Christine de France : Différence entre versions
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− | Christine de France | + | == Notice de [[Florine Vital-Durand]], 2015== |
+ | Christine de France, fille de Henri IV et [[Marie de Médicis]], est née à Paris le 10 février 1606. Richelieu et Louis XIII, entrevoyant la Savoie, «porte des Alpes», comme la clef de leur lutte contre l’influence des Habsbourg en Italie, marient Christine en 1619 à Victor Amédée Ier (1587-1637), duc de Savoie en 1630 au décès de Charles-Emmanuel Ier. La duchesse est la sœur des plus grands de France : Louis XIII, Gaston d’Orléans, Élisabeth, reine d’Espagne en 1621 et Henriette, reine d’Angleterre en 1625. Rêvant elle-même d’un titre royal, elle soutient son époux dans sa quête de la couronne de Chypre, arguant de liens matrimoniaux du XVe siècle avec la maison de Lusignan régnant sur l’île. Elle a les mêmes ambitions, parfois contrariées, pour ses enfants : Louise est mariée à son oncle Maurice de Savoie, Marguerite au duc de Parme, Adélaïde au duc électeur de Bavière et Charles-Emmanuel à la nièce de Louis XIII, Françoise d’Orléans, mort peu après. Il épouse ensuite Jeanne-Baptiste de Nemours. À la mort de Victor-Amédée en 1637, Christine devient régente au nom du fils aîné, François-Hyacinthe, qui meurt un an plus tard, puis du cadet Charles-Emmanuel. <br/> | ||
+ | À la cour de Turin, Madame Royale, dont la devise est «Plus de fermeté que d’éclat», assure un long règne qui dépasse la fin officielle de sa régence pour durer jusqu’à sa mort en 1663. Elle mène une politique habile, tiraillée entre les prétentions françaises et espagnoles sur la Savoie, à une époque de fragilités internes : minorité du prince, division dans la famille (deux beaux-frères, le prince Thomas, alors affilié à l’Espagne et le cardinal Maurice, à la France). Christine est aidée par un conseiller dévoué, Philippe d’Aglié, poète, intellectuel et homme politique si expert que Richelieu le fait emprisonner. L’épreuve la plus dure pour elle vient de ses beaux-frères qui contestent la légitimité de sa régence : débute une terrible guerre civile (1638-1642) entre les clans des ''Madamisti'' et ''Principisti'', se solvant, après compromis, à l’avantage de la régente. En 1648, avertie d’un complot, Christine réussit un vrai coup d’État: elle installe au pouvoir Charles Emmanuel II, majeur, évinçant les oncles et affirmant son rôle de maîtresse absolue du duché. Malgré quelques combats contre l’Espagne, un certain calme est maintenu jusqu’à la Paix des Pyrénées (1659), qui consacre la suprématie de la France, aux côtés de laquelle se trouve la Savoie.<br/> | ||
+ | De culture française, la duchesse anime à Turin l’une des plus brillantes cours européennes, où elle exerce une politique artistique régalienne. Dans la lignée des ducs, elle magnifie la capitale et les demeures des Délices aux alentours. Elle donne des fêtes somptueuses, modèles pour toute l’Europe, comme au château du Valentino sur les bords du Pô, lieu de plaisance favori de la duchesse, transformé en symbole du pouvoir par d’Aglié et Emmanuel Tesauro. Enfin, sur le plan religieux, elle est une catholique active et dévote. <br/> | ||
+ | La réussite de cette femme aussi maternelle que tenace ne se résume pas à sa capacité à résister aux pressions de Richelieu ou de ses beaux-frères. Son rôle de chef d’État tient en quatre axes majeurs pour le duché : elle l’allie durablement à la France et en assure l’indépendance relative ; elle consolide un absolutisme «tempéré» accompagné d’une politique artistique de prestige lui assurant un rayonnement européen ; elle renforce les structures administratives et étatiques, substituant au rôle d’État tampon du duché celui d’État intermédiaire ; enfin, dans la voie des ducs, elle accélère l’acquisition d’un titre royal, obtenu par Victor-Amédée II, roi de Sicile (1713) et de Sardaigne (1720). Cette française devenue piémontaise meurt à Turin le 27 décembre 1663.<br/> | ||
+ | La régence de Christine de France a été malmenée, si ce n’est oubliée, par l’historiographie française qui en donna une vision déformée, hormis dans quelques entrées de dictionnaires. Loin des récits emphatiques des historiographes de la dynastie, les histoires récentes de la Savoie n’évoquent son rôle que brièvement. Elle est aujourd’hui l’objet de nouvelles parutions françaises, dont l’initiative revient à Giuliano Ferretti. Côté italien, en revanche, outre des monographies, les ouvrages sur cette période compilent un certain nombre d’études historiques, artistiques et littéraires sur l’œuvre de la duchesse et sur sa cour. | ||
