Françoise de Coëtquen : Différence entre versions

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Née en 1676, Françoise est la fille de Henry, marquis de Coëtquen, comte de Combourg, gouverneur de Saint-Malo et de Guillemette-Françoise Belin, dame de la Marzellière. Pensionnaire chez les bénédictines du Calvaire de Saint-Malo, elle s’y découvre une vocation religieuse qui ne correspond en rien aux projets de sa famille. Après sa profession, ses dispositions et ses qualités n’échappent pas à la prieure du couvent, qui envoie la nouvelle professe à Paris où se trouve la direction de la congrégation. C’est ainsi que Françoise de Coëtquen devient successivement sous-prieure du couvent du Marais, puis assistante de Marie-Madeleine de la Passion de Perrien de Crénan, supérieure générale des bénédictines du Calvaire, à laquelle elle succède le 15 mars 1722.<br/>  
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Née en 1676, Françoise est la fille de Henry, marquis de Coëtquen, comte de Combourg, gouverneur de Saint-Malo et de Guillemette-Françoise Belin, dame de la Marzellière. Pensionnaire chez les bénédictines du Calvaire de Saint-Malo, elle s’y découvre une vocation religieuse qui ne correspond en rien aux projets de sa famille. Après sa profession religieuse, ses dispositions et ses qualités n’échappent pas à la prieure du couvent, qui envoie la nouvelle professe à Paris où se trouve la direction de la congrégation. C’est ainsi que Françoise de Coëtquen devient successivement sous-prieure du couvent du Marais, puis assistante de Marie-Madeleine de la Passion de Perrien de Crénan, supérieure générale des bénédictines du Calvaire, à laquelle elle succède le 15 mars 1722.<br/>  
 
Son histoire s’inscrit désormais dans le contexte de la controverse janséniste qui est loin d’être éteinte au XVIIIe siècle. L’absence d’éléments biographiques ne permet pas de dire si, à cette date-là, Françoise de Coëtquen est déjà hostile à la bulle ''Unigenitus'' (1713), qui condamne 101 propositions tirées du livre des ''Réflexions morales'' de l’oratorien Pasquier Quesnel. Les résistants (parmi lesquels on compte des évêques et des réguliers mais aussi des religieuses et des laïcs) en appellent au concile général contre l’autorité, jugée abusive, du pape et du roi. L’opinion publique s’empare de la question dans un contexte d’opposition à différentes formes de pouvoir. Le ciel est alors convoqué pour donner raison à certains résistants qui cherchent des manifestations de l’approbation divine dans des signes jugés surnaturels. Au début des années 1730, les miracles opérés dans le cimetière de Saint-Médard (Paris) par l’intercession du diacre François de Pâris (mort en 1727) poussent Françoise de Coëtquen à s’engager derrière Charles-Joachim Colbert de Croissy, évêque de Montpellier, un des supérieurs majeurs des calvairiennes, qui défend avec beaucoup de talent et d’énergie le caractère divin des phénomènes observés à Saint-Médard (guérisons miraculeuses et comportements convulsionnaires). Ainsi, Françoise de Coëtquen accueille-t-elle des petites pensionnaires convulsionnaires dans les deux maisons de Paris, situées dans le Marais et dans le faubourg Saint-Germain. En juin 1733, l’une d’elles, fille cadette de Marie-Anne d’Arenberg, princesse d’Auvergne, joue un rôle décisif dans la guérison miraculeuse de Marguerite Loyselle de Sainte-Clotilde, religieuse du couvent du faubourg Saint-Germain. La relation de ce miracle, établie par des notaires, est envoyée par les soins de Françoise de Coëtquen dans les couvents de province afin de susciter des vocations d’appelantes. Mais le rôle joué par la convulsionnaire dans cette guérison fait scandale, non seulement à la Cour mais aussi dans certains cercles jansénistes (qui sont loin de tous soutenir la cause de convulsionnaires). L’année suivante, le cardinal de Fleury décide de bloquer l’élection de la nouvelle supérieure générale. Françoise de Coëtquen n’ignore rien des sanctions qui frappent les communautés religieuses féminines dissidentes, mais elle s’engage corps et âme dans la résistance, non sans s’inquiéter de ses religieuses exclues comme elle des sacrements. Après la mort de Colbert de Croissy, en avril 1738, un bref pontifical désigne des commissaires apostoliques pour gouverner la congrégation. Françoise de Coëtquen proteste et envoie aux maisons de province des modèles d’actes d’opposition contre les modifications faites aux statuts des bénédictines du Calvaire. Le 20 décembre 1739, une lettre de cachet ordonne son transfert chez les bénédictines de Jarcy-en-Brie. C’est le début de la persécution qui va frapper les communautés de calvairiennes opposantes à la bulle ''Unigenitus'' et au bref pontifical. A Jarcy-en-Brie, Françoise de Coëtquen est étroitement surveillée. Affaiblie par la maladie, elle ne cède rien sur son engagement en faveur de l’Appel et meurt le 24 avril 1745, privée des derniers sacrements et de la sépulture ecclésiastique.<br/>  
 
