunée Briquet (1804)
Dictionnaire Hilarion de Coste (1647)


Notice de Anne R. Larsen, 2005

Fille de Guy de Cotteblanche, avocat au Parlement de Paris, et de Catherine Hesselin, mariés le 13 février 1517, Marie est probablemenet née en 1520. Elle est issue d'une famille mayennaise dont les premiers ancêtres connus (au XIVe siècle) sont qualifiés de bourgeois de Mayenne. L'un des premiers à s'établir à Paris, Guy de Cotteblanche meurt en 1540. Son épouse lui survit jusqu'en 1577. Marie a une soeur, Marguerite.

Sur Marie elle-même, on n'en sait guère plus que ce que nous en dit La Croix du Maine dans sa Bibliothèque (où Cotteblanche devient par erreur Costeblanche: voir infra «M. C. préfacière...», p.111), à savoir que cette «Damoiselle Parisienne, très-docte en Philosophie et Mathématiques» a «traduit trois Dialogues de Pierre Messie», imprimés «l'an 1566, auquel temps elle florissoit à Paris». La dédicace à Marguerite de Saluces, maréchale de Termes, nous apprend en outre qu'elle lui devait sa connaissance de l'italien, mais on ignore en quoi exactement. Cette dédicace fait également apparaître entre les deux femmes une complicité intellectuelle et une véritable communion sororale, qui ne sont pas sans rappeler les liens intellectuels et affectifs entre une Camille de Morel et sa mère Antoinette de Loynes, ou encore entre les Dames Des Roches, mère et fille. Marie de Cotteblanche ne paraît pas avoir publié d'autres ouvrages. Elle meurt certainement avant 1584, date de la parution de la Bibliothèque de La Croix du Maine, qui parle d'elle au passé.

Ses Trois dialogues de M. Pierre Messie... sont la traduction partielle de l'ouvrage Diálogos o Coloquios de Pedro Mexía (ou Mejía, 1497-1551), humaniste castillan, chroniqueur, cosmographe et astronome. Ce recueil, publié en 1547 à Séville, contenait six dialogues au total et connaissait un grand succès de librairie: plus d'une trentaine d'éditions en diverses langues entre 1566 et 1593, dont la version de Marie de Cotteblanche, la première en français. Plusieurs raisons ont pu l'inciter à traduire ces trois dialogues: leur auteur, fort réputé en astrologie et en mathématiques; leur genre, celui du dialogue cicéronien, qui se prêtait particulièrement bien à la vulgarisation du savoir, préoccupation humaniste par excellence; leur contenu scientifique, qui permettait à l'érudite de montrer sa maîtrise des sujets abordés et de répondre à l'attente de nombreuses «doctes» dames de la cour et de la haute bourgeoisie, qui se passionnaient pour les études astronomiques (voir infra «M. C. préfacière...», p.114). De plus, la langue de Pierre Messie affichait une orthographe latinisante, de nombreux termes techniques et des néologismes, une vénération pour l'étymologie et une abondance de sources grecques et latines, qui ont dû conforter Marie dans son amour pour «la lecture des bons livres» (Épître dédicatoire, Trois dialogues, f.2-v). Enfin, le travail de traduction lui a donné l'occasion de démontrer ses connaissances linguistiques, car Marie de Cotteblanche, tout en traduisant depuis le texte espagnol, s'est servie de la version italienne des dialogues de Pierre Messie par Alfonso d'Ulloa: son texte est accompagné de manchettes comparant les deux langues. Dans sa dédicace, toutefois, elle tait sa virtuosité afin de mieux afficher son appartenance à l'élite des italianisants («M. C. traductrice...», p.220).

La traduction de Marie de Cotteblanche a été appréciée: pas moins de vingt-neuf éditions en ont paru entre 1566 et 1643, soit en plaquettes autonomes, soit en complément des Diverses Leçons de Pierre Messie traduites par Claude Grujet, ou bien encore dans la traduction intégrale des dialogues de Messie faite par un traducteur anonyme en 1592. Le souvenir de la traductrice s'est conservé grâce à quelques notices sommaires chez Marguerite Buffet (1668), Joseph La Porte (1769), Boudier de Villemert (1779) et Louise de Kéralio (1786), qui reprenaient La Croix du Maine. Elle est ensuite tombée dans l'oubli et n'a été redécouverte que dans les années 1980.

Oeuvres

- 1566 : Trois dialogues de M. Pierre Messie, touchant la nature du Soleil, de la Terre, et de toutes les choses qui se font et apparoissent en l'air, Paris, Federic Morel.

Choix bibliographique

- Berriot-Salvadore, Evelyne, «Les femmes et les pratiques de l'écriture de Christine de Pisan à Marie de Gournay», Réforme, Humanisme, Renaissance, 16, 1983, p.52-69.
- La Charité, Claude, «Marie de Cotteblanche, traductrice de Pierre Messie, ou l'espagnol en filigrane de l'italien», in Jean-Philippe Beaulieu (dir.), D'une écriture à l'autre: les femmes et la traduction sous l'Ancien Régime, Ottawa, Presses de l'Université d'Ottawa, 2004, p.211-227.
- Larsen, Anne R., «Marie de Cotteblanche: préfacière et traductrice de trois dialogues de Pierre Messie», in Anne R. Larsen et Colette H. Winn (dir.), Études littéraires, 27-2, 1994 («Écrits de femmes à la Renaissance»), p.111-119.
- Id., «Writing in the Margins: Marie de Cotteblanche's Preface to Her Translation of Pierre Messie (1566)», Allegorica, 19, 1998, p.95-103.

Jugements

- «Marie de Cotteblanche, sous des apparences d'humilité, cherche sans doute à modeler sa persona de traductrice sur celle des officiers du roi qui, pour parfaire leur connaissance de l'italien, se livrent à la traduction. Étonnamment, l'apparente humilité de cette dédicace, de sa méthode comparatiste et de ses grands scrupules philologiques, ne sert qu'à rehausser le prestige sociopolitique qu'elle revendique implicitement, par le biais de l'italien, valorisé à la cour, au détriment de l'espagnol, langue de l'ennemi honni» (Claude La Charité, «Marie de Cotteblanche: traductrice...», voir supra, choix bibliog., p.220-221).

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