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+ | ==Principales sources== | ||
+ | '''Archives inédites''' | ||
+ | * Archives d’État (Italie, Turin), Corte, Fonds Storia Real Casa, Tutele e Reggenze, Lettere Ministri... dont les manuscrits suivants dans les Storie particolari : Samuel Guichenon, «Le soleil en son apogée, ou l’histoire de la vie de Chrétienne de France», 1660, cat.3a, m.16, f.29 ; Valeriano Castiglione, «Historia della reggenza di Madama Reale», 1656, m.17, f.1. | ||
+ | * Archives d’État (Italie, Turin), Riunite, Archivio Camerale, Real Casa, Casa di sua Maesta... | ||
+ | * Archives Historiques de la ville (Italie, Turin), Coll. Simeom, C 2381 à 2390... | ||
+ | * Bibliothèque Royale (Italie, Turin), Miscellanea Patria, Cerimoniale di Corte ; Id. Orazioni patrie Real Casa, 480, 494, 499, 757 ; Storia Patria, «Relation de la Cour de Savoye, ou les amours de Madame Royale» 296... | ||
+ | * Archives du Ministère des Affaires Etrangères (France, Paris), Correspondance politique, Sardaigne 1, 2, 12, 16, 25-27, 39, 42, Cérémonial 17 ; France I-II, Affaires intérieures et extérieures 21, France et divers États 14, 42, Affaires intérieures 80, 92... | ||
+ | * Archives départementales de Savoie (France, Chambéry) : Sénat de Savoie (pour la correspondance avec les souverains savoyards) dont les lettres numérisées de Madame Royale au Sénat de Savoie, 2B38 à 2B40 ; Indice Savoia ; Archives anciennes et modernes série H ; Sénat-Familles ; Trésor des chartes des ducs de Savoie (partagé avec les Archives départementales de Haute-Savoie (Annecy). | ||
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+ | Sources imprimées''' | ||
+ | * Siri, Vittorio, ''Il Mercurio, ovvero Historia de' correnti tempi'', 15 vol., Casale, Venise, Florence, 1644-1682. | ||
+ | * Socini, Pietro Antonio, ''Successi del mondo'', Turin, G.A. Gianelli, 1645-1665. | ||
+ | * Della Chiesa, Francesco Agostino, ''Corona Reale di Savoia, o sia relatione delle provincie, e Titoli ad essa appartenenti'', 2 vol., Cuneo, FF. Strabella, 1655-1657. | ||
+ | * Guichenon, Samuel, ''Histoire généalogique de la royale maison de Savoie'', Lyon, G. Barbier, 1660. | ||
+ | * Aglié, Philippe d’, ''Le Delitie, relatione della Vigna di Madama Reale Christiana di Francia, duchessa di Savoia'', Turin, Rustis, 1667. | ||
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Version du 21 décembre 2015 à 16:55
Christine de France | ||
Titre(s) | Duchesse de Savoie; Régente de Savoie | |
---|---|---|
Conjoint(s) | Victor-Amédée Ier de Savoie | |
Dénomination(s) | Chrestienne ou Chrétienne de France « Madame Royale » Christine de Savoie Christine de Bourbon | |
Biographie | ||
Date de naissance | 10 février 1606 | |
Date de décès | 2 décembre 1663 | |
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s) |
__FORETOC__
Notice de Florine Vital-Durand, 2015
Christine de France, fille de Henri IV et Marie de Médicis, est née à Paris le 10 février 1606. Richelieu et Louis XIII, entrevoyant la Savoie, «porte des Alpes», comme la clef de leur lutte contre l’influence des Habsbourg en Italie, marient Christine en 1619 à Victor Amédée Ier (1587-1637), duc de Savoie en 1630 au décès de Charles-Emmanuel Ier. La duchesse est la sœur des plus grands de France : Louis XIII, Gaston d’Orléans, Élisabeth, reine d’Espagne en 1621 et Henriette, reine d’Angleterre en 1625. Rêvant elle-même d’un titre royal, elle soutient son époux dans sa quête de la couronne de Chypre, arguant de liens matrimoniaux du XVe siècle avec la maison de Lusignan régnant sur l’île. Elle a les mêmes ambitions, parfois contrariées, pour ses enfants : Louise est mariée à son oncle Maurice de Savoie, Marguerite au duc de Parme, Adélaïde au duc électeur de Bavière et Charles-Emmanuel à la nièce de Louis XIII, Françoise d’Orléans, mort peu après. Il épouse ensuite Jeanne-Baptiste de Nemours. À la mort de Victor-Amédée en 1637, Christine devient régente au nom du fils aîné, François-Hyacinthe, qui meurt un an plus tard, puis du cadet Charles-Emmanuel.