Son histoire s’inscrit désormais dans le contexte de la controverse janséniste qui est loin d’être éteinte au XVIIIe siècle. L’absence d’éléments biographiques ne permet pas de dire si, à cette date-là, Françoise de Coëtquen est déjà hostile à la bulle ''Unigenitus'' (1713), qui condamne 101 propositions tirées du livre des ''Réflexions morales'' de l’oratorien Pasquier Quesnel. Les résistants (parmi lesquels on compte des évêques et des réguliers mais aussi des religieuses et des laïcs) en appellent au concile général contre l’autorité, jugée abusive, du pape et du roi. L’opinion publique s’empare de la question dans un contexte d’opposition à différentes formes de pouvoir. Le ciel est alors convoqué pour donner raison à certains résistants qui cherchent des manifestations de l’approbation divine dans des signes jugés surnaturels. Au début des années 1730, les miracles opérés dans le cimetière de Saint-Médard (Paris) par l’intercession du diacre François de Pâris (mort en 1727) poussent Françoise de Coëtquen à s’engager derrière Charles-Joachim Colbert de Croissy, évêque de Montpellier, un des supérieurs majeurs des calvairiennes, qui défend avec beaucoup de talent et d’énergie le caractère divin des phénomènes observés à Saint-Médard (guérisons miraculeuses et comportements convulsionnaires). Ainsi, Françoise de Coëtquen accueille-t-elle des petites pensionnaires convulsionnaires dans les deux maisons de Paris, situées dans le Marais et dans le faubourg Saint-Germain. En juin 1733, l’une d’elles, fille cadette de Marie-Anne d’Arenberg, princesse d’Auvergne, joue un rôle décisif dans la guérison miraculeuse de Marguerite Loyselle de Sainte-Clotilde, religieuse du couvent du faubourg Saint-Germain. La relation de ce miracle, établie par des notaires, est envoyée par les soins de Françoise de Coëtquen dans les couvents de province afin de susciter des vocations d’appelantes. Mais le rôle joué par la convulsionnaire dans cette guérison fait scandale, non seulement à la Cour mais aussi dans certains cercles jansénistes (qui sont loin de tous soutenir la cause de convulsionnaires). L’année suivante, le cardinal de Fleury décide de bloquer l’élection de la nouvelle supérieure générale. Françoise de Coëtquen n’ignore rien des sanctions qui frappent les communautés religieuses féminines dissidentes, mais elle s’engage corps et âme dans la résistance, non sans s’inquiéter de ses religieuses exclues comme elle des sacrements. Après la mort de Colbert de Croissy, en avril 1738, un bref pontifical désigne des commissaires apostoliques pour gouverner la congrégation. Françoise de Coëtquen proteste et envoie aux maisons de province des modèles d’actes d’opposition contre les modifications faites aux statuts des bénédictines du Calvaire. Le 20 décembre 1739, une lettre de cachet ordonne son transfert chez les bénédictines de Jarcy-en-Brie. C’est le début de la persécution qui va frapper les communautés de calvairiennes opposantes à la bulle ''Unigenitus'' et au bref pontifical. A Jarcy-en-Brie, Françoise de Coëtquen est étroitement surveillée. Affaiblie par la maladie, elle ne cède rien sur son engagement en faveur de l’Appel et meurt le 24 avril 1745, privée des derniers sacrements et de la sépulture ecclésiastique.<br/>  
Jusqu’ici inconnue, Françoise de Coëtquen est sortie de l’oubli à la faveur d’études récentes sur l’histoire du jansénisme dans laquelle des religieuses militantes – et pas seulement celles de Port-Royal - ont joué un rôle fondamental de résistance à l’autorité royale et pontificale et soutenu courageusement la thèse du droit à la liberté de conscience.
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Jusqu’ici inconnue, Françoise de Coëtquen est sortie de l’oubli à la faveur d’études récentes sur l’histoire du jansénisme [http://www.amisdeportroyal.org/societe/ ] dans laquelle des religieuses militantes – et pas seulement celles de Port-Royal - ont joué un rôle fondamental de résistance à l’autorité royale et pontificale et soutenu courageusement la thèse du droit à la liberté de conscience.
  
