Anne-Louise Boyvin d'Hardancourt : Différence entre versions
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Anne-Louise Boyvin d'Hardancourt | ||
Conjoint(s) | Jacques Brillon de Jouy (1722-1787) | |
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Dénomination(s) | La Brillante (surnom utilisé par Benjamin Franklin) | |
Biographie | ||
Date de naissance | 13 juillet 1744 | |
Date de décès | 5 décembre 1824 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
Sommaire
Notice de Christine de Pas, 2014
Fille de Louis-Claude Boyvin d'Hardancourt, écuyer et secrétaire du roi, un mélomane éclairé, et de Marie Elisabeth Martin, Anne-Louise naît en 1744 dans le milieu de la noblesse de robe fortunée. Elle est mariée en 1763, à dix-neuf ans, avec Jacques Brillon de Jouy, de vingt-deux ans son aîné, lui-même écuyer, conseiller du roi et receveur des consignations des conseils du roi, Parlement et autres cours et juridictions. Elle en a deux filles, Aldegonde, et Cunégonde (1764-1831).
Peu après son mariage, elle commence à animer un salon, où elle brille comme claveciniste et compositrice. Elle reçoit chez elle, d’abord à Paris dans le quartier du Marais, puis à Passy, entre autres, des musiciens étrangers en recherche de mécènes, tels que Luigi Boccherini, Johann Schobert, Ernst Eichner, Henri-Joseph Rigel. Tous les quatre lui dédicacent différentes pièces pour clavecin. Son salon est élogieusement décrit par le musicien anglais Charles Burney, invité en 1770, qui mentionne également les qualités de claveciniste virtuose de Madame Brillon ; dans ses Mémoires, Elisabeth Vigée-Lebrun évoque elle aussi ses visites chez elle. De ces liens de Mme Brillon avec plusieurs artistes célèbres de son époque, reste aujourd’hui entre autres son portrait par Fragonard (Musée du Louvre).
Madame Brillon compose, essentiellement pour le clavier (des sonates), ou pour la voix (des romances), dans le style de l'époque. Elle est l'une des premières à Paris à s'intéresser au pianoforte, ce qui l'amène à correspondre avec Jean-Chrétien Bach à Londres. Elle écrit quelques pièces associant le clavecin et le pianoforte, ce qui est rare. Sa notoriété est renforcée par une grande amitié avec Benjamin Franklin, son voisin à Passy pendant son séjour parisien de 1777 à 1785, amitié qui l’amène à écrire une Marche des Insurgents (1777) pour célébrer la victoire des troupes de la Révolution américaine sur les Anglais à Saratoga. Malgré leurs trente-huit ans d'écart, leur correspondance abondante témoigne d'une relation faite de tendresse, de complicité et de curiosité intellectuelle. Madame Brillon l'accompagne parfois dans ses explorations parisiennes, par exemple pour rencontrer Mesmer et observer comment il utilise la musique dans sa thérapie par le magnétisme.
Sa bibliothèque musicale, comprenant ses propres oeuvres mais aussi celles qu'elle appréciait et jouait, illustre les goûts parisiens de l'époque, pour les effectifs sans doute réduits d'un salon privé.
Le départ de Franklin en 1785, la mort de son mari en 1787, puis la Révolution bouleversent cette vie brillante. On perd la trace de ses éventuelles activités musicales, mais on sait qu'elle traverse les épreuves de la fin du siècle avec énergie et intelligence, luttant pour préserver sa famille et son patrimoine. Elle meurt en 1824 chez sa fille, Madame Pâris d'Illins, au château de Villers-sur-Mer en Normandie, après avoir traversé, outre une longue révolution, les régimes de trois rois, une république et un empereur.