À la cour de Turin, Madame Royale, dont la devise est «Plus de fermeté que d’éclat», assure un long règne qui dépasse la fin officielle de sa régence pour durer jusqu’à sa mort en 1663. Elle mène une politique habile, tiraillée entre les prétentions françaises et espagnoles sur la Savoie, à une époque de fragilités internes : minorité du prince, division dans la famille (deux beaux-frères, le prince Thomas, alors affilié à l’Espagne et le cardinal Maurice, à la France). Christine est aidée par un conseiller dévoué, Philippe d’Aglié, poète, intellectuel et homme politique si expert que Richelieu le fait emprisonner. L’épreuve la plus dure pour elle vient de ses beaux-frères qui contestent la légitimité de sa régence : débute une terrible guerre civile (1638-1642) entre les clans des Madamisti et Principisti, se solvant, après compromis, à l’avantage de la régente. En 1648, avertie d’un complot, Christine réussit un vrai coup d’État: elle installe au pouvoir Charles Emmanuel II, majeur, évinçant les oncles et affirmant son rôle de maîtresse absolue du duché. Malgré quelques combats contre l’Espagne, un certain calme est maintenu jusqu’à la Paix des Pyrénées (1659), qui consacre la suprématie de la France, aux côtés de laquelle se trouve la Savoie.
De culture française, la duchesse anime à Turin l’une des plus brillantes cours européennes, où elle exerce une politique artistique régalienne. Dans la lignée des ducs, elle magnifie la capitale et les demeures des Délices aux alentours. Elle donne des fêtes somptueuses, modèles pour toute l’Europe, comme au château du Valentino sur les bords du Pô, lieu de plaisance favori de la duchesse, transformé en symbole du pouvoir par d’Aglié et Emmanuel Tesauro. Enfin, sur le plan religieux, elle est une catholique active et dévote.
La réussite de cette femme aussi maternelle que tenace ne se résume pas à sa capacité à résister aux pressions de Richelieu ou de ses beaux-frères. Son rôle de chef d’État tient en quatre axes majeurs pour le duché : elle l’allie durablement à la France et en assure l’indépendance relative ; elle consolide un absolutisme «tempéré» accompagné d’une politique artistique de prestige lui assurant un rayonnement européen ; elle renforce les structures administratives et étatiques, substituant au rôle d’État tampon du duché celui d’État intermédiaire ; enfin, dans la voie des ducs, elle accélère l’acquisition d’un titre royal, obtenu par Victor-Amédée II, roi de Sicile (1713) et de Sardaigne (1720). Cette française devenue piémontaise meurt à Turin le 27 décembre 1663.
La régence de Christine de France a été malmenée, si ce n’est oubliée, par l’historiographie française qui en donna une vision déformée, hormis dans quelques entrées de dictionnaires. Loin des récits emphatiques des historiographes de la dynastie, les histoires récentes de la Savoie n’évoquent son rôle que brièvement. Elle est aujourd’hui l’objet de nouvelles parutions françaises, dont l’initiative revient à Giuliano Ferretti. Côté italien, en revanche, outre des monographies, les ouvrages sur cette période compilent un certain nombre d’études historiques, artistiques et littéraires sur l’œuvre de la duchesse et sur sa cour.
Principales sources
Archives inédites
- Archives d’État (Italie, Turin), Corte, Fonds Storia Real Casa, Tutele e Reggenze, Lettere Ministri... dont les manuscrits suivants dans les Storie particolari : Samuel Guichenon, «Le soleil en son apogée, ou l’histoire de la vie de Chrétienne de France», 1660, cat.3a, m.16, f.29 ; Valeriano Castiglione, «Historia della reggenza di Madama Reale», 1656, m.17, f.1.
- Archives d’État (Italie, Turin), Riunite, Archivio Camerale, Real Casa, Casa di sua Maesta...
- Archives Historiques de la ville (Italie, Turin), Coll. Simeom, C 2381 à 2390...
- Bibliothèque Royale (Italie, Turin), Miscellanea Patria, Cerimoniale di Corte ; Id. Orazioni patrie Real Casa, 480, 494, 499, 757 ; Storia Patria, «Relation de la Cour de Savoye, ou les amours de Madame Royale» 296...
- Archives du Ministère des Affaires Etrangères (France, Paris), Correspondance politique, Sardaigne 1, 2, 12, 16, 25-27, 39, 42, Cérémonial 17 ; France I-II, Affaires intérieures et extérieures 21, France et divers États 14, 42, Affaires intérieures 80, 92...
- Archives départementales de Savoie (France, Chambéry) : Sénat de Savoie (pour la correspondance avec les souverains savoyards) dont les lettres numérisées de Madame Royale au Sénat de Savoie, 2B38 à 2B40 ; Indice Savoia ; Archives anciennes et modernes série H ; Sénat-Familles ; Trésor des chartes des ducs de Savoie (partagé avec les Archives départementales de Haute-Savoie (Annecy).
Sources imprimées
- Siri, Vittorio, Il Mercurio, ovvero Historia de' correnti tempi, 15 vol., Casale, Venise, Florence, 1644-1682.
- Socini, Pietro Antonio, Successi del mondo, Turin, G.A. Gianelli, 1645-1665.
- Della Chiesa, Francesco Agostino, Corona Reale di Savoia, o sia relatione delle provincie, e Titoli ad essa appartenenti, 2 vol., Cuneo, FF. Strabella, 1655-1657.
- Guichenon, Samuel, Histoire généalogique de la royale maison de Savoie, Lyon, G. Barbier, 1660.
- Aglié, Philippe d’, Le Delitie, relatione della Vigna di Madama Reale Christiana di Francia, duchessa di Savoia, Turin, Rustis, 1667.