 
==Oeuvres==
 
==Oeuvres==

Version du 3 mars 2013 à 16:40

Françoise de Coëtquen
Dénomination(s) Mère Saint-Augustin
Biographie
Date de naissance 1676
Date de décès 1745
Notice(s) dans dictionnaire(s) ancien(s)


Notice de Françoise de Noirfontaine et de Marie-Elisabeth Henneau, 2011

Née en 1676, Françoise est la fille de Henry, marquis de Coëtquen, comte de Combourg, gouverneur de Saint-Malo et de Guillemette-Françoise Belin, dame de la Marzellière. Pensionnaire chez les bénédictines du Calvaire de Saint-Malo, elle s’y découvre une vocation religieuse qui ne correspond en rien aux projets de sa famille. Après sa profession religieuse, ses dispositions et ses qualités n’échappent pas à la prieure du couvent, qui envoie la nouvelle professe à Paris où se trouve la direction de la congrégation. C’est ainsi que Françoise de Coëtquen devient successivement sous-prieure du couvent du Marais, puis assistante de Marie-Madeleine de la Passion de Perrien de Crénan, supérieure générale des bénédictines du Calvaire, à laquelle elle succède le 15 mars 1722.
Son histoire s’inscrit désormais dans le contexte de la controverse janséniste qui est loin d’être éteinte au XVIIIe siècle. L’absence d’éléments biographiques ne permet pas de dire si, à cette date-là, Françoise de Coëtquen est déjà hostile à la bulle Unigenitus (1713), qui condamne 101 propositions tirées du livre des Réflexions morales de l’oratorien Pasquier Quesnel. Les résistants (parmi lesquels on compte des évêques et des réguliers mais aussi des religieuses et des laïcs) en appellent au concile général contre l’autorité, jugée abusive, du pape et du roi. L’opinion publique s’empare de la question dans un contexte d’opposition à différentes formes de pouvoir. Le ciel est alors convoqué pour donner raison à certains résistants qui cherchent des manifestations de l’approbation divine dans des signes jugés surnaturels. Au début des années 1730, les miracles opérés dans le cimetière de Saint-Médard (Paris) par l’intercession du diacre François de Pâris (mort en 1727) poussent Françoise de Coëtquen à s’engager derrière Charles-Joachim Colbert de Croissy, évêque de Montpellier, un des supérieurs majeurs des calvairiennes, qui défend avec beaucoup de talent et d’énergie le caractère divin des phénomènes observés à Saint-Médard (guérisons miraculeuses et comportements convulsionnaires). Ainsi, Françoise de Coëtquen accueille-t-elle des petites pensionnaires convulsionnaires dans les deux maisons de Paris, situées dans le Marais et dans le faubourg Saint-Germain. En juin 1733, l’une d’elles, fille cadette de Marie-Anne d’Arenberg, princesse d’Auvergne, joue un rôle décisif dans la guérison miraculeuse de Marguerite Loyselle de Sainte-Clotilde, religieuse du couvent du faubourg Saint-Germain. La relation de ce miracle, établie par des notaires, est envoyée par les soins de Françoise de Coëtquen dans les couvents de province afin de susciter des vocations d’appelantes. Mais le rôle joué par la convulsionnaire dans cette guérison fait scandale, non seulement à la Cour mais aussi dans certains cercles jansénistes (qui sont loin de tous soutenir la cause de convulsionnaires). L’année suivante, le cardinal de Fleury décide de bloquer l’élection de la nouvelle supérieure générale. Françoise de Coëtquen n’ignore rien des sanctions qui frappent les communautés religieuses féminines dissidentes, mais elle s’engage corps et âme dans la résistance, non sans s’inquiéter de ses religieuses exclues comme elle des sacrements. Après la mort de Colbert de Croissy, en avril 1738, un bref pontifical désigne des commissaires apostoliques pour gouverner la congrégation. Françoise de Coëtquen proteste et envoie aux maisons de province des modèles d’actes d’opposition contre les modifications faites aux statuts des bénédictines du Calvaire. Le 20 décembre 1739, une lettre de cachet ordonne son transfert chez les bénédictines de Jarcy-en-Brie. C’est le début de la persécution qui va frapper les communautés de calvairiennes opposantes à la bulle Unigenitus et au bref pontifical. A Jarcy-en-Brie, Françoise de Coëtquen est étroitement surveillée. Affaiblie par la maladie, elle ne cède rien sur son engagement en faveur de l’Appel et meurt le 24 avril 1745, privée des derniers sacrements et de la sépulture ecclésiastique.
Jusqu’ici inconnue, Françoise de Coëtquen est sortie de l’oubli à la faveur d’études récentes sur l’histoire du jansénisme [1] dans laquelle des religieuses militantes – et pas seulement celles de Port-Royal - ont joué un rôle fondamental de résistance à l’autorité royale et pontificale et soutenu courageusement la thèse du droit à la liberté de conscience.