Aujourd’hui encore connue aux États-Unis en tant qu’amie de Franklin, elle apparaît à ce titre dans diverses productions, plus ou moins fantaisistes, réalisées pour la télévision américaine. Citée dans les grandes encyclopédies musicales, elle n’en est pas moins restée longtemps négligée en France, et quand elle est citée, c’est uniquement en lien avec Franklin. Cependant, sa redécouverte est en cours : l’historienne de l’art Marie-Anne Dupuy-Vachey, spécialiste de Fragonard, a découvert en 2012 que le célèbre tableau du peintre appelé « L’Étude » que conserve le Musée du Louvre est en fait le portrait de Mme Brillon, et les perspectives ouvertes par cette découverte sont en cours d’étude ; Mme Brillon vient d’être choisie comme personnalité musicienne de l’année pour le festival « Musiciennes à Ouessant » en août 2014 ; enfin elle est pour la première fois en 2014 l’objet d’une biographie par Christine de Pas.
Oeuvres
Aucune ne fut publiée de son vivant. Les quelques œuvres qui suivent furent publiées aux États-Unis entre 1992 et 1994, mais la plupart des œuvres restent à l’état de manuscrit, en majorité à l’American Philosophical Society de Philadelphie, quelques autres sont dispersées dans des collections privées.
- 1777 : “Marche des Insurgents”, première édition : Hildegard Publishing Company, 1992.
- 1775-1785 (fourchette probable selon Gustafson) : “Second Duo de harpe et piano”, première édition : Edited by Barbara Garvey Jackson, ClarNan Editions, 1993.
- 1775-1785 (fourchette probable selon Gustafson) : « romances et canzonettas » ; dates de composition selon Gustafson, dans la fourchette: 1775-1785; première édition dans “Songs of Anne-Louise Brillon de Jouy and Maria Cosway”, in Lieder and other Songs by women of the classic, Era, volume III. Edited by Barbara Garvey Jackson, ClarNan Editions, 1994.
- 1775-1785 : « Sonata VII », première édition dans Women Composers : Music by Women through the Ages, t. 5, édité par Bruce Gustafson. New York, G.K. Hall, 1998, p. 31–53 ; réédition : Bryn Mawr (Pennsylvanie), Hildegard, 1998.
Principales sources
- Philadelphie (USA), American Philosophical Society: des Sonates pour clavier, des Duos pour clavier et violon, des Duos pour harpe et piano, des Trios pour pianoforte, violon et basse, des Trios pour trois clavier (piano anglais, piano allemand, clavecin), ainsi que de nombreuses romances, « cantatilles », « canzonettes », accompagnées de divers instruments (clavier, violon[s], basse, hautbois, cor) -- manuscrits étudiés et inventoriés par Bruce Gustafson.
- Correspondance de Benjamin Franklin. Voir Benjamin Franklin Papers [1]
- Burney, Charles), "The Present State of Music in France and Italy", 1771 -- Traduction française: "Voyage musical dans l’Europe des Lumières", Paris, Flammarion, 1992.
Choix bibliographique
- De Pas, Christine, Madame Brillon de Jouy et son salon : une musicienne des Lumières, Paris, Editions du Petit Page, à paraître en juillet 2014.
- Gustafson, Bruce, « Madame Brillon et son salon », in Revue de musicologie, t. 85, n°2, 1999, p.297-332.
- Lopez, Claude-Anne, Mon cher Papa. Franklin and the ladies of Paris, Yale, 1966 -- Traduction française: Le sceptre et la foudre, Paris, Mercure de France, 1990.
Choix iconographique
- Vers 1765: Anonyme, Portrait de Mme de Brillon (collection particulière).
- Vers 1769: Jean-Honoré Fragonard, L’Étude, huile sur toile 0,82 x 0,66, Musée du Louvre[2].
Jugements
- « Mme Brillon joua longuement et je trouvai qu’elle n’avait pas usurpé sa réputation. Non seulement, elle rend les morceaux les plus difficiles avec beaucoup de sentiment, de goût et de précision, mais elle joue très bien à livre ouvert. [...] Mme Brillon écrit également de la musique. [...] Elle dessine fort bien et fait de la gravure. En un mot, c’est une femme très aimable et très accomplie. De nombreux compositeurs célèbres d’Allemagne et d’Italie qui ont séjourné en France lui ont dédié leurs ouvrages, en particulier Schobert et Boccherini » (Charles Burney, Voyage musical [1771], Voir supra Principales sources, p.78 et ss.