Oeuvres

  • 1732-1734, Lettres, dans Françoise de Noirfontaine (éd.), Croire, souffrir et résister. Lettres de religieuses opposantes de la bulle Unigenitus, préface de Monique Cottret, Paris, Nolin, 2009, p. 162-176.

Choix bibliographique

  • Nouvelles ecclésiastiques, 11 septembre 1745, p. 145-148.
  • Françoise de Noirfontaine, «“Pierres vivantes de Port-Royal”, les bénédictines du Calvaire et la bulle Unigenitus, Chroniques de Port-Royal, 2003, p. 159-175.
  • Françoise de Noirfontaine (éd.), Croire, souffrir et résister. Lettres de religieuses opposantes de la bulle Unigenitus, préface de Monique Cottret, Paris, Nolin, 2009, p. 162-176.
  • Françoise de Noirfontaine, « Les damnées de la bulle Unigenitus ou les refus de derniers sacrements et de la sépulture ecclésiastique dans les communautés religieuses de femmes (1725-1780) », in Les damnés du ciel et de la terre, Monique Cottret et Caroline Galland (dir.), Presses universitaires de Limoges, 2010.

Jugements

  • « Vous etes heureuses mes très cheres filles d’avoir trouvé une femme forte qui tienne plus à la Verité qu’à la place qu’elle occupe. Peu s’en faut que je ne lui applique ces paroles d’un cantique célèbre : “On a cessé de voir de vaillans hommes dans Israël, il ne s’en trouvoit plus jusqu’à ce que Debora se soit elevée, jusqu’à ce qu’il se soit elevée une mere dans Israel”. » (Les Œuvres de Messire Charles-Joachim Colbert evesque de Montpellier, Cologne, tome III, [aux dépens de la Compagnie], 1740, lettre aux religieuses du Marais 16 juin 1732, p. 546)
  • « Pourrais-je vous oublier, vénérable Coetquen, généreuse supérieure des filles du Calvaire? Seule entre tous les généraux d’ordre, vous sûtes échapper à la malédiction commune prononcée contre ces mères insensées qui ne voient à conserver que les murailles de leur maison et la vie du corps de leurs enfants ? […] Reléguée dans une maison étrangère, exclue de toute société humaine, et uniquement soutenue par la grâce intérieure contre les assauts du fanatisme, vous avez constamment et durant six années entières, préféré l’opprobre de J. C. au vain éclat d’une supériorité temporelle. Et enfin arrivée à votre dernière heure, les injures, les reproches amers des persécuteurs, l’injuste privation des derniers secours de l’Eglise et jusqu’au refus barbare de la sépulture en terre sainte qu’elle accorde à ses enfants. » (Paris, Bibliothèque de Port-Royal, ms non coté: Premier discours lu le 8 septembre 1813 dans une réunion d’Amis de la Vérité sur la bulle Unigenitus du 8 septembre 1713…) .
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